Un match de football peut se regarder et se lire de tant de manières.
Le fan parisien vient pour chanter le PSG
Vous avez le fan qui vient au stade et ne vibre qu’au son des couleurs de son club, reconnaissant la qualité de l’adversaire, pris par l’émotion du risque de perdre et chantant à tue-tête, l’espoir de ses couleurs quand elles sortent vainqueurs. Au Parc, hier soir, même avec seulement 5.971 spectateurs, le Paris Saint Germain a montré que le mot « Paris » en football, n’est pas autrement fait, qu’au son du PSG.
Il y a de la bombe humaine dans le cœur de ces gens.
Quand tout un stade, même fait de 5.000 spectateurs, se lève à la demande du capo des Ultras, chantant l’hymne parisien, aussi connu des parisiens que l’est la Marseillaise pour ces fans. Le chant, leur chant fait partie de leur émotion. C’est une évidence. Même peu connaisseur du football féminin, ils ont tous chanté l’hymne parisien.
Ma belle-fille, après un bon repas marocain, boulevard de la Reine, a les yeux qui brillent à entendre chanter le Kop parisien. Elle, contactée pour un casting de la Nouvelle Star, spécialiste du karaoké, se lève pour chanter. Car, les philippins chantent dès que d’autres chantent.
Les observateurs ne voient qu’un rien d’un tout
Vous avez les observateurs. Souvent « chryothérapé » (refroidis) en haut des stades, pour une vision générale du jeu. Ils ne voient pas l’effort de la performance et ne peuvent que juger, les déplacements. De haut, de trop haut, ralentis par la hauteur de leur situation, ne comprenant pas que la balle ne passe pas, ou passe mal.
Installés dans le coin droit du stade, mon fils de trente ans, premier match féminin, et peu de football, se soulève comme un fan à la balle piquée de Marie-Antoinette Katoto, prise en étau sur deux adversaires du Paris FC. Inattendu. « Il se passe quelque chose là ! »
Les spectateurs au spectacle
Puis vous avez les spectateurs, venus voir un spectacle. Et ce soir, le spectacle a été présent. j’ai eu le sentiment de revoir ce que j’avais vu, tout au début du football féminin, sur les bancs froids de Juvisy.
Plus vous êtes près du jeu et plus vous comprenez la course d’une joueuse, voyez la sensation d’une demande inattendue, comme celle de Clara Mateo ordonnant plus de présence à Korosec, d’une intention avec trois tacles consécutifs de la même joueuse, d’un combat entre Julie Dufour, descendue défendre contre Jade Le Guilly, montée d’un cran.
Une volonté se dégage de ce combat, puis le sentiment d’une hargne similaire, même âge, même génération, même envie. Deux corps tendus pour deux efforts opposés. Dix secondes intenses qui se finiront par la tête baissée de la perdante, la satisfaction de la gagnante. Pour une prochaine adversité.
En fait, vous êtes proche de la sueur du jeu et de sa réalité.
Les joueuses savent tout, comprennent tout, et font des exploits comme des erreurs.
Le combat est celui des joueuses. Il leur appartient.
Et là, vous avez les joueuses qui sont elles, actrices du jeu. Vous comprenez qu’en un regard, elles savent ce qui va ou ne va pas dans l’action du moment. Elles comprennent leur intelligence, elles dealent leurs faiblesses, celles des adversaires. Elles répètent, inlassablement. Un geste, une intention. Puis refaire et encore refaire. Sans savoir quand, mais en sachant qu’il faut passer par d’abord par le comment !
En fait comme en droit, elles ont les clés de la rencontre. A un moment, cela passera.
Une répétition individuelle, certes mais qui, dans les quatre vingt dix minutes, donne, par moment, une force collective. Cela a été fugace sur le plan offensif pour le Paris FC, continu dans l’effort défensif ; plus constant pour le Paris Saint Germain, fonctionnant par vagues offensives successives, où le talent de l’une, Kiedrzynek, pouvait faire la différence quand l’erreur d’une autre ou de la même, entraîne l’équipe dans les bas fonds du risque de la descente.
Les coaches, les staffs, les dirigeants, l’audience télévisée
On en peut pas terminer sans rappeler la vision des coaches, du staff, des dirigeants assis en présidentiel, des arbitres sur le terrain et maintenant de la VAR.
Puis, pièce maîtresse, celle des téléspectateurs. Nombreux, loin du jeu mais si présent dans le détail avec des ralentis, des suppositions, des meilleurs choix, le transformant en chirurgien de l’erreur, des points de détails. De l’incroyable devenu croyable.
Un match de football, c’est tout cela.
Il faudrait être bien présomptueux pour dire que l’un ou l’une a plus raison que l’autre.
Venus sans rien à trois, après un bon repas, je n’attendais rien et j’en suis sorti, heureux, d’avoir retrouvé cette sensation positive du jeu féminin, de l’effort des joueuses, du scénario, du partage et de l’émotion.
Simplement. En famille. Tranquille. Il me manquait juste ma fille, partie vivre son aventure, sa performance en Australie.
William Commegrain Lesfeminines.fr