Il fait un temps d’été en ce vendredi 3 septembre 2021. Les parisiens revenus de vacances ont la tête à l’huile solaire qui a embaumé leurs corps de cette odeur surannée qui accompagne les moments rêvés d’été. Soudain la ville parisienne comme sa banlieue semble être un havre de paix et de campagne comme sait l’offrir Paris à ses habitués, à l’ombre rafraichissante d’un arbre, d’un banc que le capitale offre gracieusement, à qui sait s’arrêter pour rêver.
Rêver, le Paris Saint Germain l’a inscrit au fronton de son idéal. Rajoutant, dans l’esprit qui anime les esprits « gagnants » de la capitale, les mots bibliques de « + grand ». Un mot qui correspond au moteur de ces mégalopoles, toutes issues de la même veine. Plus haut, plus vite, plus fort. Il y a quelque chose d’Olympique dans ces constructions humaines.
Les féminines du Paris Saint Germain ont, la saison dernière, atteint le nirvana de leur petit sport. Dans trente ans, elles regarderont leur titre de championne de France, les yeux humidifiés par les souvenirs, les regards, les surprises revenus en mémoire. Petit monde, inséré dans un plus grand qu’elles rêvent d’atteindre, celui des hommes. Plus de spectateurs, plus de reconnaissance, plus d’argent.
2021 ne sera jamais une saison comme une autre. Elle est l’année où elles ont pris le titre de championne de France à l’Olympique Lyonnais. Un titre que les lyonnaises monopolisaient depuis quatorze saisons, installées dans un havre, un sanctuaire, une église, un ministère organisé sous la Présidence d’un Jean-Michel Aulas, au plus haut d’une trajectoire dictatoriale. Le Vladimir Poutine du football féminin mondial, aimé, craint, idéalisé, excellent, promettant à Lyon, le gain de la future finale du championnat du monde des clubs, comme apothéose d’un sacre napoléonien sur le Monde du football féminin.
Paris, intrus d’une saison, cherche à proposer autre chose que du rêve.
Est-ce cela qui a animé Ulrich Ramé, nouveau directeur sportif de la section féminine, pragmatique parmi les pragmatiques en recrutant Didier Ollé Nicolle dont la physionomie aux sourcils broussailleux nous propose de l’imaginer, cartésien, sachant compter ses armes, proche de la réalité des fruits qu’offrent la nature. Inutile d’imaginer des poires avec un pommier. Il ne donnera que des pommes. A charge pour lui, de créer les meilleures, les plus surprenantes, les plus originales pommes de ses champs.
L’homme a regardé son environnement et a décidé de travailler le jeu en mouvement.
Un jeu que les féminines ne pratiquent quasiment pas. Issues de la verticalité, cherchant à mettre le plus rapidement possible la balle dans la surface adverse, s’amusant à passer son adversaire balle au pied ; elles ont eu du mal à absorber, le jeu tranquille des passes latérales. Posées, donner, recevoir. Attendre, centrer. Revenir. Une approche quasiment militaire du jeu, ordonné, sécurisant. Ennuyeux et ennuyant. Sans talent, autre que celles ayant dans les cuisses, la puissance du démarrage laissant à son adversaire, un regard sur la courbe de ses reins, dans un monde où les regards des joueuses ne sont pas insensibles aux courbes des autres joueuses.
Dans l’animation que le coach demande aux parisiennes, il y a du jeu de séduction. De l’arabesque. Des mouvements à gauche où Sabrina Karchaoui devrait perforer quand la joueuse parisienne revient sur elle. Laissant son adversaire faire le pas de tango qui l’envoie dans le vent, crispée à l’idée que la parisienne utilise l’espace qui s’ouvre, à l’opposé. Refusée par la joueuse, comme quand une fille refuse l’évidence, sachant qu’elle a partie gagnée, quand elle y reviendra plus tard.
Un football d’entrechats correspondant bien aux qualités d’une Grace Geyoro dont on ne sait où elle va se trouver sur le terrain. Faisant tomber le mot « dézoner » au passéisme d’un ancien Bescherelle ; elle joue simplement. Accompagnée dans ces mouvements par une Sarah Däbritz, gauchère, au pied magique pour jouer de passes courtes dans des trous de souris, semblant emportée par ce mouvement de quatuors du football, pour libérer dans un tir si puissant, toute son énergie, laissant les filets en trembler encore.
Un jeu ambitieux, difficile, compliqué qui ne dure pas les quatre vingt dix minutes d’une rencontre.
Montpellier le sait. Montpellier le comprend. Cette stratégie nouvelle dans le football féminin est une stratégie d’école dans celui masculin. Yannick Chandioux, sort ses vieux livres d’école et sourit aux schémas tactiques des formateurs proposant des solutions à ce football champagne. Attendre et patienter pour exister au pire dans le milieu de la seconde mi-temps ou au mieux, dans le courant du premier acte.
Les joueuses le savent aussi. Ces mouvements de maestro ne peuvent durer éternellement. Le talent a cela de talentueux, qu’il est fugace. Capturer le talent est déjà affaire très sérieuse. Le conserver quatre-vingt dix minutes relève de la gageure.
Dans cette opposition, les parisiennes joueront une partition d’orchestre symphonique. Vingt minutes où les montpelliéraines ont été le décor d’une rencontre sportive. Paris piquant à droite comme à gauche, au centre, devant, derrière. Paris jouant son solo, avec un résultat positif. Un pénalty à la 8′ de Sara Däbritz.
(0-1) à l’extérieur. Yannick Chandioux se lèche les babines. La tempête a soufflé mais les dégâts restent raisonnables. Montpellier se rebelle, Montpellier bloque Paris. Montpellier réclame un but. Montpellier revendique le but.
Didier Ollé Nicolle ne bouge pas. Il sait que c’est maintenant que se joue sa saison. Non pas dans le (5-0) infligé à Fleury de dimanche dernier. Sa saison se construit Now. Son équipe est-elle capable de ne prendre aucun but quand l’orage souffle contre elle ? Plus qu’un orage, la tempête car, ce serait mal connaître le Sud de la France, quand Paris sonne à sa porte … Paris mérite une tempête et Montpellier ne manquera pas à l’adage.
Sous la douche, quand tout est terminé, les sourires sont pour les deux camps.
La frustration montpelliéraine d’avoir touché l’épaule parisienne. Coude à coude. Au même niveau, signe d’une saison positive mettant au fin fond des souvenirs, ce concubinage de la saison dernière. Entre sensation positives et concessions excessives. Le regard franc et positif, ouvert à l’avenir, les montpelliéraines savent qu’elles ont des armes.
Paris prend l’avion, contente. Contentes d’oublier déjà ce match. Prêtes à absorber le prochain. La confiance attachée à chacun de ses pas. Aucun but d’encaissé dans un championnat où, maintenant, les places se détachent à la qualité défensive. Elles marchent sur l’eau. Ne cherchez pas à les raisonner, la parisienne, quand elle est comme cela, se sent comme une Reine.
Restées dans la capitale, l’autre Paris, comme ce Paris que la Seine sépare en deux univers, le Paris FC s’est crée la même histoire. Née Rock & Roll, les féminines de Juvisy s’habillent en Prada. C’est dans le détail qu’elles marchent pour que vos yeux brillent d’éclats. Anonymes dans la vie, elles s’animent sur le terrain vert. Simples et populaires, elles ont au fond d’elles, la force des parisiennes.
Regardées, elles ouvrent le Paradis aux fans et proposent l’Enfer aux adversaires.
William Commegrain Lesfeminines.fr
- Montpellier (0-1) Paris Saint Germain
- Fleury FC 91 (0-1) Paris FC