Dans le cadre de mes différentes activités, j’aime particulièrement celle pratiquée sur la psychologie de la foule et son management. Pour commencer à intéresser l’auditoire, j’aime commencer avec ces deux réalités :

La foule est intelligente sous conditions d’être libre sans influence.

La première concerne Sir Richard Granton, 84 ans quand il fait cette découverte bousculant son idée que la foule était stupide et surtout, comme pape de l’eugénisme, que l’intelligence tout autant que la bêtise étaient héréditaires. Il faut dire qu’œuvrant dans le 19e siècle, il était facile aux aristocrates de faire preuve d’intelligence, profitant du travail de ceux qui n’avaient pas d’autres moyens que de travailler durement pour vivre ou survivre dans cette période industrielle.

Boeuf dans une foire à Bestiaux, 1900.

En 1906, dans une habituelle vente de bestiaux qui s’opérait à Plymouth, dans le Sud-est de l’Angleterre, il aperçoit un marchand de bestiaux plus malin que les autres, proposant à la foule de tenter leur chance, avec vingt-cinq shillings, s’ils trouvaient le poids exact en viande, du bœuf présenté, : « la bête et son abondance en nourriture leur était attribué ! »

Vingt-cinq shillings pour autant de viande. À ce prix, il eut 787 réponses, ce qui lui donna bien plus que le prix de son bœuf.

Fort de sa notoriété et de ses habits, Sir Richard Granton apostropha le marchand et lui demanda les 787 tickets, quasiment certain que les propositions allaient être stupéfiantes. La foule est stupide depuis Gustave Le Bon (1896).

Effectivement, il ne se trompa pas. Quand il fit la moyenne, il resta interpelé : le bœuf découpé avait donné 543 kilos ! La foule avait trouvé …. 542 kilos. 1 kilo de différence.

En bon anglais, stoïque, il attribua cela .. à la démocratie en ayant ces mots difficiles dans un pays régenté par la Royauté : « effectivement la démocratie a quelques qualités. »

La foule avait montré son intelligence.

À la condition, où l’influence n’avait pas été présente, sinon les avis trop prononcé des uns attirent les réponses des autres comme un aimant, alors que l’histoire vécue par Sir Richard Granton, fait de diverses opinions, s’équilibre avec les positions opposées les plus extrêmes. Les deux s’annulant.

Quelle est alors la force de l’influence qui retire à la foule sa capacité à l’intelligence ?

Schéma de l’influence

C’est l’objet de ma seconde intervention au lancement d’une conférence ou d’un cours :

« Quelques années plus tard, dans ce nouveau millénaire, une équipe de chercheurs chercha à mesurer la réalité de l’influence.

Ils créèrent une plateforme numérique et ont mis dessus, 48 musiques faites par des professionnels. Ils créèrent une foule de 15000 internautes leur demandant de juger les 48 musiques en ayant la possibilité de les télécharger gratuitement. Au final, aucun titre ne ressortit plus qu’un autre. Les internautes ne se connaissaient pas, ils avaient choisi les titres de manière équilibrée.

Dans le second essai, l’équipe de chercheurs mis aléatoirement des avis positifs comme négatifs sur les titres. Un titre ressorti immédiatement, celui où les premiers avis venaient de l’équipe. Le nouveau groupe de 15.000 avaient suivi cette tendance qui s’annonçait. De fil en aiguille, une grande majorité avait suivi, le titre était passé largement devant.

Était-ce le titre ou l’influence ?

Ils décidèrent de créer un 3e groupe, et avec une nouvelle foule de 15.000 votants, ils choisirent un autre titre où son équipe mit des commentaires, en mettant des avis positifs comme négatifs aléatoirement pour les autres. Vous n’en douterez pas, ce fut ce nouveau titre qui pourtant, musicalement, ne ressemblait pas au second, qui a été largement choisi par la foule.

L’influence était prouvée. Avec cette précision : les meilleurs titres finissaient dans le Top 10, les pires et moins bons ne passaient jamais le cut des 30 premières.

La foule influencée ne transformera jamais un âne en pur-sang, ni un pur-sang en âne !

Que conclure ? La foule peut avoir raison quand elle n’est pas influencée. L’expérience s’est souvent répétée depuis. Quand il y a influence dans la foule, elle ne transformera jamais un âne en pur-sang, ni un pur-sang en âne.

Quoi que, avec Gangnam Style, qui a fait exploser le record mondial de vues sur YouTube (132 millions de vues en 2012), on devrait pouvoir parler de chef-d’œuvre, mais on a du mal.

William Commegrain Lesfeminines.fr