Je vais aller dans une direction compliquée. Comment ne pas passer pour un misogyne ? La maladie mentale du siècle pour les pays européens et demander, d’un autre côté, d’arrêter de coloniser les autres cultures avec la nôtre qui ne représente rien de plus ou de moins qu’une manière de vivre. La mondialisation autorisant, chacun et chacune, d’aller vivre dans l’environnement culturel qui lui convient au mieux.

D’abord pour déculpabiliser le débat sans pour autant le désenflammer, on peut appliquer le même raisonnement avec l’implication et intégration de l’Islam dans les pays européens. On le voit, le sujet est passé de sensible dans les années 70, devenant sociétal en 90, puis politique depuis 2003 en France avec le second tour de Jean-Marie Le Pen, allant même jusqu’à donner le pouvoir dans des démocraties européennes (Italie, Autriche). Quand une culture s’importe dans une autre culture, les choses deviennent conflictuelles et fracturent la société.

En 2021, deux événements m’ont interpellé. Les européens ayant brandi les caractéristiques du sexisme pour cataloguer deux faits sportifs.

Le premier concerne le cheikh Joaan bin Hamad Al Thani, saluant l’arbitre chargé de la finale qui a vu le Bayern Munich s’imposer contre les Tigres de Monterrey (1-0), club mexicain dans lequel évolue André-Pierre Gignac, mais n’a pas fait de même avec ses assistantes.

On est au Qatar, dans ce pays avec cette culture. Qui est à condamner ? Le Cheick ou la FIFA qui choisit un pays contraire à son éthique sociale pour une autre, tout autant condamnable : l’expansion, l’argent et le développement. On apprend aux jeunes que l’éthique est une notion qui a une valeur. Elle n’a cette valeur que lorsqu’elle vous oblige à faire un choix. Sinon, ce sont des mots sans aucun sens.

Le Qatar est un pays musulman. La culture musulmane a des principes. Européens, nous sommes des invités quand on entre dans ce monde. Nous demandons d’ailleurs la même chose aux musulmans qui veulent imposer leur culture dans un monde laïque.

De la même manière, le Président de l’organisation des JO de Tokyo 2020, Yoshiro Mori, ex-premier Ministre, « avait déclaré la semaine dernière que les femmes avaient des difficultés à parler de manière concise lors des réunions d’administration, ce qu’il trouvait «embêtant». «Les femmes ont l’esprit de compétition. Si l’une lève la main [pour intervenir, ndlr], les autres croient qu’elles doivent s’exprimer aussi. C’est pour ça que tout le monde finit par parler», avait-il devisé lors d’une réunion ouverte à la presse. »

Pataquès, le Président démissionne.

J’ai dans mes cours de formation deux japonaises. L’une à 32 ans, l’autre dans la quarantaine. Je leur ai posé la question de leur ressenti. La plus âgée, travaillant dans la culture et les expositions, m’a dit que l’homme était un habitué des phrases que les médias condamnent. Il n’en était pas à sa première mais ce qui la choquait, c’était surtout qu’il proposait déjà son remplaçant, sans discussion ni transparence aucune.

La seconde, après un séjour en Angleterre, est en France depuis sept ans. Pour elle, c’est l’âge de la personne qui l’autorise à dire des choses « anciennes ». C’est une tradition au Japon que d’entendre des personnes âgées s’exprimer ainsi. Puis avec un sourire téléphonique, et avec la franchise qui lie ces gens, j’ai entendu son rire léger : « nous les femmes, on aime bien parler quand on est ensemble ! ».

Une française a participé au premier échange. Elle était choquée. Pour elle, elle attendait d’un homme public une parole lissée, idéale, sans heurts.

Au final, le Président démissionne. Pour quelle raison ? Non pas pour sa phrase. Mais pour le chaos que sa phrase a enclenché. Le Japon n’aime pas les chaos.

Pour ma part, je n’attends surtout pas cela des hommes publics. Je préfère les voir s’exprimer réellement pour mieux savoir ce qui les animent et faire mes choix de sympathies ou d’antagonismes.

Je trouve qu’on ne respecte pas assez les valeurs des autres, voulant imposer sa culture comme étant la meilleure. Dans les deux cas, chacun faisait son travail, agissait. Homme et femme. Les contacts étaient différents. C’est la perception des autres qui a posé un problème. Pourtant on était invité dans leur monde. Là le Qatar, là le Japon. Invitations suscitées d’ailleurs par le CIO et la FIFA, par intérêt.

« Une main ou une phrase » a autant d’importance que les ouïghours qui meurent en Chine et avec qui nous sommes en train de signer un traité commercial impliquant l’Union Européenne. Sans une ligne pour en parler.

Quand j’ai abordé la question des JO de Tokyo, les deux m’ont confirmé qu’avec la Covid, ils n’étaient pas désirés au Japon. Un pays qui n’est pas encore vacciné (avril), avec peu d’échanges d’ailleurs. Celle qui travaille dans la culture, habituée des deux mondes, me l’a dit, en riant : « au Japon, traditionnellement, personne ne se touche ! » Vous, vous touchez tout le temps ! Vous nous faîtes peur ! »

Cultures différentes.

Je suis à deux doigts de terminer ce texte. Puis la chaîne d’info en continu qui meuble ce silence matinal monte d’un cran. A Poissy, là où le maire a décidé de pénaliser les destructeurs de cohésion sociale par un retrait des aides municipales ; ses policiers ont été agréssés en représailles. Voilà un de nos problèmes culturels. Accepterions-nous qu’un autre pays nous fasse la leçon ? Démission ?

J’avais ce texte en tête. Sans vouloir l’écrire. Une ancienne étudiante m’a envoyé un SMS ce matin. Il était très positif. Visiblement, elle est sur la voie d’une réussite. Après un retour au Sri Lanka, l’Angleterre et maintenant Paris. Là encore, une culture différente. J’ai très récemment vu deux films sur l’Inde qui m’ont fait découvrir une autre culture : « Le tigre blanc » et « Un+Une ».

Romain Gary, Henri de Monfreid, comme d’autres ont très bien écrit sur la culture différente.

Je trouve que notre monde manque d’aventuriers aimant les cultures différentes.

William Commegrain Lesfeminines.fr