Ce n’était pas grand chose à l’image de l’Europe pour une compétition qui s’annonce avec deux tours qualificatifs en Septembre et deux phases de groupes (Octobre à février) avant de voir les quarts de finale (mars), mais le scénario du match a transformé la rencontre COMME étant la RENCONTRE qui fera l’histoire européenne du Paris Fc pour les dix années à venir.
Paris FC (3-3, 4 tab à 3) ARSENAL
En jouant sa qualification du premier tour face à Arsenal, les parisiennes touchaient du lourd en face.
Des joueuses performantes à la Coupe du monde qui vient de se terminer en Australie et Nouvelle-Zélande.
L’exceptionnelle irlandaise Catie Mac Cabe qui donnera la transversale incroyable pour le 2e but égalisateur de l’ex montpelliéraine, Jennifer Beattie. L’ex parisienne Amanda Illestedt et suédoise, triple buteuse en Coupe du monde, membre de l’équipe suédoise devenue numéro 1 mondial. Steph Catley, capitaine de la Nouvelle-Zélande. Kim Little, ex meilleure joueuse européenne pour les amateurs éclairés. Caitlin Foord, excellente australienne en Coupe du monde. Lina Hurtig et Stina Blackstenius, leaders suédoises et 3e de la Coupe du Monde 2023. Et enfin Alexia Russo, star anglaise au Mondial, vice-championne du monde 2023, championne d’Europe 2022.
Des joueuses qui, selon l’expression -à l’image du football qui se veut populaire-, quand elles « pêtent », « pêtent » de l’Or en barre.
Au Paris Fc, c’est plus distingué. Plus franchouillard. Un peu dans l’esprit de l’ouverture de la Coupe du monde de Rugby. Il y a du romantisme, de l’artisanat, un bal « musette » qui sent bon l’habitude et les habituées, avec une majorité de joueuses ayant entre cinq et quinze années de présence au club.
Sur le plan international, on note la gardienne nigérienne Chiamaka Nnadozie, arrivée sans éclat en 2019-2020, brillante au mondial. On note Clara Mateo, joueuse de l’équipe de France et l’expérimentée Gaétane Thiney, 37 ans, aux commandes d’un navire qu’elle connait par cœur.
C’est une équipe qui n’a, potentiellement, rien à dire et qui, sous la tactique de Sandrine Soubeyrand, va faire parler la poudre.
La première mi-temps se siffle sous le score de (0-0). Le début d’une performance si le rapport de forces exposés ci-dessus est présent dans l’esprit de chacun. Les parisiennes tiennent, dans une opposition entre deux championnats dont les aficionados voudraient donner la primeur à l’Angleterre face à celui de la France, D1FArkema, trop souvent décrié.
Une seconde mi-temps au scénario incroyable.
Et le football va commencer à écrire un scénario qui fera verser des larmes de joie à l’expérimentée Gaetane Thiney, peu ouverte à ce genre d’émotions et dont les dernières larmes, -de peine-, remontent à 2015, au France-Allemagne de la Coupe du monde, pour ce plat du pied qui lui sera reproché, extérieur, en prolongation des quarts de finale.
Bourdieu, mal partie, enclenche un doublé
Mathilde Bourdieu vient de rater deux contrôles faciles.
A l’écran, sur ce terrain suédois du club de Linkoping, celle qui a un jeu de percussion, souffle.
De misère. D’énervements. De déception. Cinq minutes plus tard, elle fera un doublé. Le football est dingue.
Son premier but est un but « cagade » pour l’adversaire. La malchance entre dans la peau des joueuses d’Arsenal quand Julie Dufour, auteure d’un triplé lors de la rencontre précédente, se désaltère de sa performance en tentant, excentrée sur la droite, un lob de trente mètres qui surprend les grosses fesses de l’autrichienne Manuela Zinsberger, sans détente verticale, heureuse de voir son poteau extérieur refuser le but parisien.
Là, tout semble normal alors que Mathilde Bourdieu, adossée au poteau intérieur, spectatrice, revient sur le jeu et glisse une tête si maitrisée que la gardienne, chapardeuse, veut faire croire à une goal line imaginaire, qu’elle n’est jamais entrée.
Têtue, Mathilde Bourdieu fait le signe des Dieux, les bras au ciel, et envoie tout le monde au centre du terrain (0-1, 56′).
La finesse de Gaétane Thiney
Dans la minute, Arsenal engage et sur une passe mal assurée de Lia Wälti, qui lui coutera sa place (sortie à la 59′), la balle tombe dans les pieds de Gaetane Thiney au centre du terrain. La joueuse parisienne sait déjà qu’elle n’ira pas l’exploiter. Ses jambes de 37 ans n’assureront pas la réussite du contre mais elle connait la valeur inestimable du cadeau qui lui est offert.
Elle glisse le ballon à Mathilde Bourdieu (22 ans) qui, comme un lévrier à la recherche d’un lapin, envoie toute sa puissance pour se trouver dans la surface en deux touches de balle, sentant la respiration de la fautive Walti dans le dos, et place une balle pointue qui va au fond des filets (0-2, 57′).
En deux minutes, le Paris Fc est au Paradis quand Arsenal frôle l’enfer.
Les supporters français se font entendre
Dans le combat des supporters, les vingt franchouillards des tribunes envoient une sorte de marseillaise parisienne qui étouffe les chants anglais, dominateurs, excessifs et confiants, installés au premier rang de tribunes clairsemées. Le coq français se reconnait en Suède. Il a du chien comme celui de la cérémonie d’ouverture. A (0-2), il prendrait même un peu, du Lion vainqueur.
Alessia Russo réveille Arsenal
En face, l’entraîneur d’Arsenal fait entrer toutes ses mondialistes offensives et le motoculteur Alessia Russo, déjà défaite en finale de la Coupe du Monde 2023 face à l’Espagne, ne veut pas de cette épilation du maillot que les parisiennes lui propose.
Une erreur de Sissoko qui se voit déjà en fin de rencontre, tergiverse dans la surface et l’anglaise envoie une balle bien plantée dans les filets de Chiamaka Nnadozie à la 80′ (1-2).
Là, la tête est basse du côté de Paris. Les dix minutes de temps réglementaire et l’habituel extra-time qui sera de neuf minutes se dessinent dans le cerveaux des joueuses, entamés par une chaleur significative et les tampons réguliers des quatre-vingt minutes passées d’Arsenal, obligeant chacune à sa propre conscience.
« Abdiquer ou défendre ».
Cinq minutes plus tard, l’expérimentée Julie Soyer envoie une « lettre recommandée orale » à Sissoko pour lui expliquer qu’avoir la tête froide c’est surtout prendre des décisions rapide et décisives, en dégageant cette balle qui restait dans les pieds de l’arrière centrale sans y être.
Les parisiennes se couchent sur tout, se battent, s’opposent mais Arsenal a les pieds sur le ballon et envoie des lames de jeu qui fatiguent sans être décisives.
Tout semble possible même avec l’extra time de 9 minutes mais l’irlandaise Mac Cabe, joueuse d’instinct, envoie une transversale qui a tout de la passe d’un passeur au volley pour que, Jennifer Bettie, entrée à la 93′, place une tête vainqueur à la 96′ !
(2-2). Entrée à la 93′, buteuse à la 96′. Le « truc », la performance, est mal barrée du côté parisien.
Les prolongations à cœur vaillant
L’arbitre siffle la fin de la rencontre et lance, dans la foulée, les prolongations.
Quinze premières minutes où les deux équipes souhaitent écraser l’autre. Cela tape plus fort du côté d’Arsenal, logiquement et cela défend correctement du côté parisien.
Julie Soyer touche le Paradis
L’histoire viendra une nouvelle fois donner sa chance au Paris FC.
Une percée anodine sur le côté gauche de Fleury, qui cherche Ribadeira, évite Melween Ndongala, jeune joueuse voyant le dribble comme seule solution d’expression malgré les conseils de la professeure Clara Mateo, et la balle semble se promener dans un immense espace vide que Julie Soyer, latérale droite, 38 ans, vient occuper.
Pour placer un plat du pied droit qui donne le troisième but parisien (2-3, 106′).
Il y a là de quoi croire en l’incroyable.
C’est la troisième fois de suite que le Paris FC mène devant Arsenal !
La mine d’Alessia Russo
Du côté anglais. Alessia Russo transforme son motoculteur en tracteur poids lourd et envoie une mine, après une course latérale, que seuls les hommes sont aujourd’hui, capable de réaliser sans faire dévier le ballon à l’impact. C’est un vingt mètres qui ramène les deux équipes à égalité (116′, 3-3).
Soit Dieu donne sa chance au Paris Fc pour lui reprendre, ou tout simplement, Arsenal avec sa force, arrive à égaliser sans pouvoir prendre l’avantage.
Nnadozie et Ribadeira
Les tirs au but arrivent et dans cet exercice, les françaises ne sont pas « top ».
Dix tirs au but au récent mondial en quart de finale contre l’Australie et les Bleues reviennent en France. Du côté du Paris Fc, on compte sur les doigts de ses deux mains, tous les tirs aux buts perdus en Coupe ! Gaetane Thiney, d’habitude première tireuse, fait du stretching, perlée de crampes.
L’Histoire du passé n’est pas bleu, pourtant ce sont elles qui maitriseront le mieux l’exercice.
A croire qu’elles s’étaient préparées et que les conseils ont été judicieux.
Une méthode bien appliquée
Les trois premières tireuses parisiennes partent de côté et font un plat du pied fort qui monte directement en lucarne. En réalisant ce tir avec cet angle, elles empêchent une intervention de la gardienne et s’offre l’angle le plus ouvert pour cadrer.
Les trois tirs entrent.
Ce qui en sera pas le cas d’Arsenal. Chiamaka Nnadozie sort à droite celui de Maanum ! Le Paris Fc a le coup d’avance mais comme souvent, la tireuse parisienne suivante, Corboz, tente autre chose et l’arrêt ramène les deux équipes à égalité. !
S’élance Alessia Russo. On voit mal comment la star anglaise peut rater son tir au but après son doublé dans la rencontre. Elle tente le même côté que Corboz et de sa partenaire Maanum. L’excellente Chiamaka Nnadozie, dans le trio des meilleures gardiennes de la D1F Arkema, va le chercher d’un swing libérateur, pour faire deux arrêts consécutifs ! Superbe performance.
La quatrième tireuse est la jeune Ribadeira. En ayant raté ses deux tirs au but, il suffit de celui de Ribadeira pour qu’Arsenal sorte et le Paris FC se qualifie.
Elle va tenter mieux qu’une Panenka. La voilà qui part et prend si bien Zinsberger à contre-pied qu’elle tombe sur ses fesses, regardant la balle se glisser inexorablement à gauche quand elle partait à droite.
Une Ribadeira culottée et réussie.
Un match de référence
Le Paris FC est qualifié mais surtout sort Arsenal en se créant une émotion incroyable. Un match historique et de référence pour ses joueuses qui en parleront longtemps ensemble.
Gaétane Thiney est en larmes de joie sur le terrain. C’est rare. Elle mesure l’incroyable, le retournement, le bleu du ciel face au rouge de l’enfer. Elle se dit que ce sont les autres qui l’ont fait, ses coéquipières quand elle, a tout donné. Le témoin se passe. C’est un bonheur rare et unique.
Une histoire individuelle comme collective. L’Allemagne s’efface, s’oublie.
La joueuse aux 37 ans, avec l’avantage de vivre un bonheur réel à partager.
Respect à cette équipe qui a écrit une très belle histoire de football.
William Commegrain Lesfeminines.fr