Vous me direz … Oui, mais ce n’est qu’une mi-temps ! Vous me direz, … oui mais ce n’est que l’Italie ! Vous me direz, .. oui mais les italiennes ont gagné la seconde mi-temps ! Vous me direz tant de choses pour refroidir le plat plein d’émotions que les Bleues de Corinne Diacre nous ont servi face à l’Italie, après un (5-0) qui aurait pu sans souci, se transformer en (8-0) si tout était entré !

Les Bleues de Corinne Diacre ont été hors du temps ! Il n’y a pas plus juste et plus vrai comme titre. Corinne Diacre, au micro de l’UEFA : « La première chose à retenir, c’est la victoire. Une première mi-temps quasi parfaite, une deuxième période moins aboutie par la force des choses. Après la première mi-temps qu’elles ont fait, c’était difficile. »

D’abord les Bleues de Corinne Diacre car c’est bien sa configuration tactique et ses choix qui ont permis ce premier résultat. Même si du côté des fans lyonnais, dire les « Bleues de Corinne Diacre » a quelque chose qui fait, tousser l’interviewé.

Delphine Cascarino à gauche, buteuse d’un superbe tir croisé à la (38′), Aissatou Tounkara de l’Atletico Madrid, milieu de tableau espagnol au lieu et place de Griedge M’Bock sous les couleurs lyonnaises depuis sept saisons, habituelle titulaire avec Wendie Renard, sans compter la mise en orbite de Pauline Peyraud Magnin, seconde derrière Sarah Bouhaddi après la Coupe du Monde et qui nous sauve la baraque à la 3′ sur un but quasiment fait de Bonansea.

Des trucs qui touchent les fans lyonnais. Mais à tort. Si tu bouges l’Equipe de France construites dans le passé, tu es obligé de bouger des lyonnaises. Elles formaient l’essentiel des Bleues de l’époque.

Pauline Peyraud Magnin envoie un message à ses coéquipières

La gardienne française fait un sauvetage qu’elle transforme en identité gagnante aux dix joueuses françaises sur le terrain, déjà dans l’idée de mettre la balle au centre, avec un score à rattraper… dès la 3′ !

Pauline Peyraud Magnin, gardienne de la Juventus, pendant le match (UEFA)

C’est dingue ce qu’une performance individuelle sur le moment peut galvaniser un groupe et le rendre indestructible, soudées au fait qui vient de les sauver, donnant aux mots lâchés dans l’intimité d’un vestiaire, la force de la vérité : « ce match est pour nous ! ».

Marie-Antoinette Katoto le dira au micro de l’UEFA : « On a bien démarré, on a fait une belle première mi-temps. Pauline nous a bien sauvées et nous avons été très efficaces ». 

Et c’est dingue de voir à quel point, quand l’inattendu chamboule l’attendu, cela peut fragiliser l’équipe qui se force à jouer en pensant « tutti va bene », chacune à sa manière, mais encore sous le joug de l’émotion ratée.

Cinq minutes plus tard, un dégagement de « merda » de la capitaine Sara Gama pour le pied de Grace Geyoro. Et la France prend les devants (9′, 1-0). « Tre minuti dopo », Laura Giuliani dans un plongeon totalement inutile donne une balle de « foot à cinq » pour la parisienne Marie-Antoinette Katoto (12′, 2-0) ; et à la « finale », l’Italie sent que l’esprit sain est du côté des Bleues alors qu’elles, sont les deux pieds dans « la merdum ».

Pour les gars, la World Cup de décembre 2022 se jouera à la Rai, la Ligue des Nations devient le tombeau des espoirs renaissants. Et les filles, prennent la même tangente.

L’Italie, joue sans tête.

(2-0), rien n’est fait mais tout est mal parti du côté de l’Italie, s’entêtant à jouer des jeux longs plats du pied qui font le bonheur d’une Sakina Karchoui, mobylette de l’intention, devenue sur cette rencontre, une 500 cm2, au démarrage. Rendant son adversaire, hypnotisée et immobile, et la passeuse « stupida » à l’excès.

Tout la première mi-temps sera dans cet état d’esprit italien. Le pape, François, passionné de football, devant sa TV italienne, cherche une sainte qui aurait fait un séjour en Angleterre, chez ses cousins anglicans. Faute de trouver, il envoie un sms au Prince William, pour lui demander « un poco » coup de mains. Le temps de trouver et le record français tombe. (5-0) en 45′.

L’excellente Piemonte, tout juste entrée, réduisant le score à la 78′, d’une tête bien touchée, entre Wendie Renard et Sakina Karchaoui.

La France a cabossé la tête italienne.

L’intention et la volonté des Bleues ont été telles qu’elles ont mis la barre au niveau d’un record du monde mental.

Une image me revient en mémoire. Dégagement italien aux six mètres. Comme d’habitude maintenant, chaque défenseure centrale est à gauche et à droite de la gardienne. Pour remonter cette balle comme des princesses devant l’histoire de Cendrillon. Tout va bien, le bal se termine et le Prince charmant ou Princesse charmante « venga » pour le mariage. C’est à dire, on repart « balle aux pieds », comme dans les belles histoires.

Sauf qu’il y a trois françaises, en face. Visiblement, pas dans le style promenade !

Pile poil, les pieds posés sur la ligne de réparation qu’elles n’ont pas le droit de franchir. Mais les muscles tendus comme jamais pour bondir sur cette balle qui va bouger. Comme des fauves sur une proie. En en plus, pas des lentes ! Kadidiatou Diani à droite, Marie-Antoinette Katoto au centre et Delphine Cascarino à gauche. Et là, pour nous, à l’écran, les trois italiennes dans la surface, sans qu’elles se soient consultées, pour les françaises, sont visuellement des proies.

Les trois au même moment pensent et veulent la même chose. Intensément, et avec confiance. Cela en France, c’est impossible. Trois personnes d’accord pour la même chose, qui vont le faire et avec la même envie de le faire ! Chez nous, c’est très rare. Normalement, chaque français pense qu’il a raison et que l’autre a tort !

Une telle envie et force française, les joueuses italiennes le sentent. Gama ne veut pas ce ballon. Linari non plus.

Qui s’est déjà trouvé dans une situation « merdum » sur un terrain, sait à quel point notre corps envoie à l’autre ce message « para-verbal » : « démerde-toi ! » « Capito ! ».

La gardienne italienne « capito très bien ! ». Elle la joue à l’ancienne. Grand dégagement lointain. La balle dans les pieds des Bleues, mais au moins à quarante mètres des buts. Gama et Linari sortent heureuses des cinq mètres cinquante, puis de la surface, prêtes à embrasser l’intelligence émotive de leur gardienne !

Une image comme cela, entre une nation 3e mondial et une autre 14e, jamais tu ne la vois dans le football féminin moderne.

C’est que le coup des françaises avaient tapé très fort sur le mental italien.

Une mi-temps ne fait pas un match ni une compétition.

Quand l’arbitre anglaise Rebecca Welsh siffle la mi-temps, Grace Geyoro, vient d’en mettre trois pour sa 50e sélection, ayant fêté son anniversaire (2 juillet) le lendemain d’un France -Vietnam du début du mois. Le jeu, elle, ses partenaires lui ont fait un beau cadeau d’anniversaire !

Grace Geyoro, auteure d’un triplé face à l’Italie. Elue meilleure joueuse du match (crédit UEFA).

Delphine Cascarino en a mis un dans la position pied inversé que tout le monde reproche à Diacre. Obligeant à une course latérale pour s’axer dans le but et envoyer une mine là ou tu peux, mais souvent côté opposé, obligeant la gardienne à une superbe horizontale que toutes les gardiennes ne peuvent produire, dans le temps des centièmes de seconde que demande le football féminin moderne.

Wendie Renard a réussi des transversales proches d’un jeu « FIFA » qui ont transpercé la défense italienne ; encore plus quand tu as pu voir la qualité du contrôle des « ailières » françaises. Delphine Cascarino se l’est même passé devant avec une aile de pigeon réalisé en mouvement ! Kadidiatou Diani a réussi des contrôles intérieurs qu’un basketteur ne ferait pas à la main. Si Charlotte Bilbault réussissait ses tirs au but comme ses transversales d’hier soir, on fait quinze zéro à la fin du match !

Eve Perisset, latérale a tout vu de derrière. C’est clair et limpide : « On a fait une très belle première mi-temps. On avait l’objectif de marquer dans le premier quart d’heure. Je pense qu’on aurait pu faire mieux en seconde période mais on en a fait un très bon match. »

Marie-Antoinette Katoto a commencé le football en poussant la balle devant et en marquant face à ses adversaires U19. Cela a donné un titre de Championne d’Europe très jeune. En U20, la répétition lui a couté sa place et sa sélection au Mondial 2019. Trop tôt.

Aujourd’hui, Marie-Antoinette Katoto joue comme Benzema.

Elle décroche, passe pour des buts de co-équipières, va à droite, à gauche, récupère, bouscule et marque dans la surface. Elle a tout le bagage d’un joueur professionnel. Un jour, elle sera la meilleure du monde, non pas décidé par les français, mais élue par le monde entier.

Sandie Toletti et Grace Geyoro ont un moteur de trottinette dans les jambes. Pas celui limité à 25 kms/heure, celui qui est transformé. Sur cette rencontre, elles ont été infatigables, mais surtout présentes à la récupération, à la passe et dans la surface. Au jeu des statistiques, quand le graphique représente les courses et placements des joueuses, à elles deux, elles t’ont crayonné tout le camp adverse !

Grace Geyoro : « J’ai fait le maximum pour revenir pour ce premier match, j’avais à cœur de le jouer et je suis assez satisfaite. »

La défense a été impeccable. Aissatou Tounkara a toujours le pied qu’il faut pour couper la passe. Et quand ce n’est pas le pied, elle prend peine face, la balle adverse. Wendie Renard a été bonne en se faisant prendre des balles de la tête. Eve Perisset a joué du tacle dévastateur avec 1m60 au compteur. Et Sakina Karchaoui, quand elle est en Angleterre, fait du Lewis Hamilton.

Imaginez le plaisir de jouer ces 45′

Cela a été une mi-temps superbe à voir mais quel régal à la jouer !

Cela ne donnera pas un titre, cela a donné trois points.

Bonheur de l’Equipe de France devant un tel résultat (crédit UEFA).

Mais je pense que les vingt trois joueuses ont dû se lever ce matin, avec une « banane d’enfer ! »

Faire une compétition et se faire autant plaisir sur un match, cela doit rester longtemps dans les mémoires. Merci pour nous l’avoir partagé.

Du côté italien, tu dois te dire que la vérité est dans le classement FIFA. Elles n’avaient pas les armes pour s’opposer aux intentions françaises quand elles sont à ce niveau d’intentions. C’est comme cela. Elles doivent regarder la seconde place avec la Belgique et l’Islande.

La France doit se dire que le vrai challenge, serait de reproduire la même intention même si l’Histoire s’écrira autrement.

Parce que, deux fois à ce niveau de collectif ; là, la France peut commencer à gérer et à penser, à conserver et développer des certitudes pour, de matches en matches, remettre sur le terrain, de nouvelles vérités qui s’imposent à tous et toutes. A elles, aux adversaires, au public et aux médias.

On verra. En attendant, elles ont fait un superbe truc ce dimanche soir.

William Commegrain Lesféminines.fr

UEFA Women’s EURO 2022 – Angleterre – Groupe D – Première journée
Dimanche 10 juillet 2022 – 20h00 locales (21h00 françaises)
FRANCE – ITALIE : 5-1 (5-0)
Rotherham (New York Stadium) – 8 541 spectateurs
Temps chaud (26°C) – Terrain excellent
Arbitres : Rebecca Welsh (Angleterre) assistée de Sian Massey-Ellis (Angleterre) et Lisa Rashid (Angleterre). 4e arbitre : Lorraine Watson (Écosse). Arbitres VAR : Christopher Kavanagh (Angleterre) assisté de Tiago Bruno Lopes Martins (Portugal)

Buts
1-0 Grace GEYORO 9′ (Bon travail de Périsset qui remonte côté droit joue pour Diani qui élimine Boattin à la limite de la surface avant de centrer dans les 5,5m. Gama renvoie du gauche dans l’axe sur Geyoro qui reprend du plat du pied droit à 8 m)
2-0 Marie-Antoinette KATOTO 12′ (Longue ouverture de Renard pour Karchaoui qui déborde à gauche et délivre un centre que Gama dévie et sa gardienne surprise repousse devant son but où Katoto a le temps de contrôler à 6 m et placer du droit le ballon sur la gauche de la gardienne)
3-0 Delphine CASCARINO 38′ (Karchaoui sur la gauche joue pour Cascarino juste à l’extérieur près de l’angle de la surface qui revient vers l’axe et place une frappe croisée du cou du pied droit dans le petit filet opposé)
4-0 Grace GEYORO 40′ (Périsset allonge le jeu pour trouver Katoto à 40 m dans l’axe dos au but qui dévie pour Geyoro qui part dans le dos de la défense, en pleine course, entre côté droit de la surface, élimine Giuliani à 10 m du but avant de redresser le ballon pour marquer du plat du pied droit dans le but vide)
5-0 Grace GEYORO 45′ (Geyoro récupère le ballon à 30 m sert Toletti à gauche de la surface qui lui remet en retrait près du point de penalty pour une reprise en ouvrant son pied droit)
5-1 Martina PIEMONTE 76′ (Bonansea décale pour Boattin à gauche qui délivre un centre au second poteau pour la reprise de la tête de Piemonte qui devance Karchaoui aux 5,5m)

Avertissements : Lisa Boattin 16′, Flaminia Simonetti 52′, Sara Gama 66′ pour l’Italie

France
21-Pauline Peyraud-Magnin ; 22-Eve Périsset, 5-Aïssatou Tounkara, 3-Wendie Renard, 7-Sakina Karchaoui (17-Sandy Baltimore 87′) ; 8-Grace Geyoro (15-Kenza Dali 67′), 14-Charlotte Bilbault, 6-Sandie Toletti ; 11-Kadidiatou Diani (13-Selma Bacha 78′), 9-Marie-Antoinette Katoto (18-Ouleymata Sarr 77′), 20-Delphine Cascarino (12-Melvine Malard 67′). Entr.: Corinne Diacre
Non utilisées : 1-Mylène Chavas (G), 16-Justine Lerond (G), 2-Ella Palis, 4-Marion Torrent, 10-Clara Matéo, 19-Griedge Mbock Bathy, 23-Hawa Cissoko

Italie
1-Laura Giuliani ; 13-Elisa Bartoli, 3-Sara Gama (cap.) 5-Elena Linari, 17-Lisa Boattin ; 4-Aurora Galli (8-Martina Rosucci 46′), 6-Manuela Giugliano (7-Flaminia Simonetti 46′), 18-Arianna Caruso (20-Martina Piemonte 74′) ; 2-Valentina Bergamaschi, 10-Cristiana Girelli (19-Valentina Giacinti 58′), 11-Barbara Bonansea (16-Lucia Di Guglielmo 81′). Entr.: Milena Bertolini
Non utilisées : 12-Katja Schroffenegger (G), 22-Francesca Durante (G), 9-Daniela Sabatino, 14-Agnese Bonfantini, 15-Maria Luisa Filangeri, 23-Martina Lenzini