Les sportifs avaient la parole

En sport, la parole des sportifs et sportives est rare. Souvenez-vous du poing levé aux Jeux Olympiques de Mexico (1968) pour dénoncer le racisme aux USA. Un seul poing ganté pour les 1er et 3ème du 200 mètres, fléchant le ciel. Une image restée longtemps unique. En 1976, il y avait eu, après les JO de Montréal, Guy Drut, médaillé d’or aux 110 mètres haies, annonçant publiquement qu’il touchait de l’argent pour participer aux meetings d’athlétisme. La radiation avait suivi lui laissant le titre olympique.

Dans ces années 70, les sportifs parlaient. En football très peu. Michel Hidalgo et les joueurs de l’Equipe de France avait refusé de s’exprimer sur le système autoritaire argentin qui recevait la Coupe du Monde (1974). D’un autre côté, ils avaient négocié leur contrat de sponsoring, gommant les bandes d’Adidas sur leurs chaussures, faute d’accord financier les satisfaisant. La question ne s’était pas posée en 1978, le dictateur Franco avait rendu l’âme un peu plus tôt (1975).

Depuis, on avait affaire à des décisions politiques mais rarement individuelles. 

En 1980, les USA avaient boycotté les JO de Moscou suite à l’invasion de l’Afghanistan en 1979. Les pays de l’Est avaient répondu en 1984, ne participant pas à ceux de Los Angeles. La Sud-africaine blanche Zola Budd, coureuse de fond aux pieds nus, n’est pas reconnu en raison du boycott de son pays suite à la discrimination raciale présente au pays du Cap. La bagarre est intense entre les fédérations américaines et britanniques lorsqu’elle est rendue responsable de la chute de Mary Decker aux JO de L.A (1984). Les pays qui faisaient partie de l’URSS, suite à l’effondrement du mur, participent au sein d’une équipe unifiée lors des JO de 1992 à Barcelone.

Les enjeux du sport font taire les sportifs

Dès lors que le sport est devenu totalement professionnel, les enjeux des sportifs étaient de recevoir une rémunération. Un salaire qui ne pouvait venir que des fédérations et sponsors. Une situation qui a fait taire plus d’un sportif et sportive. La loi est devenue celle du silence.

Une évolution dans les années 2020, les sportifs reprennent la parole

La période actuelle donne un pouvoir aux sportifs avec les réseaux sociaux. Ils deviennent moins dépendants de tiers et représentent une force plus ou moins conséquente mais bien présente. On commence à voir des réactions autonomes, montrant la sensibilité de chacun et plus précisément sa position. On peut penser à Amandine Henry, récemment pour la France.

En football, qui n’est pas adepte des remous, éludant la question des décès au travail pour construire les stades de la Coupe du Monde 2022 au Qatar -The Guardian annonçant plus de 6500 immigrés décédés- Megan Rapinoe, plus tôt, a posé la question du racisme dans la vie publique américaine, reprise par les joueuses avec « genou à terre » et le slogan « Black Lives Matter » ; Zidane qui n’est plus à présenter s’est fendu d’un message reprochant au Real Madrid, son manque de reconnaissance ;

Naomie Osaka a communiqué sa détresse face aux questions de la presse, la bousculant à l’excès dans sa confiance, préférant se retirer du Tournoi de Ronald Garros ; et maintenant Kheira Hamraoui, dans le petit monde du football féminin, se lance dans un message osé à l’attention .. de l’équipe de France … 1.152 RT, 11100 likes, 340 messages ce mercredi à 14h07. Un score rare dans le football féminin pour celle qui a gagné ses trois titres en 2021, non sélectionnée par Corinne Diacre.

Quels enseignements ?

Les sportives représentent une force. Aujourd’hui, ils sont à même de déterminer leur chemin. Comme des entreprises, elles voguent de manière de plus en plus indépendantes.

Avec le risque qui va avec. Les entreprises grandissent ; d’autres disparaissent. Il faut avoir de bons conseils et partenaires.

William Commegrain Lesféminines.fr