Les Predmore, propriétaire du Reign FC depuis 2012, n’étaient pas venus en France pour vendre le club lorsqu’ils ont rencontré l’Olympique Lyonnais au moment de la Coupe du Monde 2019. « Mandatés amicalement » par la NWSL, afin de vendre le championnat américain à un Jean-Michel Aulas qui avait une stratégie d’implantation visiblement marquée.

Une année de contacts auprès de la NWSL pour mesurer l’investissement à réaliser, soit pour entreprendre avec une nouvelle franchise ou par croissance externe. Orlando Pride (Miami), club d’Alex Morgan et de la brésilienne Marta était dans le collimateur. Ce sera le FC Reign si un accord est trouvé avant le 31 janvier 2020.

Ce que l’on ne doute pas dès lors que Bill Predmore confirme être revenu en France pour discuter avec de potentiels entraîneurs pour un championnat débutant le 9 mars 2020.

Une direction qui ne changera pas. Bill gardant la Présidence du Reign FC quand sa femme Barbara conservera celle de l’Academy.

La NWSL devient difficile pour certaines franchises, dont le Reign FC.

Un Reign FC, champion en 2014 et 2015 moins brillant depuis peu mais retrouvant les lumières des Play-Off en 2018 et 2019 dans un championnat à neuf équipes, sans montée et descentes.

Un championnat qui s’organise, mettant visiblement la barre trop haute pour de nombreux clubs. Les Boston Breakers et Kansas City ont été poussé dehors (2018) et les nouvelles règles salariales ont forcé les Sky Blue FC à investir pour rester. Tandis que le Washington Spirit a été contraint a ouvrir son capital en janvier dernier. L’idée étant de séparer la fédération américaines du championnat pour ensuite demander des investissements supplémentaires, peu à la portée des propriétaires actuels, cherchant les investisseurs du football masculin.

Un environnement qu’un couple ne peut maintenir. Déjà en janvier 2019, les Predmore avaient vendu une part minoritaire à Tacoma Soccer Ventures. Parts qui seront reprises  par OL groupe. D’autant qu’avec 5.000 fans, le Reign Fc est allé chercher un stade à Tacoma en tant que locataire, partant du centre de Seattle. Impossible de prendre les coûts d’une enceinte de 20.000 places. Avec l’idée future d’en construire un, dont l’ouverture ne pourrait pas se faire avant 2022.

A l’évidence, pour le Reign FC, l’OL a du chinois. Comme les européens peuvent attendre des milliardaires chinois investissant sur le vieux continent. Un chinois lyonnais qui devrait investir 650.000 dollars (plafond salarial 2020, avec un salaire minimum de 20.000 dollars pour un plafond de 50.000) pour maintenir à flot une structure financière. Une possibilité dans les moyens réfléchis de l’OL, même si les internationales américaines doivent recevoir un complément de 75.000 dollars pour jouer en NWSL, en sus de leur rémunération fédérale.

Un ensemble fixant le budget du Reign FC à 1 million de dollars. Une somme dans les possibilités habituelles du groupe pour le football féminin, celui de l’OL étant actuellement estimé à 7-8 millions d’euros.

Il y a là une réflexion d’investisseur et d’entrepreneur de la part de Jean Michel Aulas. 

Jean-Michel Aulas croit au marché américain. D’abord, des grandes joueuses américaines venues en France à l’image d’Alex Morgan et Megan Rapinoe. Ensuite, le rapprochement avec Tony Parker en France lui proposant un rôle d’ambassadeur de l’OL aux USA. Et maintenant, un point fixe avec la propriété d’une franchise de la NWSL.

Sur une première analyse, un contexte qui n’est pas sans contrainte pour une majorité au capital. Comme souvent, derrière l’annonce médiatique, les réalités doivent se préciser. Il faut juste rappeler quelques postulats spécifiques au Président Lyonnais.

Jean-Michel Aulas gère un groupe qui doit des comptes à ses actionnaires. L’information avait été répétée aux actionnaires lors du dernier communiqué. Logiquement, il a appliqué sa réflexion. Fournisseurs des experts-comptables de France avec sa société de progiciels CEGID, ses investissements sont toujours réfléchis à l’aune de la rentabilité, en utilisant sa force d’entrepreneur : l’anticipation.

A mon sens, l’Olympique Lyonnais pense que la France n’est plus un marché d’avenir. Demandant prochainement trop d’investissements pour une rentabilité peu assurée face à une concurrence (Bordeaux, PSG) possédant les moyens de les bousculer. D’autant que le jeu vertical faisait des certitudes de différences quand celui pratiqué actuellement par le football féminin ouvre la porte à des surprises tactiques. Les équipes basses sont difficiles à vaincre pour les féminines faute de maitrise technique à très grande vitesse.

L’Europe est encore garantie à court terme mais l’importance des clubs qui s’engagent (Arsenal, Atletico Madrid, Barcelone, Juventus, Chelsea, Bayern) ne peut que créer une inflation des salaires peu compatibles avec une rentabilité. Les joueuses pouvant évoluer à ce niveau étant rares, elles vont devenir très chères pour une rentabilité économique (stade, droits TV, audience et merchandising) en développement sur certains points mais sans croissance encore avérée pour les championnats.

Les avants compétitions internationales (Euro, Mondial) créent une effervescence, stratégique et marketing en spectateurs mais personne n’est encore arrivée à la maintenir après les compétitions. Comme un Black Friday, après une explosion d’achats, le quotidien est bien différent. Il en est de même pour l’occupation des stades.

Pour l’OL, l’essentiel a été fait. 13 titres continus, 6 titres européens. Il faudra attendre au minimum 2035 pour trouver une performance identique chez des clubs concurrents. L’image de l’OL restera longtemps. Il reste à défendre ce capital mais l’avenir est ailleurs.

Le terrain à reconstruire se trouve aux Etats-Unis dans un championnat qui a réussi sa première croissance en étant à sa 8e édition après deux échecs précédents, du simple fait que la notoriété y est grande à conquérir pour un investissement correct restant rentable, soit économiquement, soit médiatiquement. Au mieux les deux.

La NSWL ne cachant pas que d’autres investisseurs européens ont été sollicités pour reprendre d’autres franchises américaines. D’où, l’exclusivité de négociation.

Une nouvelle zone à conquérir.

Mettre un pied ferme aux USA afin « de poursuivre le développement de la marque OL aux États-Unis » après avoir intégré au sein des fenottes, plusieurs stars américaines. Megan Rapinoe au début de son apogée médiatique (2013), Alex Morgan au coeur de celle-ci (2017). Des passages courts montrant de fortes personnalités. Megan Rapinoe décidant au bout de six mois, avec l’accord de l’OL, de repartir aux USA. Son amie lui manquait de trop. Tout le monde a à l’esprit la « fameuse tasse de thé » de la capitaine américaine, buteuse le jour de ses 30 ans, face à l’Angleterre dans une 1/2 finale de la Coupe du Monde.

Une marque qui ne demande qu’à être vainqueur aux USA. Lucy Bronze (meilleure joueuse UEFA 2019) et dans la short-list des gagnantes du Ballon d’Or, glissait un tweet après la victoire du NC Courage en NWSL dans la continuité de l’annonce par la FIFA d’une Coupe du Monde féminine des Clubs.

La présence depuis 2013 de Megan Rapinoe au Reign FC nous laisse comprendre que la meilleure joueuse FIFA 2019 sera certainement le deuxième Ballon d’Or féminin en 2019. Après avoir eu Ada Hegerberg (Ballon d’Or 2018), Jean-Michel Aulas fait un joli coup médiatique.

Le vainqueur prendra tout.

Pour l’OL féminin, c’est de faire dire au monde que la Capitale du Monde et de la France du football féminin est à Lyon.

William Commegrain Lesfeminines.fr