Que vaut la Norvège de 2019 ? Oublions celle de 1995 (Championne du Monde) et 2000 (Or Olympique). Ne pensons pas à celle de 2013 (Finaliste de l’Euro) en jouant un football très défensif, et oublions la contre-performance de 2017, annoncée lors du dernier match amical contre la France. En zone mixte, Ada Hegerberg, les yeux éberlués, disant « qu’il fallait bien plus d’occasions pour marquer ».

Des joueuses nouvelles sont au Mondial, des anciennes aussi. Mais tout cela est maintenant loin. 23 mois se sont passés. Que vaut cette Norvège 2019, sans Ada Hegerberg.

C’est une équipe qui a confiance en elle. 

Le fait qu’elle ait remportée le Tournoi de l’Algarve, sorte de Grand chelem du football féminin, en mars 2019 doit être pris comme un premier pas, sans pour autant lui donner la raison unique de cette confiance.

La victoire contre le Nigéria (3-0) pourrait être une seconde raison mais la prestation des nigérianes n’a pas spécialement inquiété les troupes de Martin Sjogren. Peut-être que le fait d’avoir laissé le Nigéria prendre la possession mentale et physique de la partie sans avoir à en payer le moindre prix dans les 15 premières minutes de la partie pour finir le premier acte sur un (3-0) non discutable est une des raisons de cette confiance collective.

A la réflexion, trois jours après la rencontre à d’Auguste Delaune, où trône la statue de Raymond Kopa, je crois que la Norvège a confiance en elle tout simplement parce qu’elle a envie d’avoir confiance en Elle. C’est un état d’esprit positif qui ne pourra s’ébrécher facilement.

Elles savent qu’elles ne sont pas les meilleures du Mondial mais elles savent tout autant qu’elles peuvent prétendre à une médaille. Et cela suffit largement à leur bonheur.

Elles nous l’ont dit en zone mixte, notamment par Mjelde, leur capitaine de Chelsea qui a rencontré les françaises en Women’s Champions League, face à Montpellier, le Paris Saint Germain qu’elle a éliminée à la 92′ et l’Olympique Lyonnais. Peu importe qu’elles gagnent ou qu’elles perdent, c’est juste un bon match à jouer.

La force de la Norvège.

La force norvégienne est dans son jeu offensif. Elle associe trois profils totalement différents. Lise-Marie Utland qui a le physique d’une rugbywoman. Taillée dans du granit, des cuisses de percheron qui ont dû soulever tellement de fonte que la courbe ne laisse apparaître aucun laissez-aller quand la largeur vous enverrait facilement une balle hors de l’atmosphère terrestre. Qu’elle se mette au golf et son drive lui ferait gagner un coup par trou. Voyez son but face au Nigéria. La gardienne, pas mauvaise, n’a pas le temps de réagir. La balle est déjà au fond. Il faut éviter qu’elle tire.

La seconde, sur le côté droit, est une joueuse d’instinct. Autant l’autre est carré, autant Caroline Graham Hansen est fine. Une allumette. Sa finesse corporelle est à l’identique de sa finesse de jeu. Elle fond sur son adversaire pour avoir le plaisir de la dribbler, double contact de préférence, et son bonheur se trouve dans la balle déposée et rarement centrée. Elle a la malchance de toujours buter contre les françaises. Face à Juvisy, face au PSG, face à l’OL. Eliminée en Women’s Champions League.

La troisième est la Mickey Mouse du football féminin, Guro Reiten qui vient de signer à Chelsea, double meilleure buteuse du championnat norvégien. Quand la première est baraquée, la seconde fine, elle est petite et maligne, endiablée. Elle cherche le jeu rapide et la passe qui surprend l’adversaire. Un jeu qui adore partir à gauche quand on l’attend à droite. Partir à droite quand on l’attend à gauche. Surgir au centre quand personne ne l’attend pour déposer une balle à Caroline ou Lise-Marie. Elle part souvent de loin, cinq-dix mètres d’accélération et elle se place pour avoir ce ballon et le donner. Une dix qui démarre en huit.

Des forces exprimées contre le Nigéria, qu’il faut relativiser face à l’adversité de la France. D’autant que dans le passé des derniers matches, la Norvège (12e FIFA) a souvent été battue par une équipe du Top 10 mondial (Canada, Japon, Suède en 2019) et que la défense française ne peut pas subir autant et de la même manière, l’efficacité technique et tactique des norvégiennes.

Les faiblesses de la Norvège.

Le milieu de terrain est trop travailleur de l’ombre. Il n’y a pas dans ce trio de joueuse en six qui peut suppléer à une défaillance du trio présenté plus haut.

La défense ne repose que sur la qualité de Mjelde, placée dans l’axe central. Trop peu pour s’opposer à un trio français de très grande qualité à choisir entre Cascarino, Diani, Gauvin, Le Sommer. Minde, joueuse de Wolsfburg, tenace, m’a semblé à la rue face à la puissance de Ortega (Shangaï) qui n’a eu que le défaut de ne pas assurer ses fins d’actions. Idem pour la défense centrale sur un débordement impressionnant d’Oshoala, mais là, je ne pense pas qu’une française est capable de faire de telles enjambées avec une telle puissance.

A mon sens, le système défensif vu à Reims ne peut pas contenir la qualité offensive des Bleues, d’autant que cette qualité s’exprime sur toute la durée d’une rencontre.

La tactique norvégienne.

Le coach norvégien n’a aucun doute là-dessus. Il n’en est pas, avec son équipe, à vouloir imposer son style de jeu pariant sur sa force qui puisse s’imposer aux Bleues en 90′.

Ce que la France a décidé de faire, se plaçant dans les cadors du football féminin, à la hauteur des USA, l’Allemagne, le Canada. On a un jeu et on l’impose à l’adversaire.

Martin Sjogren a dit qu’il allait changer de stratégie face à la France. S’adapter. Il vient en challenger et Herlovsen (30 ans), cadre de la Norvège, était toute heureuse de dire qu’elles avaient un plan à la caméra de Canal +. Une évidence à 30 ans, et pourtant cela la rendait heureuse. Très heureuse.

Toutes les équipes ont des plans. Cette réaction semblait bien loin de l’expérience.

Je vous le dis, la Norvège a un truc. Elles sont confiantes. Positives. Ca, culturellement chez les européens du Nord, c’est un signe à ne pas négliger.

William Commegrain Lesfeminines.fr