Le championnat français ferme ses portes sur un choix polémique concernant la liste de Corinne Diacre pour le Mondial 2019, prochaine actualité. Dès le 7 Juillet, après les vacances, cela sera passé. L’Actualité est crocodile et les nouveautés ne manqueront pas.

L’Olympique Lyonnais au Panthéon.

L’Olympique Lyonnais continue sa marche en avant. 13e titre consécutif. Un exploit qui place le club de Jean-Michel Aulas dans l’histoire de cette pratique en France et peut-être en Europe, 6e titre en vue contre le FC Barcelone (18 mai) à venir, et au-delà si les exigences lyonnaises restent les mêmes, quelque soit les joueuses qui composeront son équipe.

Les records de l’OL sont légions. 13 titres consécutifs de championnes de France sur un total de 18 (avec le FC Lyon intégré à l’origine). Cinq coupes d’Europe dans la période actuelle de 2011 à 2018 (record européen) dont trois consécutives (record européen) et peut-être une quatrième. Huit Coupes de France dont deux avec le FC Lyon et six consécutives (2012-2017)

La puissance lyonnaise est dans la pérennité (2011-2018). Elle dépasse la performance. Structurellement, il y a quelque chose à copier.

Pourquoi le Paris Saint Germain cale ? 

Le Paris Saint Germain a buté sur la dernière marche mais s’est écroulé avec un sévère (5-0) dans son dernier face-à-face. Dans les tribunes du Groupama Stadium, on trouvait Antero Henrique, le directeur sportif du PSG avec Laure Boulleau, coordinatrice sportive et consultante attitrée sur Canal Plus. Des cadres et cadres dirigeants. Mais pas le Président.

A noter que cela s’est passé quasiment au même moment où le PSG masculin a basculé dans la difficulté. Rappelons que les hommes sont éliminés pour la 3e fois en 1/8e sur un pénalty encaissé à la 94′ et marqué par Manchester United, éliminé le tour suivant.

Face à Chelsea, en quart de finale de la WCL c’était la même représentation. Une direction, mais pas la Direction. Au final, l’équipe parisienne sort sur un but encaissé à la 92′ quand elle réalise sa meilleure partie de la saison.

Un dirigeant échaudé dans le passé. En 2015, pour les filles, un avion de VIP avait été affrété pour se voir battu à la 92′ par Frankfurt. En 2017, idem à Cardiff face à l’OL pour la première finale européenne « franco-française ». Eliminé aux Tirs aux buts face à l’Olympique Lyonnais.

A voir, si derrière tous ces faits, il n’y a pas un problème de management commun.

Certains avancent la différence financière pour les filles. Les investissements dans la pratique féminine étant à la portée de tous les clubs masculins, si elle n’était que l’argument, Lyon aurait perdu depuis longtemps le titre féminin. A l’inverse, pour les hommes, à hauteur des 400 millions investis, la Coupe aux grandes oreilles serait déjà parisienne.

Une différence culturelle dans le pouvoir suprême.

Je pense plutôt à la dynamique de groupe qui se joue sur les interactions entre les personnes.

Aulas est omniprésent dans tous les rouages de son club. On sent que le lien de subordination n’est pas basée sur la simple construction juridique, « je te paie et tu me donnes tes compétences ». Un équilibre entre le savoir et le savoir-faire, mais plutôt sur une notion de savoir-être qui te transforme : « Qui est-tu individuellement et quels sont les éléments qui te font apporter un plus au groupe pour que tu lui donnes une plus-value ? »

Pour quelles raisons ce schéma ne s’applique pas au quotidien du PSG ? Le PSG cale, à mon sens, sur un problème de culture.

Le Moyen-Orient, culturellement versé vers le respect du dirigeant qui paie car il assure les arrières de tous, dans des pays où la possession est importante mais ne concerne pas une légion de personnes. On obéit sans que l’autre n’ait à se poser de questions. L’équilibre est trouvé dans la sécurité qu’apporte celui qui donne, en nous choisissant alors que d’autres peuvent mourir « de ne pas avoir » et, le dévouement comme l’obéissance qu’on apporte en contrepartie.

Dans cette relation équilibrée qui est mal jugée à tort par les occidentaux, tout le monde y trouve son compte depuis la nuit des temps. La société s’est construite sa sécurité. Personne ne se pose la question de la présence émotive du dirigeant.

L’Europe -dont la France – se promène entre un management paternaliste avec une touche de modernisme. Il faut une présence émotive de dirigeant, non pas au bout du chéquier car nous sommes sécurisés autrement, mais à proximité, au bout de la table. Sinon, l’esprit de liberté l’emporte sur le détail qui fait la réussite suprême.

« Quand le chat n’est pas là, les souris dansent » dit le proverbe. On obéit, moins vite, moins fort et l’esprit français étant fort, on commence à obéir à soi et non plus à d’autres. Le détail nous échappe. Il va appartenir aux autres mais on « s’en fout » puisque notre « Soi » s’est alimenté de notre esprit de liberté et d’indépendance, bien plus important chez nous que chez les autres groupes culturels.

La réussite de Farid Benstiti et de Patrice Lair vient certainement d’une expérience lyonnaise.

Les canadiens aiment bien expliquer la sociologie de groupe par des exemples concrets. Modestement, je vais essayer de le faire. Les deux coaches qui ont réussi, en très peu de temps, à amener le PSG féminin au plus haut niveau sont Farid Benstiti (finale WCL en 2015, trois ans après la construction du PSG professionnel) et Patrice Lair (Finale WCL la deuxième année en 2017).

Les deux ont appliqué la méthode du management paternaliste et autoritaire. L’exigence en bout de table. Ils se sont substitués au Président. Ils sont devenus coaches Présidents. S’ils avaient pris de la distance, jamais le PSG n’aurait atteint les finales européennes. Juvisy serait redevenu 2e et le PSG aurait buté sur l’anti-conformisme français, meilleur que le conformisme structurel. Un truc émotif qui plait bien aux français.

En étant au bout de la table, ils ont juste appliqué ce qui se fait à Lyon. Présence. Exigence. Protection. Performance. Sauf qu’ils ont buté en finale européenne. Faut-il autre chose ?

La direction du PSG avait un talent émotif, Leo.

Enfin, pour qu’il y ait une très grande réussite en France, il faut un leader émotif. Un leader de fait plus que de droit.

La France a toujours gagné avec un numéro 1 mondial, leader d’émotions. Platini, Zidane. Pourquoi ? Car chacun dans le groupe sait que c’est lui qui va apporter la solution, ils se mettent donc à son service. Et la seconde raison, c’est que le leader d’émotions nous autorisent les fautes, les erreurs. Il n’est pas sanction. Il est émotion.

Pour lui, l’effort est sans limite.

Neymar a été trop souvent absent pour l’être. Kylian MBappé est trop jeune pour le devenir. Cavani comme Di Maria pourraient l’être, mais ils ne veulent pas du costume. Pour les filles, Formiga a trop de raison. Wang Shuang pourrait l’être mais il lui faut un complément et Grace Geyoro comme Marie-Antoinette Katoto sont trop jeunes pour emmener le groupe. Kadi trop discrète. Il faudrait aller chercher en Angleterre, une Carney, Bachmann. Un talent émotionnel.

Le PSG, qui a plus que réussit son développement commercial en étant à la hauteur de ses objectifs commerciaux initiaux : le FC Barcelone, sera toujours orphelin d’un talent génial pour cette entreprise : Léonardo. Le seul qui aurait fait passer ce souci de présence directoriale en un détail anachronique.

Le groupe, le talent émotif

Seul Didier Deschamps a réussi avec un autre concept. Le leader émotif devient le groupe. C’est peut-être la voie de la réussite pour Demain et pour quelques rares exceptions, celle d’aujourd’hui pour qui arrive à l’appliquer.

A défaut, le PSG bute sur un problème interne. Un attendu culturel différent, le défaut de présence, l’absence de talent émotionnel.

Il doit trouver son modèle de management et trouver les joueurs et joueuses, staff en phase avec un type de management structurel.

Insérer la critique à l’intérieur, plus juste, plutôt que de la subir à l’extérieur, par essence même, incomplète.

D’ailleurs avant de terminer ce simple regard, je remarque que Jean-Michel Aulas a souvent tendance à chercher des staffs qui connaissent sa philosophie de management. Je me souviens, lors de ma première interview, qu’il avait répondu. « Un projet, cela se délègue. Il faut surtout prendre des personnes en phase avec son projet ».

De l’extérieur, le football des clubs a un gros défaut. Il est bien trop partisan et pas assez ouvert sur le Monde. Il est trop « j’ai raison ». En même temps, c’est son essence (je dois gagner) et son identité (J’aime un club et pas les autres). Mais si les entreprises étaient comme cela, elles disparaitraient au bout de leur cycle de produits. Impossible à s’adapter, faute d’anticipation.

Je pense que le regard extérieur, il faut le prendre en consultants internes. Pour qu’ils apportent autre chose en ayant connaissance des spécificités de la maison quand les médias ont un regard puissant qui influence en interne. Et à la base, très incomplet. Il faut une culture de la critique interne forte et objective.

Il y a un école de la performance, récente et très moderne qui applique la formule : « le désordre, c’est l’ordre ». Cela pourrait se traduire, le désordre fait partie de l’ordre, c’est la partie réservée aux talents. Attention, cela va bouger.

C’est peut-être cela la bonne formule, l’équilibre entre les salariés adaptés au management et les consultants différents, tous focalisés sur une seule identité : celle précise et identifiée, le groupe.

Je pense que l’OL féminin peut être battu au championnat en s’organisant différemment. Lyon n’ayant aucune raison de changer, s’il est bon, ils ne pourront que subir le changement.

William Commegrain Lesfeminines.fr