Les féminines se lanceront le 19 Juillet, jour du centenaire du premier Maillot Jaune. Une belle promotion qui les fait sortir de l’Ombre. Qui aurait cru qu’elles puissent encore exister comme professionnelles après une année 2010 où elles avaient quasiment disparues. Comment sont-elles organisées ?

L’histoire a été proche de l’asphyxie pour les sportives de la bicyclette. Un cyclisme féminin dans la lignée du football. Les filles en « danseuses », exclues du vélo. Une première tentative de Jean Leulliot, journaliste de France 2, qui lance le premier Tour en 1955. Sans enthousiasme de l’environnement, précurseur trop précurseur. Dix ans après la guerre de 39-45, on voit dans la femme la personne idoine qui va repeupler une France qui a perdue beaucoup de ses fils. Difficile à associer avec la pratique d’un sport de haut niveau. L’image des trente glorieuses est aux familles nombreuses, sources de richesses futures pour le pays. Le vélo reste un moyen de locomotion et non de compétition.

En 2010, le cyclisme féminin professionnel n’existe plus. 

Une seconde tentative sera rééditée à compter de 1984. L’idée est de suivre la réussite du tennis féminin en demandant aux filles de suivre le Tour de France. Parties en lever de rideau, sans grand succès, elles chercheront la lumière qu’elles ne trouveront pas. Un projet arrêté en 1993 quand Jeannie Longo est en pleine lumière. Peut-être trop forte par rapport à ses concurrentes, en faisant une auto-course.

La native de Haute-Savoie finira une carrière unique de plus de trente ans (1979-2011) avec 59 titres de championnes de France, 13 Championnats du Monde et une médaille d’Or aux JO d’Atlanta en 1996.

Une bagarre juridique autour des marques « maillots jaunes », « Tour » font changer l’épreuve en « Grande Boucle Féminine » et le maillot jaune féminin deviendra un « maillot Or » quand le maillot « Emeraude » désignera le maillot vert de la meilleure sprinteuse.

Par ailleurs, la Société du Tour de France devenue ASO entretemps continue de mettre des bâtons dans les roues de l’organisation qui tombe dans des difficultés financières. pas inscrite par l’UCI dans son calendrier, des dates qui se chevauchent pour d’autres compétitions. Les sponsors dans la tourmente du dopage réduisent leurs participations sans la décaler sur les filles. En 2010, le cyclisme féminin professionnel n’existe plus.

En 2014, le cyclisme féminin rebondit sans moyen.

L’UCI reprend tout et créée L’UCI World Tour féminin en 2015. Le niveau de course le plus élevé du cyclisme sur route féminin international. Le calendrier compte 23 courses, commençant le 9 mars avec les Strade Bianche en Italie et se terminant le 20 octobre avec le Tour du Guangxi en Chine.

Un Tour du Monde qui passe par une épreuve unique d’une journée au Tour de France appelée « La Course by le Tour de France ». Venue du GIRO D’ITALIA INTERNAZIONALE FEMMINILE (5 au 14 Juillet), elles seront Demain à Pau, pour la sixième édition faite de cinq tours qui seront à parcourir avec un total de 121 kilomètres avant le contre-la-montre des hommes. Le 3 Août, elles seront aux Pays-bas pour faire un double saut en Suède, passer par la Norvège et finir le mois au grand prix de Plouay (voir le programme).

Une organisation et des déplacements qui excluent toutes autres activités. Inévitablement, le mot professionnelle s’est imposée à ces filles dont très peu étaient rémunérées. Obligeant certaines à des situations dramatiques. Cycliste professionnelle au sein d’une équipe UCI, Chloë Turblin a quitté en trombe le team Health Mate en février 2019. A l’heure où le cyclisme féminin connaît une médiatisation accrue, elle raconte l’extrême précarité qui touche une grande partie du peloton et la position de faiblesse qui l’empêche de se consacrer à 100% au vélo. (source : sport.francetvinfo.fr)

Dans une communication Facebook, elle précisait que sa rémunération était due à « une autre fonction » dans l’équipe, là de communication. Souvent factice, une rémunération devenue en sorte une épée de Damoclès pour la sportive et qui ne dépassait certainement pas 10.000 € annuel (moyenne rémunération des cyclistes professionnelles).

L’UCI fait passer en quatre ans le cyclisme féminin, d’un abîme à une réalité économique pour les sportives. Même salaire minimum que celui des hommes pour les femmes, 30.000 € annuel.

L’UCi et David Lappartient, son Président, restructurent le cyclisme féminin. Désormais, les différentes courses seront divisées en quatre catégories : l’UCI Women’s WorldTour créée en 2017 réservée à des équipes professionnelles qui respectent un cahier des charges lourds, les courses de l’UCI ProSeries, les classes 1 et les classes 2.

La principale obligation, novatrice est de fixer pour les femmes un salaire minimum à hauteur de celui des hommes, soit 30.000 euros par an (29.000 pour un néo-pro, 38.000 pour un professionnel).

Comme cela représente une charge lourde avec des contraintes de financement, seules cinq équipes féminines pourront visiblement faire partie de l’UCI Women’s WorldTour en 2020. C’est là ou l’UCI cherche à solidifier le projet en affirmant que son centre de formation « Centre Mondial du Cyclisme » présentera une équipe.

C’est là où on voit un véritable changement de paradigme puisque l’UCI crée les dispositions pour qu’il y ait du spectacle en ouvrant en plus, une seconde division qui comprendra les UCI Women’s Continental Teams, qui pourront bénéficier d’invitations pour participer aux épreuves les plus prestigieuses du calendrier, selon un quota que l’UCI doit encore préciser.

Espérant ainsi donner les moyens à cette seconde division d’exister sportivement pour trouver des partenaires qui pourront financer une montée supérieure dans l’élite, décidée non pas en fonction des points UCI mais des moyens dévolus, afin de trouver une première division à 10 en 2021 pour se terminer à 15 en 2022.

Un projet crédible qui est parti d’un tour de table complet auprès des parties prenantes : les équipes, les organisateurs, les coureurs, les fédérations nationales et l’UCI sur les réformes, nous avons voulu savoir comment assurer la stabilité des coureurs qui travaillent et qu’ils doivent être correctement payées pour ce qu’elles sont en train de faire.

Un sondage international avait mis le doigt sur l’incroyable. Le Président Lappartient : « J’ai eu un peu peur quand j’ai vu le sondage que nous avions sur le cyclisme féminin. En fait, les deux tiers des coursiers féminines gagnent moins de 10 000 euros par an. Ce n’est pas acceptable pour nous au conseil d’administration. »

Ce qui est intéressant dans cette contribution, c’est que les choses se sont faites graduellement, ne forçant la porte à personne. le sport féminin est moins attendu que le sport masculin, c’est un fait non-discutable. Pour autant, la recherche de la performance est là. ce qui lui donne tout à fait le droit d’exister en tant que professionnelle.

L’originalité est d’avoir un salaire conventionnel obligatoire (1) et le même salaire minimum que celui des hommes (2).

Le jour du Centenaire du Maillot Jaune, 19 Juillet, sera lancée la course féminine : « La Course By le Tour ». Cent maillots jaunes et le choix de la Direction du Tour de choisir cette journée pour donner une belle lumière à cette course féminine.

C’est plutôt sympa.

William Commegrain Lesfeminines.fr

La Course by le Tour.

Conformément au règlement de l’Union Cycliste Internationale, les quinze équipes UCI Women’s WorldTour suivantes sont engagées d’office : ALE CIPOLLINI, BIGLA, BOELS DOLMANS CYCLING TEAM, CANYON // SRAM RACING, CCC – LIV, FDJ NOUVELLE – AQUITAINE FUTUROSCOPE, MITCHELTON SCOTT, MOVISTAR TEAM WOMEN, PARK HOTEL VALKENBURG, TEAM SUNWEB, TEAM TIBCO – SILICON VALLEY BANK, TEAM VIRTU CYCLING, TREK – SEGAFREDO, VALCAR CYLANCE CYCLING, WNT ROTOR PRO CYCLING TEAM + CINQ INVITEES : BTC CITY LJUBLJANA, COGEAS METTLER LOOK PRO CYCLING TEAM, DOLTCINI – VAN EYCK SPORT, LOTTO SOUDAL LADIES, RALLY UHC CYCLING.

Attention de ne pas faire l’amalgame avec le football. D’abord, au football de nombreuses joueuses internationales gagnent plus. Les épreuves cyclistes sont internationales, les sportives de haut niveau bien moins nombreuses et soumis à un seul régulateur international (UCI) quand le football est d’abord national (championnats) avant d’être européen ou mondial.

Une équipe de football demande 20 joueuses et un staff d’une dizaine de personnes quand celui féminin du vélo demande beaucoup moins de coureuses.

Enfin un contrat masculin est contrainte budgétaires quand pour le football, il est synonyme de contraintes amorties par un transfert qui n’est plus occasionnel mais courant, générateur d’une forte plus-value. Il devient donc un placement, à prendre comme la règle et l’enjeu économique des clubs.

Selon le site « laflammerouge », le mieux payé semble être Froome avec 5 millions annuels (2017). Le million est un peu plus, se trouverait pour Marcel Kittel, Nairo Quintana, Alessandro Valverde, Philippe Gilbert, Greg Van Avermaet, Fabio Aru, Tom Dumoulin (il a signé avec SunWeb jusqu’en 2022) et possiblement Michal Kwiatlowski et Richie Porte et pour les français Romain Bardet, Nacer Bouhanni, Thibault Pinot, Julian Alaphilippe.

Entre 0,5 et 1 million d’euros, on a très certainement des coureurs qui ont gagné de grandes courses ou qui jouissent d’une popularité et d’un capital sympathie important auprès du public. Je pense à des coureurs comme Alexandr Kristoff, Mark Cavendish, Michael Matthews, Dan Martin, Rigoberto Uran, Andrei Greipel, John Degenkolb et, parmi les Français, les Tony Gallopin, Arnaud Demare, Brian Coquard et très probablement Warren Barguil qui a dû passer à la caisse durant l’intersaison. La liste n’est évidemment pas exhaustive.

Un bon équipier d’expérience en WorldTour peut espérer toucher annuellement entre 200 000 et 400 000 euros, dans de rares exceptions (à ce tarif, un Jens Voigt peut-être?). (article écrit le 8 décembre 2017).

Le modèle proposé va-t-il tenir dans le temps quand des sponsors s’arrêtent dans le cyclisme masculin et que ceux du cyclisme féminin risquent d’être sollicités ou attirés par les équipes masculine démunies ?