Un match que tout le monde attend. Attendu, planifié, coché, espéré et arrivé. Une finale avant la lettre. Plus qu’un match, une émotion, une attente, une volonté, un objectif et un résultat.

Un Oui, et la France se soulève contre la future perfide Albion ; un Non, une défaite et le football féminin ferme ses portes dans le coeur des français. Encore un « quart » qui ne passe pas à l’ethylotest de l’ivresse française (2013, 2015, 2016, 2017).

Mais la France en 2019 ne roule pas à l’humeur. Elle roule à la patience. Un match se joue 90′ et plus et c’est à la fin du bal que l’on paie les musiciens.

Les USA, équipe d’expérience qui pratique l’offensif.

Les USA et les Bleues vont s’aligner dans leurs meilleurs atours. La sélection américaine qui court pour un doublé fait uniquement par l’Allemagne (2003 et 2007) devrait jouer dans cet ordre :

USA : Naeher – O’Hara, Sauerbruun, Dahlkemper, Dunn – Ertz, Lavelle, Horan – Heath, Morgan (cap), Rapinoe.

Une ligne de défense qui touche les 30 ans. (29 ans) Un milieu avec une moyenne d’âge de 26 ans (25,33) et une ligne d’attaque à plus de 30 ans (31 ans). Les USA sont venues en France avec un onze d’expérience qui pratique pourtant l’offensif.

Un onze d’expérience qui cependant n’a pas donné ce qui est attendu de joueuses burinées aux compétitions internationales. Aucune capacité d’adaptation lorsque le niveau collectif ne donne pas la performance attendue.

Le match contre l’Espagne des 1/8e en a été l’illustration. Une victoire au score (2-0), étriquée en contenu avec deux pénaltys et un nombre incroyable de passes ratées pour une équipe qui détient sa force dans la vitesse de transmission qu’elle donne à son jeu.

Normalement, la balle est passée à gauche alors que le bloc adverse n’a pas encore terminé son mouvement pour la contrer. Mais là, plus le match continuait et plus elles s’essayaient à cette vitesse et moins cela marchait. Les USA ont la tête dure. En dehors de la domination, rien n’existe pour elles.

Une domination qui a fait exploser la Thaïlande, mais toutes les équipes ne sont pas au niveau des asiatiques, assez loin dans le classement FIFA (34e). Elles ont eu du mal face au Chili (3-0, 37e FIFA) encaissant même un but gag, injustement refusé pour hors-jeu. Elles ont eu des difficultés contre la Suède (2-0), Tobin Heath marquant le 2e but sur un csc adverse.

Comme les Bleues, elles ont gagné leurs matches mais sans produire un jeu dominateur qui les placent au-dessus des autres.

La France, une équipe jeune qui pratique la patience.

Les bleues de Corinne Diacre vont s’aligner dans un onze classique :

France : Bouhaddi – Torrent, Mbock, Renard, Majri – Henry (cap), Bussaglia – Diani, Thiney, Le Sommer – Gauvin.

La défense française a 26 ans de moyenne d’âge. Le milieu dépasse la trentaine (31,66) avec Thiney – le trio offensif, Diani, Gauvin, Le Sommer doit tourner sur une moyenne à 26 ans (25,66). Exactement l’opposé des USA. L’Equipe de France a une équipe jeune avec un trio au milieu d’expérience. Pourtant, elle pratique la patience.

Comme les USA, elle a gagné ses matches sans être totalement ce qu’elles ont l’habitude d’être ou doivent être dans l’esprit des gens. Un Corée du Sud flamboyant (4-0), puis la Norvège (2-1) incertaine, le Nigéria (1-0) difficile et le 1/8e de finale contre le Brésil à bout de souffle (2-1) avec les prolongations.

Mais elles ont gagné avec une qualité mentale réelle et testée par les adversaires. Maintenant parties, elles toujours en lice.

Les armes françaises et américaines.

Les Bleues ont l’équipe pour supporter la charge américaine.

Les Bleues peuvent remporter ce match grâce à leur mental. Aucune n’a envie de rappeler la seule défaite américaine en 2019 face à la France. Toutes en connaissent le réel contexte. Ce n’était pas une compétition, les USA reprenait son championnat. Pourtant le score avait été lourd. (3-0) pour les Bleues avec un doublé de Diani. De la même manière, personne pour rappeler la victoire des Bleues en 2017 à la SheBelievesCup comme le match nul en 2018.

Tout cela juste pour savoir que les américaines sont battables sans en faire un indicateur de mesure fiable. Les filles savent que la compétition est différente. Elles pourraient l’utiliser. On l’aurait utilisé dans le passé. Aujourd’hui, elles veulent juste les vaincre en compétition car elles savent qu’elles en sont capables. C’est une nouvelle approche mentale qui peut être une arme.

Les Bleues peuvent remporter ce match car elles ont les joueuses défensives qui ont le physique pour contrer le jeu américain offensif. Les trentenaires américaines vont s’éteindre au fil du match et même si le banc offensif américain peut faire mal (Christen Press, 30 ans), elles vont buter sur une jeunesse française qui a le physique pour répondre (Majri), la vitesse pour couvrir (M’Bock), la lecture pour anticiper (Renard) et le caractère pour tenir (Torrent). En ajoutant le goût du duel de Sarah Bouhaddi. La France a des armes défensives.

C’est sur cette base que Corinne Diacre souhaite gagner le Mondial. Il y a à l’évidence le risque des critiques, celui des choix et on reparlera certainement de Marie-Antoinette Katoto en cas d’échec. Mais il y a une évidence. C’était une décision, pesée, réfléchie et qui ne doit avoir son verdict qu’à la fin : au résultat.

Au milieu, les joueuses d’expérience françaises vont lutter contre la qualité américaine. La réussite américaine dépendra du match de Rose Lavelle. Cette jeune joueuse de 24 ans possède la qualité d’aller très vite de l’avant quand elle a la balle. Si elle réussit à basculer le match dans le camp français, cela va être difficile pour les Bleues. Il s’agit d’une arme collective américaine qu’il faudra savoir contrer. Horan et Ertz étant plus là pour contrer les françaises et réguler le jeu.

Devant, la jeunesse de Diani et l’altruisme de Gauvin vont au fil du temps créer des brèches dans le jeu américain. C’est une évidence.

La victoire des Bleues demande une meilleure efficacité.

Tout dépendra alors pour les Bleues de l’efficacité offensive. Si Eugènie Le Sommer qui n’a pas assez souvent influé dans ces rencontres, à l’image d’une Alex Morgan pour les USA, trouve des failles ; alors, la ligne américaine ne sera plus horizontale mais va se brise en de multiples initiatives individuelles qui vont exploser sur les coups de butoir du milieu français, excellent dans ses passes, pour trouver un partenaire offensif décalé. Et là, je pense au trio Henry, Bussaglia, Thiney. 

Au bilan, il faudra contrer le jeu offensif américain, et donner de très bonnes passes déstabilisatrices aux attaquantes françaises qui auront la clé du match : Être efficace. Ce qui a grandement manqué aux françaises dans ce premier parcours et certainement la cause de la réussite de l’Angleterre et de l’Echec de la Norvège. 

Le contraire, et on se retrouvera dans un schéma comme la Norvège. Présent mais perdant.

Les USA ont une énergie débordante mais limitée.

Les USA n’ont pas d’autres solutions que de faire mal dès le début du match. Pour ne pas laisser les Bleues se mettre en place physiquement, tactiquement et psychologiquement. Elles vont donc taper dès les première secondes.

En espérant marquer.

Elles sont très fortes sur toutes les balles qui entrent dans la surface.

Leur seconde solution sera sur l’impact physique dans les coups de pied arrêtés. Les américaines bondissent et sont des joueuses de rugby dans ces moments là. Si la balle traîne dans la surface, elles n’auront aucun souci pour la mettre au fond. Elles lisent deux fois plus vite la destination de la balle que les défenseurs. Valérie Gauvin a aussi démontré cette qualité d’anticipation contre le Brésil. 

Les latérales sont des milieux offensifs

Le 3e arme américaine sera le dépassement de fonctions des latérales. Non pas pour centrer mais surtout pour créer du surnombre et déstabiliser le milieu adverse. Elles sont très fortes dans ces moments là. Les joueuses adverses voient arriver des latérales quasiment attaquantes ou milieux offensifs.

Le public, arme française.

Même si 10.000 américains sont attendus au Parc des Princes, les supporters des Bleues seront plus importants et présents. Et pas des moindres. Didier Deschamps est annoncé par exemple mais bon nombre d’autres ne voudront pas rater ce match de « légende ». 

Si le match est équilibré, alors les USA pourront mesurer l’importance du public pour les Bleues. Avec un public qui les soutient, elles jouent 120’, les yeux rivés vers la réussite.

Elles adorent l’entendre. Peut-être la clé de la victoire quand il faut aller chercher l’impossible et l’incroyable. Aucun doute qu’elles peuvent le faire. A voir ce que les américaines feront pour les empêcher. 

On s’est souvent posé la question « pourquoi la France ne gagne-t-elle pas mieux ses matches ? » En se posant peut-être une mauvaise question. La bonne pourrait être : « Pourquoi les adversaires n’arrivent pas à gagner contre les Bleues ? »

William Commegrain lesfeminines.fr

PS : Une défaite entraînerait une double peine. La non-participation aux JO de Tokyo. L’UEFA ne qualifie que 3 équipes européennes. Les autres quarts étant fait d’équipes de l’Europe, les 3 autres qualifiés seront aux JO 2020. La première équipe a été l’ANgleterre.