Il y a des jours où rien ne va. Il y a des jours où tout flambe. 

Le Fc Barcelone menant (0-4) à la 36′ contre le favori de la compétition -pour certaines observatrices- Chelsea, cela vous laisse incrédule devant votre écran, le match étant joué à huis clos en raison de ce satané Covid.

Pour les habitués du football féminin, et il y a toujours des habitués de quelque chose ; il y a un peu du parfum de la Coupe du Monde 2015 entre les USA et le Japon.

En 2011, les américaines s’étaient vues faire prendre un titre en finale alors qu’elles menaient devant les Nadeshiko. Quatre ans plus tard, elles avaient lancé un rouleau compresseur. Quatre buts en seize minutes (3′, 5′, 14′, 16′). La finale s’était terminée sur un (5-2) américain. Historique.

Là, on en était pas loin (1′, 14′, 20′, 36′). Pas loin d’un record européen pour une finale européenne. Le record, dans la nouvelle formule de l’UEFA, débutée en 2009-2010.

Il y a des jours où rien ne va pour Chelsea. Il y a des jours où tout flambe pour Barcelone ! 

Le premier but encaissé par Chelsea a tout d’un but gag qui ferait rire une bande de copains au bord d’une plage. Dans une finale européenne dont vous atteignez pour la première fois la finale, une finale sans l’ogre lyonnais, il a tout pour vous casser « la cabeza ».

D’abord, le coup de chance anglais quand Lieke Martens, auteur d’une finale de « soprano » tellement ses gestes et intentions avaient le goût du talent, envoie un super tir écraser la transversale anglaise, dans un son fracassant, laissant tremblant ce montant qui se refusait aux cuisses bronzées de la néerlandaise.

Le chronomètre n’en était qu’à ses premières trente secondes. Un rien dans l’univers du temps. Enorme, si la frappe s’était terminée dans les filets de Berger.

La balle refusée par le sort monte dans les airs, redescends pour une bagarre de tête entre une barcelonaise et une anglaise, trouve le sol, va s’échapper dans les pieds de l’allemande Leupolz pour aller raconter une autre histoire. Quand ! Quand ! … La meilleure joueuse anglaise de ce long parcours européen, plus petite qu’une souris, une Tom pouce du jeu, attaquante s’infiltre et envoie une mine pour dégager, fusillant sa coéquipière qui, stoïque, renvoie cette balle dans ses propres buts, pleine lucarne ?!!!!

Le chronomètre n’a fait que 30″ de plus et le Fc Barcelona mène (0-1) alors que Fran Kirby n’a rien à faire dans cette surface, que Leupolz se demande si elle a bien fait la bise à sa coéquipière ce matin, ne voyant rien de méchant avec elle et que le sort vient de désigner comme responsable de ce premier but encaissé.

Il fût un temps où ce désastre aurait envoyé les anglaises dans une mine à charbon. Couvertes de honte. Le football féminin a depuis bien évolué. Elles ont maintenant toutes l’habitude des coups du sort. On remet le travail à l’ouvrage. Balle au centre et on repart.

La coréenne Ji suivie comme son ombre par Jennifer Hermoso

Trente minutes plus tard, la coréenne du Sud Ji n’en peut plus de « remettre » cette balle au centre du terrain. Elle est à la limite de l’AVC. Ses poils s’hérissent à l’idée d’entendre le coup de sifflet de l’arbitre Riem Hussein une quatrième fois en trente-six minutes. Elle se dit qu’il en reste encore quatorze avant les vestiaires. Il va falloir tenir.

Peut-être qu’un court instant, elle se demande si les barcelonaises ne sont pas des Coréennes du Nord déguisées. La « cabeza » ne va pas. (0-4) au compteur. Un seul bonheur, le match est à huis clos. Elle n’a pas à sentir le silence glacial de ses supporteurs face aux chants incroyables des fans barcelonais criant « Mès que un club ! »

Le Fc Barcelona, « Mès que un club »

Pendant une mi-temps, quarante-cinq minutes de jeu, le Fc Barcelona a été plus qu’un club de football. Elles ont été extraordinaires, rendant inexistantes les anglaises de Chelsea. Laissant la Reine d’Angleterre dépitée par cette année. Un jeu de torero, de puissance, d’harmonie. Un tango du football qui vous laisse en émoi, les sens en éveil. A voir se confirmer que le football est bien un jeu d’orchestre. Chacun joue d’un instrument, dans un ensemble et une cohésion de rêve.

Aitana Bonmati internationale espagnole, Kheira Hamraoui la française, Alexia Putellas capitaine espagnole se sont si bien coordonnées au milieu de terrain, chacune à sa place, en mouvement avec sa force. A Kheira, la puissance du duel, à Aitana le relais avec la défense, à Alexia le lancement des attaquantes.

Et à elles trois, elles ont bâti la construction d’un toro à gauche comme à droite, obligeant les anglaises, dès qu’elle se présentaient pour s’opposer, à voir la balle s’en aller comme « à chat ». L’Anglaise a couru. Couru. Couru. Sans jamais « recuparu » le moindre ballon.

Les catalanes, en finale européenne, ont joué.

Les larmes en viennent à l’écriture. JOUER, un mot que l’enjeu a le plus souvent enterré. Elles l’ont appris, pratiqué, et imposé à l’Histoire.

Fran Kirby, bousculée par Caroline Graham Hansen

Devant, il y a eu du maestro. Du talent d’artiste. Lieke Martens qui voit bien qu’elle va plus vite que la jeune Charles. Elle l’attend, la provoque, tient au contact. La ridiculise à l’impact, court vers le but. Centre et Caroline Graham Hansen, jamais gagnante d’une finale européenne dans le passé, s’impose devant Carter, perdue dans ses gestes défensifs, pour marquer le quatre zéro de l’Histoire.

Une caroline, sœur de jeu d’Ada Hegerberg pour les français, fine comme un oiseau d’eau, grande, a mis à terre Carter en pleine surface. Dédaigne le plongeon que tout homme aurait fait, contrôle ce ballon capturé, retrait. Jennifer Hermoso, aux pieds gigantesques, dont les bras tatoués trouveront la place d’inscrire ce titre 2021, s’impose au contact, dribble sur place. Torero face à la puissance de Bright, puis se couche sur le pied saccageur de Leupolz, involontaire mais réel. Un pénalty qu’Alexis Putellas ne rate pas.

Le troisième sera un chef d’œuvre. La signature du FC Barcelone. Mès que un club.

Jennifer Hermoso, meilleure buteuse du Fc Barcelona et en Coupe d’Europe est une avant-centre qui joue en retrait et qui pique devant. Elle est sollicitée sur une passe puissante alors que le FC Barcelona construit un mouvement en attaque. Sa remise va dans les pieds de Martens. AU MOMENT OU ELLE FAIT SA REMISE, est déjà parti Aitana Bonmati pour s’infiltrer.

Lieke Martens aurait la possibilité de tenter une action individuelle. Non ! Le Fc Barcelone nous montre une action d’entraînement. La meilleure joueuse FIFA 2017 se met au service du mouvement. Immédiatement, sans contrôle, elle sert dans une petite profondeur l’espagnole qui se trouve seule face à Berger. Seule Carter a réagi à cette perforation. Elle tacle. Sauf qu’elle tacle comme une attaquante, puisque c’est une attaquante. Un tacle qui manque de puissance mais pas de volonté. Bonmati, meilleure joueuse de la rencontre pour l’UEFA, mettra le 3e but de la rencontre !

Au final, Quatre zéros. Dans une finale, sur une mi-temps. La première. L’excuse de la fatigue ne peut pas être là. La réalité s’impose. Barcelone a joué un concerto de football. A la perfection. Chelsea se rend compte qu’elles ne sont là qu’en tant que spectatrices. Utiles mais sans possibilité d’agir.

Kheira Hamraoui, incroyable de puissance pour gagner cette finale.

Chelsea n’a pas manqué de volonté mais de puissance

Pernille Harder ratera deux occasions en 1ère mi-temps lorsque le score n’était pas encore si éloigné. Une de trop pour les commentateurs. deux de trop pour la coach Emma Hayes certainement. Charles et Carter, latérales à gauche et droite, auront subi l’impact de Martens et Hansen. Elles auront pris l’eau défensivement. Sam kerr, Ericsson auront des occasions mais toutes les balles reprises de la tête iront au-dessus des buts de Panos.

Largement. Signe d’un excès de volonté.

Le bilan

J’avais écris pour cette finale : « Venez rêver ! ». Le football féminin sort gagnant de cette rencontre. Les adversaires sont tombés dans les bras des perdantes. Chacune joue souvent dans l’équipe nationale. Elles se sont saluées. Respectées. L’arbitre aurait pu donner un pénalty au retour des vestiaires. Pas un mot de Chelsea à ce sujet. Le pénalty donné à Bercelone aurait pu soulever des vagues d’écritures chez les hommes. Pas un mot des anglaises.

Le football féminin est sorti gagnant de cette finale.

Merci au FC Barcelona d’avoir donné du rêve.

William Commegrain Lesféminines.fr

Résumé UEFA de la rencontre.

Chelsea-Barcelona | Chelsea 0-4 Barcelone, premier titre pour le Barça | UEFA Women’s Champions League | UEFA.com

UEFA Women’s Champions League – Finale
Dimanche 16 mai 2021 – 21h00
CHELSEA FC (ANG) – FC BARCELONA (ESP) : 0-4 (0-4)
Göteborg (Gamla Ullevi)
Match joué à huis clos
Temps humide (12°C) – Terrain excellent
Arbitres : Riem Hussein (Allemagne) assistée de Katrin Rafalski (Allemagne) et Sara Telek (Autriche). 4e arbitre : Katalin Kulcsár (Hongrie)
Arbitres vidéo : Bastian Dankert (Allemagne) assisté de Christian Dingert (Allemagne)

Buts :
0-1 Melanie LEUPOLZ 1′ c.s.c. (34 sec) (Martens tente une frappe enroulée du gauche qui rebondit sur la barre et revient côté droit de la surface. Graham Hansen remet le ballon, contré et qui prend une trajectoire en cloche. Hermoso dévie de la tête vers Putellas au second poteau qui remet involontairement en retrait du tibia dans l’axe. Kirby veut dégager mais est contrée par Leupolz à 10 m, et le ballon prend une trajectoire surprenante pour se loger sous la barre)
0-2 Alexia PUTELLAS 14′ s.p. (Leupolz accroche le pied d’appui de Hermoso près du point de penalty. Penalty converti par Putellas qui ouvre son pied gauche et prend Berger à contre-pied)
0-3 Aitana BONMATI 20′ (Hermoso à l’entrée de la surface joue en retrait sur Martens qui remet instantanément pour Bonmati dans la surface qui s’avance jusqu’aux 6 m, après un contre favorable dans son duel avec Carter, et ajuste un plat du pied gauche)
0-4 Caroline GRAHAM HANSEN 36′ (Sur une longue ouverture pour Martens côté gauche, cette dernière accélère devant Charles puis vient centrer au cordeau pour Graham Hansen qui coupe du droit à 3 m du but)

Avertissements : Sophie Ingle 38′ pour Chelsea ; Leila Ouahabi 69′ pour Barcelona

Chelsea : 30-Ann-Kathrin Berger ; 21-Niamh Charles, 4-Millie Bright, 16-Magdalena Eriksson (cap.), 7-Jessica Carter ; 8-Melanie Leupolz (11-Guro Reiten 46′), 5-Sophie Ingle, 10-Ji Soyun (22-Erin Cuthbert 73′) ; 14-Francesca Kirby, 23-Pernille Harder, 20-Samantha Kerr (9-Bethany England 73′). Entr.: Emma Hayes
Non utilisées : 1-Zećira Mušović, 28-Carly Telford, 3-Hannah Blundell, 17-Jessie Fleming, 24-Drew Spence, 25-Jonna Andersson, 29-Jorja Fox, 33-Agnes Beever-Jones

Barcelona : 1-Sandra Paños ; 8-Marta Torrejón (18-Ana-Maria Crnogorčević 82′), 12-Patricia Guijarro, 4-María León, 15-Leila Ouahabi (5-Melanie Serrano 82′) ; 14-Aitana Bonmati, 10-Kheira Hamraoui, 11-Alexia Putellas (cap.) (6-Vicky Losada 71′) ; 16-Caroline Graham Hansen (9-Mariona Caldentey 62′), 7-Jennifer Hermoso (20-Asisat Oshoala 71′), 22-Lieke Martens. Entr.: Lluís Cortés
Non utilisées : 13-Catalina Coll, 25-Gemma Font, 3-Laia Codina, 23-Jana Fernández, 24-Bruna Vilamala