Marlène Bouedec est à la tête de la section féminine de Guingamp depuis 2011, soit la saison où l’EAG a repris Saint Brieuc, présent en D1F même avant 1991.

Dimanche 2 Août 2020, à 15 heures, l’EA Guingamp va jouer une 1/2 finale de Coupe de France féminine contre le sextuple Champion d’Europe, l’Olympique Lyonnais, au Roudourou, en étant la première équipe de Guingamp à y jouer depuis l’arrêt du football un 28 avril 2020 et en étant les premières équipes féminines française (avec l’autre 1/2 finale entre Bordeaux et le PSG) à jouer un match de compétition depuis le confinement.

Le Covid, a l’esprit du début à la fin de la journée.

La manageuse ne cache pas sa concentration quant au problème de santé publique qu’est le COVID. D’autant que l’équipe masculine, en stage à Pleneuf-Val-André vient de constater, ce 30 Juillet 2020, 5 cas dans l’effectif (2 dans le staff, 3 auprès des joueurs), reportant la reprise bretonne des pros de Ligue 2 au 6 Août 2020. Après une période de quarantaine. Information donnée par le Directeur du football, Xavier Gravelaine, à l’AFP.

Si cette 1/2 finale, première pour Guingamp, alors qu’elle est au minimum, la huitième de rang pour l’OL, aurait pu faire exploser le précédent record de 12.000 spectateurs en 2012 pour un match de championnat contre les rhodaniennes ; Marlène Bouedec n’en a cure et s’inquiète « de mettre tout le monde en sécurité », même si la jauge des 5.000 spectateurs maximum n’est pas atteinte. « les ventes sont bien parties mais je n’en ai pas le volume précis. Cela dépendra du temps prévisible qu’il fera aussi dimanche ».

Quel est le processus mis en place pour faire face aux conditions sanitaires ? « Les filles sont bien sensibilisées à la question. Une fille atteinte et c’est le groupe qui va en pâtir. Quand elles sont à l’entraînement, elles sont testées et la température est surveillée à chaque entraînement. Ensuite, dans leur vie privée, elles ont conscience des risques à ne pas prendre. Ce sont des sportives de haut niveau, et en dehors du rapport de confiance, elles se doivent de faire très attention à tout ce qui pourrait toucher à leur corps ».

Celà étant installé, il reste à évacuer cet environnement pour parler de la Coupe de France 2020. Quel beau parcours avec uniquement des équipes de D1F à battre (Fleury, Soyaux, Stade de Reims) quand souvent, à ce stade, les 1/2 finalistes sont passées face aussi à des D2F. « Le Covid nous a bloqué dans cette dynamique positive. C’est une des difficultés que l’on a dû traiter avec une absence de quatre mois des filles dans le groupe. Cela a été très bien géré par Frédéric Biancalani, notre coach et je peux vous dire quel bonheur cela a été de les voir se retrouver pour jouer ensemble à ce qui est leur passion ! ».

Est-il possible de faire l’exploit ? Marlène Bouedec aime bien le mot humilité. « On travaille avec sérieux et humilité. Elles ont très bien réussi leurs matches de préparation mais nous sommes Guingamp ! » La responsable, cela ne m’étonnerait pas, doit avoir un tatouage « Rouge et Noir » sur le coeur tellement le mot « Guingamp » a un sens pour elle. Le rouge et le Noir.

A l’écriture, le sourire se dessine sur mon visage. Les couleurs de l’anarchie. Quand on sait que le Président de la FFF, Noël Le Graet a été Président de Guingamp pendant 20 ans, je le vois mal en anarchiste, chantant, cheveux sous le vent de la côte bretonne, une chanson de Leo Ferré « Les anarchistes ! ».

Guingamp a su poser des problèmes dans le passé en Coupe de France

Ce qui est certain, à l’inverse, c’est que l’EA Guingamp, niché au coeur de la Bretagne, s’est installé sans coup férir, ni transfert médiatisé hors celui de Griedge M’Bock, dans le haut du ventre mou du championnat avec quelques banderilles de qualité ! « On a gagné et éliminé en 2013, le Paris Saint Germain en Coupe de France  aux tirs au but; On a fait une belle remontada au Camp des Loges après un 3-0 en première mi-temps en 2017 (3-3) et enfin, on a souvent gagné contre le Paris FC, soit à Bondoufle, soit chez nous ! »

Là, il s’agît de l’OL. Elle me répond : « nous avons beaucoup de respect pour l’OL mais nous sommes Guingamp. Un match reste un match. » Pas besoin de lui rappeler que l’Ol a été bousculé par Dijon (0-0, 2-0 dans les dix dernières minutes du match) sur les deux matches de championnat. Dijon, c’est Dijon. « Nous c’est Guingamp ! »

Il me reste quelques questions en m’escrimant à les poser de manière à ne pas entendre ou comprendre que nous sommes à Guingamp (humour). Comment faîtes-vous pour recruter sans moyens spécifiques ?

Le constat est simple, je viens de perdre au match aller. Quand ce n’est pas Guingamp, c’est la Bretagne. « Nous sommes une terre bretonne et nous cherchons des jeunes joueuses de proximité, soit de D1F, soit de D2F dans le cadre de notre budget et pour lequel, nous avons une philosophie précise, qui lui garantit qu’elle aura sa chance en D1F Arkema si elle joue le jeu de l’entraînement, qu’elle soit en contrat ou qu’elle soit en double projet (études). »

« Notre particularité, c’est de mettre en avant le rôle de la famille et son investissement pour la réussite de la joueuse, en demandant tout le temps, un respect continuel auprès de son cercle familial. Le club doit être présent mais la famille doit être avant. Ensuite, tout le travail est fait par Frédéric Biancalani qui le fait excellemment bien. Il a ses réseaux. Avec le temps, le club a les siens et les choix des joueuses peuvent prendre du temps, voire beaucoup de temps. Nous avons appris à attendre et nous nous sommes rarement trompés sur nos choix. »

Depuis le temps, la manageuse de l’EA Guingamp a compris que le départ est aussi normal que l’arrivée.

Reste le match retour de mon côté.

Quel est son souvenir le plus fort depuis cette évolution du football féminin ? Je lui propose les victoires. Sa réponse est tout autre et me permet d’égaliser à ce jeu du mot « Guingamp » à ne pas exposer « Elle réfléchit aux contrats professionnels. Elle en avait deux en 2011 avec Julie Morel et Griedge M’Bock. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus. Mais ce qu’elle retient, c’est la télévision et les retransmissions. D’abord Eurosport, ensuite France Télévisions pour certains matches et Canal+ pour le championnat. Cela, cette organisation, cette médiatisation, c’est ce que je retiens de plus fort depuis ces dernières années. »

Je la quitte sur ce souvenir. En 2013, elle avait communiqué en disant la difficulté des petits clubs à attirer des joueuses alors que les équipes de france n’étaient faites que de l’Ol, PSG, Juvisy et Montpellier. Dans la foulée, Gilles Eyquem, sélectionneur des U20, avaient pris SEPT guingampaises au Mondial U20 du Canada 2014 : M’Bock, Clarisse Le Bihan, Faustine Robert, Margaux Bueno, Marine Dafeur et Aminata Diallo.

Je lui demande si elle a « un autre coup de gueule » à faire passer.

Elle sourit. Je me suis calmée. Non, elle ne voit rien de particulier. Les choses avancent de manière positive et pour elle, cela lui convient : elle a des joueuses qui montent en D1F, elles s’entraînent à l’Akademi, l’EA guingamp a des armes pour se maintenir, il y aura peut-être de nouvelles arrivées et Frédéric Biancalani fait un excellent travail. Non rien de particulier.

« Peut-être si, cela serait super de préparer Lundi, un voyage pour la finale à Auxerre ». Elle a envie d’y croire avec une seule phrase chevillée au corps « nous sommes Guingamp ! ».

William Commegrain Lesfeminines.fr