Il s’est passé quelque chose d’unique, quelques minutes avant le début de ce match d’ouverture. Un truc qui restera collée au coeur du souvenir pour chacune des Bleues. Il y a le mariage. Il y a la naissance. Il y a le coup de foudre. Il y a le départ d’un être cher. Il y a l’émotion.
Toutes les joueuses dans cette zone mixte ont les yeux qui brillent. Les Coréennes ont le regard baissé. La tête lourde. Elles auraient être heureuses devant le Monde entier. Elles sont passées à la trappe de la désolation. Du rien ou du peu. Du vraiment peu. Elles devaient espérer. Rien n’est venu. Le froid à l’opposé de la chaleur des françaises.
Une chaleur qu’elles garderont en mémoire toutes leurs vies. Didier Deschamps a dit à ses joueurs : « en gagnant la Coupe du Monde, vous ne serait plus jamais les mêmes. » nous faisant comprendre qu’ils seraient tous dans une nouvelle famille. La leur.
Pour les féminines, il est évident que les onze joueuses alignées face à la France suprême, face à leurs familles, face à leurs rêves ne seront plus jamais les mêmes. Elles le disent, elles l’ont toutes senties. Ressenties.
Gaetane Thiney qui ferme les yeux pour ne pas voir le bonheur devant elle. « La Marseillaise, c’était comme prévu extraordinaire d’émotions. Un bonheur à vivre. Vraiment un bonheur à vivre. » Marion Torrent, qui a un hoquet de larmes, « J’ai vu mon père, les larmes me sont venues ». Il a fallu qu’elle se batte pour les refouler. Elle renversait le Parc des princes tellement c’était dur de se reprendre.
Sarah Bouhaddi, une bonze du football féminin. D’un calme impérial, dans les hauts comme dans les bas. Le ton vibre quand elle répond à la question. « Au moment de la marseillaise, il y a eu pas mal d’émotions. De larmes. C’est un moment unique que l’on va vivre une seule fois. » Amel Majri, prête au combat quand elle a entendu « Aux Armes ! ». Le coeur à 180 pulsations. Les Larmes qui montent pour cette enfant de Tunisie qui là, porte le Bleu de son coeur, venue de loin dans les cours de cités, mais tellement heureuse d’un rien qui aujourd’hui, est devant elle. Immense. La République, la France, le Parc.
Même Wendie Renard, qui s’échappe dans la conférence de presse studieuse et internationale. Regrettant de s’être livrée. Du bord des lèvres, mais tellement vrai. « Papa ». Son père parti, qui à chaque match, chantait haut et fort la Marseillaise, là-bas, en Martinique.
Et Corinne Diacre, une statue de détermination qui envoie à son coeur l’ordre de rester bien au chaud dans son coffre-fort. « Je me suis refusée toute émotion ce soir. L’émotion sera pour plus tard. Nous sommes dans la compétition. Je me suis préparée comme une joueuse. Pour moi, il n’y a pas d’émotion, il n’y en aura pas mais j’espère qu’il y en aura le plus tard possible. »
Elles étaient onze. Un courant d’émotions les a liées à jamais. Fort, très fort. Un courant qui est venu chercher le banc. Ce banc qui reçoit, sans agir. Si près pourtant. Puis, plus loin, l’oeil est allé chercher les êtres aimés. Les êtres qui, si près, ont tant donné, et qui sont là, tant à espérer. A souhaiter. Du bord des lèvres. Pour aimer, comme avant, aussi fort mais encore plus fort.
Un courant d’amour et d’émotions. Le carburant de l’émotion, à plus de mille euros du litre tellement il est rare et unique.
Les 23, dans quarante ans, en parleront encore. Un lien s’est fait entre elles. Un lien unique.
C’est la différence avec le football masculin. Eux ont l’habitude, les filles le découvrent. Les filles ont crée leur monde, alignées devant le Monde, en chantant la MArseillaise, qui leur a dit : « AUX ARMES ! », repris par 45.261 spectateurs.
Un chant guerrier qu’elles ont entendu comme un chant d’amour. Il leur donnera pendant longtemps les larmes aux yeux. Elles sont certainement Une, et pour longtemps.
William Commegrain Lesfeminines.fr