Prix Puskas 2015. Il faudra bien un jour que cela arrive quand même !
Il y en a un peu assez de la commisération diplomatique que l’on octroie à tous les gestes féminins dans le sport féminin, au motif d’un côté, d’une bonne et belle parole pour certains, n’en pensant pas moins se cachant derrière le fait que la pensée est muette ; alors que de l’autre, c’est une manifestation de mots qui colorent chaque geste féminin d’une revendication féministe qui ne lui donne que les votes les plus extrémistes, faisant d’une réalité un sentiment qui perd la consonance de la vérité pour tant d’autres.
Oui, il faudra bien un jour que cela arrive ! Quand même !
Une reconnaissance du geste féminin parce qu’il est tout simplement le meilleur. Le plus beau. Le plus inattendu. Le plus performant dans une finale de Coupe du Monde, quand tout se décide et que souvent personne ne décide. Sans autre considération que le sentiment profond d’une justice, d’une vérité. Ni plus ni moins. Que ce serait bon d’arriver à cette sensation de la justice des Hommes, de la vérité de l’instant, si difficile à obtenir dans le milieu sportif, terre d’origine de l’expression masculine.
Il y en a de plus beau dans cette liste. Mais à un tel niveau de compétition, non.
Le but de Carli Lloyd en finale de la Coupe du Monde, tiré du milieu de terrain se doit d’être le plus beau but de cette année 2015.
Il en a beaucoup d’atouts. Le premier, il est surprenant. Inattendu. C’est un but qui démontre à quel point cette joueuse de 33 ans a fait un geste d’artiste. Rien ne la prédispose à cela. Le Japon vient d’encaisser trois buts en l’espace de 14 minutes. Elle en a marqué deux (3′, 5′). Le match est plié. Lauren Holiday en a mis un troisième (14′). Les américaines sont déchainées. Cette finale, elles la veulent au-delà de tout. Quatre ans à attendre une revanche. Non pas une vérité qu’elle ont gagné en finale des Jeux Olympiques en 2012. Non, une revanche de 2011. Sportive. Orgueil d’une nation. « One team, One Nation » dit leur slogan.
Alors, Carli, Lloyd, Ballon d’Or 2015, envoie un missile du milieu de terrain. 50 mètres dira la FIFA, la moitié du terrain. Sans raison, juste le jeu. Je vous le dis, 3-0 déjà. La Coupe du Monde est gagnée. Elle envoie un missile d’artiste. Un lob de 50 mètres qui fera tomber la gardienne japonaise avancée. 4-0 en 16′. On est proche du ridicule ! Non, en fait, on est dans la Performance. La très haute performance. Un court instant où « tout se passe au-delà du pensable » dira Jill Ellis, la coach américaine.
Carli Lloyd entre dans l’Histoire. Un triplé en finale de la Coupe du Monde en 16′ (3′, 5′, 16′). Du jamais vu et jamais vu pendant longtemps dans le futur. C’était un 5 juillet, le lendemain de la fête nationale américaine.
Cette joueuse était en orbite sur la Lune. Une extra-terrestre qui revient d’un voyage spatial en se rendant compte que la terre est si petite dans l’Univers qu’une finale de la Coupe du Monde n’est rien dans le Monde qui est Monde.
Ce geste sans complexe, sans limite, à ce moment, devant un stade plein aux couleurs américaines, est une offrande de confiance. Un exemple pour les sportives et les sportifs. Un exemple pour tous. Tenter l’impossible.
« Citius, Altius, Fortius », « Plus haut, plus vite, plus fort » dit la maxime Olympique du Père Henri Martin Didon livrée en 1891 à Arcueil, reprise par le Baron Pierre de Coubertin et portée sur le premier drapeau olympique d’Athènes en 1896. 119 ans plus tard, une équipe, une fille, née du genre humain, donne une vérité au mot « performance » en lui donnant cette couleur d’artiste !
Enfin, Les américaines reviennent d’une « bad » période qu’elles n’avaient jamais connu auparavant. Des défaites. Elle sont là sans être là. Elles ont mis longtemps à se reconstruire. L’œil rivé sur cette compétition. En ayant la chance qu’aucune grande compétition ne vienne à bousculer leur construction. Elles sont revenues, pleines d’elles. De leurs différences. Un an de travail, de vie en commun, de bonheurs partagés. De tout cela, elles en ont fait une force. Quelque chose qui certainement ne se refera jamais.
On est en finale de la Coupe du Monde. Une coupe qui a échappé aux américaines depuis 1999 alors que tout laisse à croire que les titres ont les couleurs des étoiles américaines avec leurs quatre titres olympiques dont 3 de rang. On est au plus haut de ce qui se fait dans le football féminin. On est aux frontières des Etats-Unis, à un souffle de Seattle.
Pourtant, ridiculisées, ce seront les japonaises qui donneront les couleurs de la Performance à ce match. En revenant au score doucement, patiemment, jusqu’à revenir de l’enfer (4-0 en 16′) avec noblesse et orgueil. Pour voir le score s’illuminer sur un 4-2, redonnant le ton « du normal » au voyage intersidéral américain.
Jusqu’à ce que Tobin Heath, la Pirate du dribble, cautérise la blessure américaine d’un cinquième but, faisant de ce dernier but, la plus parfaite des chirurgies réparatrices : elle et Carli Lloyd avait raté leur tir au but en finale face au Japon. C’était en 2011.
Mais maintenant, 2011, c’est oublié. 2015 est bien là.
« One Team, One nation ». Ce but est le plus beau car il dépasse le geste d’une joueuse. Il est un ensemble de valeurs, de patrimoine, d’Histoires. Il est Historique et il est Humain. Et surtout, Il est fait en finale de Coupe du Monde.
Un tel moment, nous l’avons partagé. C’était unique. C’était surprenant. C’était incroyable. C’était « amazing ». C’est américain.
Alors, pour une fois, donnons le titre du plus beau FIFA 2015 au but de Carli Lloyd car c’est tout simplement, le plus beau but de compétition en 2015, exprimé au plus haut niveau.
En football féminin de compétition, ne nous demandez pas mieux. Il n’y aura pas mieux avant longtemps dans une finale de Coupe du Monde.
William Commegrain lesfeminines.fr
La liste de la préselections.