Le réveil est difficile pour un français comme pour un allemand, suiveur du football féminin. Ce n’est pas seulement une montagne à passer ce soir mais bien deux à avoir en tête après la prestation anglaise qui les installe en finale de leur Euro. D’habitude, c’est match après match, mais vous ne me ferez pas croire que les 23 françaises et 23 allemandes qui vont s’opposer en demi-finale ce soir, n’auront pas à l’esprit la montagne anglaise qui les attend, dimanche soir à Wembley, vrombissant de 75.000 spectateurs, 21 heures françaises.

La faute à qui ? La faute à Sarina ! La faute à la confiance des anglaises !

Tu leur mettrais un thermomètre mais le mercure exploserait en deux secondes tellement elles sont brûlantes à l’idée de soulever le titre européen à la maison ! Est-ce qu’il existe un contrôle médical avant qu’elles n’entrent sur le terrain ? Le tensiomètre passe à 22 et elles te regardent avec un grand sourire, plein de complaisance, à l’anglaise.

Et oui, nous avons confiance !

Les buts anglais en deux minutes

En deux minutes, Angleterre 4-0 Suède | Temps forts | EURO féminin | UEFA.com

Pourtant la Suède, pendant vingt minutes, fait bégayer le jeu anglais.

On pourrait même dire qu’elles sont en train de le renverser. Avec un quatuor Asllani, Rolfö, Blackstenius et Jakobsson. Idéalement servie par les deux milieux de terrain récupérateurs, pressant médian haut, que sont Björn et Angeldahl, l’Angleterre est en train d’avaler sa salive !

A la 1′, Sur un jeu à trois, Sofia Jakobsson (Montpellier, Bayern, San Diego) avec son physique longiligne, s’infiltre dans la surface côté gauche et place un droit cadré, ras de terre que Earps sort, à l’expérience. Battue mais en allongeant au plus sa silhouette pour voir la balle bloquée par son pied, plutôt heureux ! L’Histoire est bizarre, car la suédoise, joueuse de San Diego depuis peu, est exactement dans la même position que le but qu’elle a mis à l’Angleterre (1-2) pour leur prendre la 3e place mondiale en 2019. Sauf que l’Histoire ne se répète pas tout le temps.

Dans la continuité, Blackstenius, ex-montpelliéraine, est servie dans la profondeur (8′). Prends de vitesse Bright et Williamson, mais glisse un tir topé que Earps ira chercher sans souci. Ce qui est moins vrai pour la transversale que la même joueuse lui colle, obtenu d’une tête sur un corner ! Et que dire de Lucy Bronze, ballotée à droite avec Rolfö, une flèche continuelle suédoise qui cherchera par deux fois, une tête ou une joueuse sur des centres qui ne trouveront pas preneurs (14′, 22′).

Qu’a-t-il manqué aux suédoises pour marquer ? Simple, pas assez de joueuses dans la surface sur les centres. Pas assez efficace dans les occasions verticalement obtenues, et des têtes anglaises décidées à défendre plus que de raisons dans les trente minutes de la partie. Une image ?

Jakobsson, normalement attaquante à droite, renouvelle à gauche, sur le côté droit de Bronze. L’autre latérale, Rachel Dali, coulée au milieu de la Manche face à l’Espagne, montrant que sur cette demi-finale, elle a bien les pieds sur terre. Empêchant toute pénétration de ce côté de la défense. La suédoise centre fort, en retrait pour un milieu défensif qui entre dans la surface. Qui est là pour sauver la balle d’un tacle affirmée ? La numéro dix Fran Kirby qui a suivi son opposante et lui prend le ballon sous le pied.

Leur coach en parle souvent. Les anglaises ont de la résilience. Elles sont d’accord de subir mais pas plus, et pas trop.

Le vent tourne à partir de la 22′

Déjà le public est toujours aussi chaud pour ses couleurs.

Si les joueuses ont confiance et leur match nous le montrera, le public aussi a confiance ! Il vibre dès que Stanway tente son premier tir et pousse un « oh » de soupir seulement quand la balle est reprise, sui te à une mauvaise passe anglaise. Le public a confiance et les joueuses commencent à dérouler, de l’arrière vers l’avant, sans que le milieu défensif n’arrive à les repousser. La défense suédoise recule et le rêve anglais peut commencer !

Pour la première fois de la partie, Hemp déborde sa vis à vis Ilestedt, joueuse du PSG, placée là, arrière latérale droite. L’anglaise, découverte de la saison 2022, envoie une mine de centre que Ellen White ne peut récupérer. Un exocet qui trouve Lucy Bronze de l’autre côté. Centre sans contrôle de l’ex-lyonnaise et meilleure joueuse UEFA et FIFA 2020 pour Beth Mead, esseulée. Glas, ayant joué sa défense comme un spectateur de tennis, tête à gauche, tête à droite, tellement les ballons sont passés vite.

Contrôle dans le dos de Glas, puis tir en pivot de Beth Mead. (1-0, 34′). 6e but du tournoi pour l’anglaise, record égalé sur tous les Euros.

L’anglaise, meilleure buteuse d’ l’Euro 2022, te fait une beauté de contrôle. Tir en pivot et envoie une mine qui remplit son office ! But (1-0, à la 34′). L’Angleterre vient de faire « ipon » les suédoises.

Sauf qu’au football, tu peux avoir autant d' »ipon » que tu veux dans les 90′ d’un match ! Là, il y en aura quatre. C’est beaucoup … Vérification faite auprès de wikipedia, c’est même la plus importante différence de buts d’une demi-finale sur les treize euros de l’histoire ! Il y a eu des 4-1, même un 4-3 mais des 4-0, jamais.

Les occasions commencent à pleuvoir (39′, 44′) bien que l’honneur suédois est sauf à l’entrée des vestiaires.

(1-0) pour l’Angleterre, un peu contre le jeu. Il y a de quoi espérer du côté suédois et de quoi s’entêter du côté anglais.

L’Angleterre a une potion magique dans les vestiaires !

On va finir par le croire. Elles boivent les mots de leur coach, Sarina Wiegman qui te déverse un flot de motivation comme un rappeur te fait faire le tour de tous les délits condamnés par le Code Pénal !

Lucy Bronze met un second but à la 48′ (2-0). Alessia Russo, tout juste rentrée, aux carrures d’épaules d’une défenseur centrale, te remet un exocet à Laura Hemp, plongeante, pour une balle qui percute la transversale. Nous sommes à la 57′ et le (3-0) semble déjà d’une évidence !

La Suède n’y est plus sans qu’on puisse dire que les deux jours de repos en moins par rapport aux anglaises aient eu un effet sur ce contenu suédois ou si, la confiance anglaise, n’est pas en train de créer une nouvelle énergie, sans impôt et taxe : l’énergie humaine !

la talonnade d’Alessio Russo (3-0, 68′), si forte qu’elle passera entre les jambes de la gardienne Lindahl

La bombe humaine !

« La bombe humaine est dans ta main », chante Téléphone ! « Juste à côté du cœur ! » Et bien tous les humanistes de la planète vont s’agenouiller de bonheur d’avoir vu le mètre 80 et les 70 kilos d’Alessia Russo te faire une talonnade offensive, si fine et si forte qu’elle fera petit pont à la gardienne expérimentée suédoise Lindahl, qui en tombera sur ses fesses (3-0, 68′), de surprise !

Trois joueuses contre elle … ! Elle qui va dans le sens contraire des buts, et boum ! une « back heel » de légende et but pour l’Angleterre, en demi-finale d’un Euro à la maison ! C’est à te demander si, dans le thé anglais, il n’y a pas quelque chose de bizarre !

Dans la foulée, kirby récupère haut un ballon. La joueuse Tom pouce anglaise, mouline à toute vitesse et pleine de confiance, ne cherche pas le duel mais est certaine d’avoir pris la bonne décision. Un lob des familles pour le (4-0). Pourtant, elle avait encore du champ, mais elle est ailleurs. Dans un état d’esprit où le doute ne peut pas exister.

Il y a longtemps que le loup défaitiste n’a rien eu à manger, pour ceux qui connaisse l’histoire. C’est le loup optimiste qui a le ventre bien plein et encore faim !

Fran Kirby et son lob des vingt mètres anglais? Vista, confiance, rusée (4-0, 76′)

Lindahl est fatiguée. Elle a encore ce troisième but, petit pont s’il vous plait. Un but à la Neymar, un peu hypocrite, inattendu, malin, limite méchant. Elle a la balle, la capte mais elle s’échappe ! Elle glisse pour aller dans les filets lui laissant encoe une chance. Encore une chance, qu’elle prend.

Mais la gardienne part en retard, elle ne va aussi vite que l’enjeu le demande. Le quatrième entre (4-0, 76′).

Honnêtement, il reste quatorze minutes et la planète entière qui voit ce match a à l’esprit : « elles vont en prendre un cinquième ! ».

Le vrai commentaire est là. Elles ont réussi à rester à quatre. Sonnées, battues, les voilà rincées à l’eau anglaise d’une ambition nouvelle : le leadership européen du football féminin.

C’est sûr, dans la demi-finale de ce soir entre la France et l’Allemagne, l’Angleterre sera un peu là, quelque part dans la tête de chacun et chacune : joueuse, staff, spectateurs et téléspectateurs.

William Commegrain Lesfeminines.fr

Sarina Wiegman, Angleterre (source UEFA)
Mes joueuses ont montré à de nombreuses reprises leur capacité de résilience. Nous n’avons pas bien commencé le match, ce fut dur. Nous avons finalement trouvé la solution. Les joueuses ont trouvé le moyen de sortir de la pression, je suis incroyablement fière d’elles.

Peter Gerhardsson, Suède
Je ne peux donner d’analyse, je peux livrer mes émotions. C’est dur, évidemment. Les 25 premières minutes, nous avons eu des opportunités, même si l’Angleterre en a eues aussi. Nous avons les meilleures occasions pour ouvrir la marque. Cela aurait donné un autre match. Être menées 2-0 sur un coup de pied arrêté face à un adversaire aussi difficile que l’Angleterre rend les choses difficiles. Puis se retrouver à 3-0 et 4-0 n’a rien arrangé.