#D1FArkema. Stade de Reims. Amandine Miquel répond à nos questions sur les objectifs du Stade Reims dans une D1FArkema qui est une guerre pour assurer le maintien.

3 Septembre 2020

Auteur : William Commegrain

« C’est la guerre ! ». Les mots ne viennent pas d’Amandine Miquel, la coach de Reims mais de Yannick Chandioux, celui de Dijon. Pourtant, elle n’est pas contre et nous donne le sentiment marqué d’être prête à la faire. Sept clubs ont le même objectif du maintien, objectif qui se joue dans un mouchoir de poche, à 3 points près.   

Qu’on soit dans la communication avec des objectifs fixés sur la moitié de tableau comme Le Havre, club montant de cette saison ou Soyaux, revendiquant, l’Europe dans des saisons à venir, quand la plupart des adversaires placent le dernier club exclusivement féminin de l’élite dans la difficulté en raison de départs offensifs conséquents ; la phrase de Yannick Chandioux porte sa part de vérité. 

Une D1FArkema très serrée, pour le maintien.

Quand les uns répondent le maintien, Amandine Miquel, seule femme à la tête des 12 équipes de la D1F Arkema répond « stabilité, stabiliser le club au plus haut niveau, ce qui n’est pas chose facile. »

Que ce soit Guingamp, Soyaux, Dijon, Le Havre, GPSO 92 Issy et dans une moindre mesure Fleury FC 91, tous savent qu’il est impossible d’affirmer quels seront les deux clubs condamnés à la descente, à la 22e journée. « Le maintien reste quelque chose de difficile à acquérir. Voyez l’OM, le FC Metz ». Deux clubs professionnels masculins faisant l’ascenseur depuis quatre saisons. « je monte, je descends ». La réalité est là « Le moindre faux pas peut-être fatal. Il ne faut pas se relâcher. » Tout le monde a en mémoire la 4e place de l’OM en 2017 (11 victoires) pour constater sa descente en 2018 avec seulement 3 victoires au compteur. 

Les clubs masculins mettent des enjeux au football féminin.

La difficulté était la même les saisons précédentes. En quoi les choses ont changé depuis 2017 ? Tout se faisait sans enjeu dans les clubs féminins. Aujourd’hui, l’élite veut rester dans l’élite.

Saint-Etienne s’est battu jusqu’au dernier souffle juridique pour monter et gommer cette différence de 0,04 point qui lui a fait laisser sa place au HAC ; Fleury 91, club semi-professionnel de CFA 2 a investi dans des joueuses internationales étrangères pour rester en D1FArkema et son Président a mené une fronde pour obtenir plus de la répartition de l’association créée par les clubs de Ligue 1 masculine ; ASJ Soyaux Charente s’est transformée le 8 Juillet 2020 en SAS, fort d’un nouveau budget leur permettant de passer « sous encadrement de la masse salariale » les foudres de la DNCG. Personne ne veut descendre. Plus que sportivement, la section féminine est devenue une représentation de l’image d’un club professionnel. Donc, effectivement, ce qui était une opposition, un combat, est -ou va devenir- une guerre. 

Une dynamique positive au Stade de Reims.

Quelles sont les armes du Stade de Reims pour gagner cette guerre ? D’abord, une dynamique positive depuis plusieurs saisons, associé à celle de l’équipe masculine : « Il y a le lien des montées successives puisque les garçons étaient montés en Ligue 1 juste l’année d’avant que les filles le fassent. Il y a eu une aspiration de dynamique positive. Leurs bons résultats donnent aux filles, l’envie de faire pareil. » Une dynamique de clubs qui a agi favorablement dans les esprits collectifs. Le Stade de Reims gagne le droit de jouer l’Europa chez les hommes ; les filles assurent le maintien, avec une montée faite avec le même groupe. Un véritable challenge, fait d’un ensemble jeune. « Effectivement, on avait un groupe de D1 jeune  et on avait identifié que les joueuses avaient le potentiel pour évoluer plus haut d’où le fait qu’on n’ait pas changé de joueuses et qu’on ait fait confiance à nos joueuses actuelles. »  Une politique risquée par le passé à l’image de la VGA Saint Maur de 2016, fort de 22 victoires sur 22 matches en 2015 en D2F, pour la saison suivante, les voir se réduire à 3 et redescendre, la tête basse. L’ex-capitaine de Reims Danilson Da Cruz, joueur de l’US Créteil-Lusitanos à cette époque, donnait un coup de mains en tant qu’adjoint à la VGA. Là, un projet réussi à Reims.

Un gap qui s’est réduit entre la D2F et la D1FArkema

Un premier succès pour celles qui détiennent l’Histoire du football féminin, puisque l’Equipe de France féminine s’est créée avec le Stade de Reims. Peut-être que l’analyse d’Amandine Miquel y a été pour beaucoup. Celle-ci portant un regard différent de celui de ses confrères sur le gap entre la D2F et la D1FArkema : « la différence est légère. Cela joue sur des détails. Peut-être un peu plus intense, plus technique, moins de déchets. Là où certaines erreurs, en D2F sont rattrapables et peuvent passer inaperçu ; en D1F, on est assez vite puni si on n’est pas dans le bon tempo. »

 

Amandine Miquel, Stade de Reims

Photographie @StadedeReims

Un début de calendrier face au Top 5 de la D1F.

Entre humour et réalité, on peut distinguer l’ambition de la coach. Bordeaux, 3e de la D1F ; l’Olympique Lyonnais qu’on ne présente plus ; Paris Saint Germain (2e). Les 3 premiers de la saison dernière sont au programme des joueuses d’Amandine Miquel en ce début de championnat. Issy et Le Havre pour essayer de prendre des points, puis s’opposer avec Montpellier et le Paris FC. Le Top 5 de la D1FArkema. 

 Amandine Miquel, qui n’est pas femme à baisser la tête, répond : « On avait demandé à jouer Lyon tôt. Ils nous ont mis Bordeaux et le PSG autour, c’est impeccable. On n’est pas dans l’idée ne ne pas prendre de points sur les 3 premiers matches. On part sur l’idée de prendre un max de points peu importe l’adversaire. Bordeaux, Lyon et Paris devraient s’inquiéter. Il va falloir qu’ils se préparent. »

Humour et réalité. Humour car la notoriété des adversaires le justifie ; réalité car le Stade de Reims avait fait l’exploit de marquer 3 buts à l’Olympique Lyonnais lors de la 2e journée de la saison passée. Une performance rare. Pour autant, elle ne reste pas une référence pour Amandine, mais plutôt un souvenir lié à une stratégie : « C’est plutôt un souvenir. Une référence, je ne sais pas. On s’était donné ce challenge sur cette journée. J’espère qu’on ne sera pas les derniers et que cela se répétera pour une autre équipe. L’idée, c’était d’envoyer un message en disant qu’on peut attaquer contre ces équipes là. On en a pris huit quand même. C’est un choix tactique. De se faire plaisir sur cette rencontre là. Si c’était à refaire, les joueuses le referaient de la même manière car elles ont pris plus de plaisir qu’en prendre 5 au retour. » 

Un message qui semble entendu par d’autres coaches ne cherchant plus les raisons défensives de pouvoir réaliser cette performance en prenant exemple sur les matches de la dernière Women’s Champions League : « Pour une fois, c’était des matches un peu fermés. »

Un caractère fort qui ne peut qu’avoir de l’impact sur les joueuses.

La détermination, la tactique, l’envie des jeunes joueuses à s’impliquer dans la réussite de leur équipe ; voilà sur quoi va s’appuyer Amandine Miquel pour cette nouvelle saison qui s’annonce.

Un caractère fort qui ne peut qu’impacter le jeu de son équipe. D’abord en mettant la barre très haute à l’Olympique Lyonnais pour transférer la jeune Naomie Feller, prêtée six mois à l’OL. Le prix de 500.000 €, pris sur l’exemple du marché espagnol, était unique en Europe. Non accepté par les financiers des championnes d’Europe. Ensuite, en précisant sa pensée, même si malheureusement, la joueuse vient de se faire les ligaments croisés : « Il est préférable d’être dans un équipe de moitié de tableau et de jouer 90’ plutôt que 10’ dans une équipe haut de tableau. Après tout le monde n’est pas de cet avis là. La compétition ne remplace pas les entraînements même avec des joueuses de très haut niveau. On apprend à 18 ans, en luttant dans des équipes en difficulté. » Comprenant « Pour elle, c’est difficile. Je ne sais pas si à 18 ans, j’aurais eu le recul pour le comprendre. » Terminant par la dure réalité du sport et des contrats : « Après c’est le football et c’est comme cela. »

Entre le métier et le double projet.

Le football féminin vit de plus en plus sur des réalités économiques et sportives ; là où dans le passé, le sportif était la seule contrainte.

La coach, à juste titre, les possèdent dans son background professionnel : « On essaye que les filles aient une formation complémentaire avec leur métier de sportive de haut niveau. Au minimum Bac +2, avec une mention spécifique pour certaines qui sont au niveau d’un doctorat. » Ne doutant pas que les idées soient toujours intéressantes à soulever mais s’apercevant qu’elles ont du mal à s’appliquer. « Des idées, on en lance comme le championnat à 14 comme à 16. Depuis 5 ans et il est toujours à 12. Certaines équipes de D2F mériteraient d’être en D1F. Dans chaque groupe, les deux premiers ont le niveau. Hélas il n’y en a qu’un qui monte. Cette année, on a vu le cas avec Saint-Etienne qui ne monte pas à moins d’un point. Des équipes pourraient monter sans baisser le niveau de la D1F. C’est bien de lancer des idées mais quand elles n’aboutissent pas, on désespère un peu aussi. Un championnat à 14 ou 16 permettrait, c’est sûr, d’avoir moins de stress sur la descente. » Quant aux jeunes qui auraient ainsi plus de possibilités de jouer, Amandine Miquel a les pieds bien installés sur sa terre de Champagne : « Nous on n’a pas ce problème car on fait jouer les jeunes. Pour d’autres oui. Peut-être pour les grosses écuries qui ont beaucoup de joueuses. Je ne suis même pas persuadé qu’ils feraient jouer les jeunes. Nous c’est déjà le cas. » 

Vous l’avez compris, la coache rémoise n’est pas une rêveuse. Elle est pragmatique, donnant à son jugement, de l’intérêt.

Il faudra juste plus de victoires en D1F que face au FC Metz ou à l’OM, les deux clubs qui sont descendus. Répéter la performance contre Soyaux pour une D1F qui demande au minimum 6 victoires pour le maintien. Voilà un des enjeux du Stade de Reims.

Comment voit-elle l’évolution de la section rémoise ?

« Amandine Miquel, un caractère bien affirmé dans un football qui construit de nouveaux enjeux »

« Perdurer en D1F. S’améliorer avec nos U19F pour pouvoir fournir notre équipe première. Essayer de rapprocher sur la moitié haute du tableau mais cela dépend énormément du développement du football féminin et des budgets qui tournent autour, médiatisation et droits TV. » 

Dans ce cadre, quel a été l’impact de la redistribution des 6 millions d’euros donnés par les Clubs de Ligue 1 à la D1FArkema ? « Tout le monde n’a pas utilisé le montant de la même façon. Il y a des équipes qui ont décidé de le verser en plus et d’autres ont tout simplement compensées en reprenant le montant sur le budget initialement convenu, mais cela reste une bonne initiative ».

Une évolution financière -pas uniquement collective- et qui peut être individuelle en fonction du parcours de chaque club masculin. L’Olympique Lyonnais et le Paris Saint Germain, demi-finaliste et finaliste de la Ligue des Champions auront été servis en 2020. Le Stade de Reims va avoir son obole supplémentaire en 2021 avec sa participation à l’Europa League. « Vous savez bien que si l’équipe masculine va bien, il y a une plus grosse rentrée d’argent ce qui permet de l’autre côté, d’en avoir aussi plus pour les filles. »

Il y a un caractère commun avec Patrice Lair dans cette femme. Pragmatisme. Anecdote, elle est aussi passée par les chamois Niortais dans son parcours (2015-2016) quand le coach breton, double champion d’Europe avec l’OL, a pris en mains la Ligue 2 masculine en 2018. 

LE STADE de REIMS féminin en 2021.

Dans un football qui a considérablement évolué depuis cinq ans ; avec une WCL 2020 défensive ; où le gap entre la tête de la D2F et la D1FArkema s’est considérablement réduit ; le Stade de Reims vient avec les mêmes ambitions que l’année de sa montée : jouer le maintien et si cela doit être une guerre, cela sera une guerre. 

Amandine Miquel a les pieds sur terre. Elle a un groupe jeune, elle est dans un club qui a une progression dynamique et positive. Elle va jouer sa carte en essayant de prendre des points là où on ne l’attend pas.

Le début de championnat avec Bordeaux, Lyon, le PSG, Montpellier et Paris FC sera dans le combat. Il ne faudra pas attendre d’état d’âme sans que pour autant, le plaisir de jouer comme le spectacle ne soit pas au RDV.

William Commegrain lesfeminines.fr