Selma Bacha, vingt ans, possède au cœur, la force et l’insouciance de ses vingt printemps. 1m61 sous la toise, petite en dehors des terrains de football, dans la moyenne des latérales françaises, elle promène ses intentions avec une force incroyable, dévorant toutes les minutes que Sonia Bompastor lui laisse.
Placée latérale, pied gauche, la voilà qui dessine des allers-retours dans son couloir, à la manière des peintres contemporains. Loin des codes habituels, jouant de son talent à l’instinct, elle n’écoute qu’une seule consigne : ne pas laisser passer son adversaire. Pour le reste, émotions, puissance, détermination, insouciance prennent le pouvoir et la voilà, explosant d’envies sur un terrain de football. Une telle explosion qu’elle ne peut entendre les sifflets et exclamations des plus réfractaires au football féminin. Admiratifs de cette « sœur » à qui ils accordent, le suprême honneur d’être comme eux. Des garçons légitimant une fille.
La jeune, future Bleue, n’en a cure. Elle ignore, sans états d’âme féministe. Elle joue comme elle est.
D’elle, vous ne verrez que deux visages. L’un, triste quand elle perd. L’autre, éclatant de lumière quand elle gagne.
Elle croque dans l’avenir. Elle a vingt ans.
En marquant le dernier but des six que l’Olympique Lyonnais a passé à Saint-Etienne, son bonheur n’est pas celui de l’exploit à faire passer symboliquement l’OL, premier du championnat. Il n’est pas plus d’affirmer à Levante, que son récent (4-0) imposé au Réal de Madrid féminin, aura un sens au match retour prochain (8 Septembre) de la Coupe d’Europe à Lyon. Son bonheur est l’expression humaine de réussir sur le moment, un geste surprenant qui se termine en éclatant le but adverse.
Ne vous trompez pas, il peut y avoir de la violence dans cette jeune fille. On ne fait pas trois années à l’OL, multiple championnes d’Europe et de France, sans avoir, cette envie de faire mal à l’adversaire.
Sonia Bompastor, sa coach, arrière gauche de talent, reconnue au niveau mondial par ses adversaires, s’abreuvait de cette sensation physique, d’aller au bout de soi. Le Nirvana du sport qui donne une puissance jouissive unique. La rencontre entre la volonté de l’esprit et les possibilités physiques.
Chaque émotion exprimée par sa latérale devient un souvenir qui se rappelle à sa mémoire. Elle sait. Dix années sont passées depuis. Calme, debout devant son banc, elle apprend ce métier.
Quel lien créer entre sa jeune latérale bouillonnante et son expérimentée défenseur centrale, Wendie Renard, joueuse réfléchie utilisant sa tête et son esprit, trentenaire ?
Dans cette comparaison, se trouve toute la difficulté et la différence entre l’OL du passé et celui de l’avenir. La coach examine ses cartes, les comparent à celles des années proches, et constatent nombre de nouveautés, formées d’inconnues, sans réels pedigrees internationaux.
On le sent, Sonia est passée de l’autre côté. Sereine, prête à comptabiliser les réussites comme les échecs. Le pragmatisme est la règle dans ce métier.
A elle, le choix,
A elles, de prouver leur niveau.
L’Olympique Lyonnais rugit encore et toujours. Un cri venu de la jeunesse.
Un espace de liberté dans lequel les jeunes s’engouffrent. Saint-Etienne, adversaire de ce dimanche, se rend disponible pour le raconter.
Catarina Macario (USA, 20 ans) perce une défense motivée mais limitée (1-0, 18′). Melvine Malard (FRA, 21 ans) reçoit la passe décisive d’Amel Majri pour un troisième but lyonnais (3-0, 41′). La réponse du berger à la bergère, la réunionnaise avait servie l’expérimentée lyonnaise, treize minutes auparavant (Majri, 2-0, 28′). Emelyne Laurent, 22 ans, (FRA) marquera le quatrième but lyonnais (4-0, 54′). Trois minutes plus tard, Damaris Egurrola (21 ans, ESP), portera le score à (5-0, 57′) er Selma Bacha (20 ans, FRA), le terminera d’une frappe en lucarne opposée.
Cinq buts sur six réalisés par des jeunes de moins de vingt deux ans. Au bilan que tout article se doit de proposer, une phrase s’impose.
L’OL jouera cette saison, une partie avec son passé, l’autre, sera fait de son avenir.
Levante (Esp) a l’espoir, mercredi 8 septembre, de faire balancer les lyonnaises du mauvais côté. Ceint de la nouvelle règle supprimant l’avantage des buts à l’extérieur, munies d’une calculette, les joueuses espagnoles espèrent (0-1) pour compenser le (1-2) infligé par l’OL. Sans prolongation dans cette épreuve européenne, les débats se termineront aux tirs au but.
La jeunesse lyonnaise a bien d’autres intentions.
Aux Etats-Unis pour six mois, Eugénie Le Sommer (31 ans), Sarah Bouhaddi (35 ans), Dzsenifer Marozsan (29 ans), ne manqueront pas de regarder leurs cadettes.
Histoire de les juger, de les évaluer. Le match est européen, marque de fabrique perdue la saison dernière par l’OL. Une fois, mais pas deux.
Les jeunes le savent.
William Commegrain Lesfeminines.fr