Après sa performance unique dans le football féminin européen en réalisant le 13e titre consécutif de championnes de France, les lyonnaises sont parties pour tenter d’écrire un autre parcours de Légende. La Women’s Champions League. A deux pas de la finale pour cette 1/2 finale retour face à Chelsea, après l’avoir emporté (2-1) au Groupama Stadium dimanche dernier.

L’Histoire lyonnaise montre que l’OL n’a jamais chuté à ce stade de la compétition. Certaines fois plus tôt (2014 et 2015), sinon depuis 2010, le palmarès lyonnais ne s’écrit qu’avec des finales, cinq gagnées, deux de perdues (2013).

Dans les mots « records lyonnais », il y a, non visibles, les lettres du mot Aulas.

Au micro de Canal Plus, après la victoire (0-4) face à Dijon, le Président Aulas précisait l’erreur commise, par manque d’expérience et de moyens, de n’avoir pas su continuer la série des titres acquis par les hommes de 2002 à 2008 (sept). Il s’est rendu compte de la difficulté incroyable à refaire une même performance et du simple détail qu’il peut y avoir à ne pas réussir quand peu de choses le permettraient. Juste la stratégie d’anticiper.

Pourquoi se placer si haut dans le football féminin ? Il a cette option stratégique. Des raisons économiques liées à un business model qui intègre la performance féminine. Une entreprise cotée en Bourse « à faire réellement tourner » maintenant qu’il se trouve dans la phase d’exploitation des investissements réalisés pour la construction de son projet. Mais plus que cela, à l’image d’un Bernard Tapie qui avait voulu faire un record transatlantique en monocoque sur le Phocea. C’est aussi son record. Là, sur les 13 titres, pour ces 13 titres, il y a mis plus d’une pierre. C’est sa performance.

Jamais il n’aura la négligence de lâcher ce qu’il sait. Il ne suffira pas de gagner l’OL, il faudra le battre.

Des joueuses habituées à la confiance.

C’est certainement la chance et peut-être l’enfer de ces filles insérées entre la vingtaine et la trentaine. Inconsciemment il les condamne à vivre de souvenirs.

Des souvenirs, car à mettre au pluriel. Comment pourront-elles faire plus et mieux dans le reste de leur parcours de vie ? On le voit, toute cette génération dorée de 2011 qui a connu le début de l’aventure lyonnaise n’est pas servie de la même manière au repas du partage et de la vie. Si elles veulent performer après, elles savent à quel point il est difficile, incertain, de réussir une performance dans la Grande Vie. C’est bien plus difficile.

Alors les lyonnaises 2010-2019 mangent, dévorent ce privilège d’être des Lumières dans un monde féminin petit mais le leur. 13 titres. Peut-être 14, 15, 16 qui sait ? Où sont les limites ? Nul ne le sait. Une marque de performance qui ferait que bon nombre de joueuses adverses ramperaient pour venir signer à Lyon. Histoire enfin d’être dans cette Lumière et de posséder des titres. Alex Morgan, l’américaine actuelle la plus connue, devenue capitaine des USA, plus de 3 millions de likers et followers, s’est laissée charmer pour une pige de 3 mois, auréolée de titres (championne France, Europe, Coupe de France. Shanice Van de Sanden, néerlandaise inconnue européenne avant son titre de championne d’Europe 2017, avec cette ligne de palmarès qui est restée unique pour les filles de son équipe, et qui se trouvera noyée parmi les titres de coupes d’Europe, de championnes de France, de coupes de France lyonnaises, faites et à venir.

Donc Elles, elles y sont. Alors, inutile d’essayer de les interroger sur le doute, la compétition.

Elles savent que l’échec ne doit pas se prévoir. Seulement se subir. Pour ensuite, le comprendre et ne pas le renouveler, mais surtout l’oublier. L’échec, c’est l’émotion des perdants. C’est une formule assez simple. Que beaucoup ont, sauf qu’elles, ont un privilège. Elles regardent les adversaires de haut. Elles aiment cela plus que tout. Elles préfèrent cette forme de regard que les femmes comprennent entre elles. Adversaires qui, toutes se connaissent. Se contactent. Se parlent. S’échangent.

En football féminin, un titre ne se gagne pas que sur le terrain. Au-delà de l’alchimie qui est une fulgurance recherchée par tous les coaches de L1 et L2, laissée aux autres par ces lyonnaises, qui ne la cherche plus. Elles évoluent au-dessus, dans la très grande régularité d’une salle de concert classique. Où le seul impair se limite à quelques notes.

Sont-elles battables ?

Oui, sans état d’âme. Cette saison, Lyon ne produit pas le même jeu pendant 90′. Elles ont des phases. Si elles ne marquent pas dans leurs phases de possession, alors elles peuvent être en difficulté sur celles de l’adversaire. Bien moins entraînées à subir le jeu adverse et à ce qui fait le but encaissé. Souvent un détail.

Elles peuvent mettre une raclée au PSG, au score comme en contenu (5-0). Mais aussi buter face à Fleury (1-1), club plus modeste de la D1F. Comme réaliser une mi-temps moins bien contre Dijon (0-0). Se faire reprendre par Chelsea, (2-0) à la mi-temps, (2-1) en fin de match avec un pénalty arrêté par Sarah Bouhaddi.

Est venu le premier moment où les joueuses n’ont plus peur d’elles. Viendra le temps où l’OL sera battu dans la course au titre. Il n’est pas si loin. C’est tout le mérite qu’elles ont eu à gagner ce 13e titre.

En attendant, elles enfilent les titres comme des perles.

De cette finale de la WCL en 2016, il ne reste plus grand monde. Lyon, c’est avant tout Lyon. Avant les joueuses.

Lyon à la course d’une plus belle performance, la série européenne. 

Lyon est en Angleterre. Dimanche, elles joueront la 1/2 finale retour de la WCL 2019 face à Chelsea, dans un petit stade de la banlieue anglaise. Au Cherry Red Records Stadium, Kingston. 4.850 places dont 2.265 assises nous dit wikipedia. Un petit stade anglais, comme celui de Maquin pour l’ex-Juvisy. Avec un aller à (2-1), le principe du match qui compte double en cas d’égalité, Chelsea en Youth League masculine qui se qualifie pour la finale hier en battant Barcelone, Chelsea Ladies qui n’est pas qualifié pour la WCL 2020, 3e du championnat, des joueuses de qualité insensibles à la force lyonnaise, Chelsea est un véritable adversaire.

Même si Lyon a déjà vaincu par deux fois un club anglais en 1/2 finale européenne. Lyon a un sacré adversaire avec ces onze joueuses internationales et un superbe challenge d’écrire l’Histoire Européenne du football féminin qu’elles ont commencé à transformé en 2010.

Une compétition cannibalisée dans la première décennie par l’Allemagne. Commencée en 2002, pour cinq titres allemands (Franckfort, Turbine Postdam, Duisbourg) et deux finales (Turbine et Postdam). Seule la Suède était au combat avec deux titres et trois finales pris par le club d’Umea, maintenant disparu. Une habitude dans ce pays du Nord qui sait à l’avance à quel point on ne peut pas créer un championnat féminin avec 5 millions d’habitants quand déjà, en France, à 67 millions, il y a si peu de spectateurs qu’on est capable de reconnaître son voisin dans un stade. Comme un ami que l’on revoit.

L’Europe, de plus en plus compétitive.

Avant 2010, on avait l’habitude de dire que la Coupe d’Europe ne devenait compétitive qu’à compter des 1/2 finales, faute d’un assez grand nombre de joueuses de qualité dans tous les championnats. Est venu une période où les quarts pouvaient devenir difficile ou facile suivant le tirage (2016). Cette année 2019, seul le Slavia Praha a été un invité surprise. Tous les autres clubs ont une histoire européenne. OL, Wolfsburg, Barcelone, Bayern, Chelsea, PSG, plus modestement Lillestrom (Norvège). Se pointe l’Espagne avec l’Atletico Madrid, l’angleterre avec Manchester City et l’Italie redémarre avec la Juventus que l’on verra avant les cinq ans au niveau européen.

L’Europe va devenir le vrai graal à obtenir. Dans chaque championnat majeur, comme la France, l’Allemagne, l’Espagne, l’Angleterre et bientôt l’Italie, on trouvera deux équipes féminines de très grande valeur qui écraseront leur championnat mais seront d’un niveau homogène dans les confrontations européennes.

Les titres européens vont être bien plus difficiles à remporter.

Chelsea rêve de renverser la montagne européenne.

Le sport demande à ce que l’on renverse les montagnes. C’est ainsi que pour toutes et tous, il est rêvé.

Lyon, avec 17 titres nationaux, structure économique féminine la plus évoluée en Europe, ayant réussi sa fusion avec le FC Lyon (4 titres), possédant le double record du nombre de titres européens (5) et de celui gagné consécutivement (3). A ce titre, la seule à posséder l’original de la Coupe Européenne.

Lyon qui met à égalité les hommes et les femmes. La seule équipe française à avoir fait le doublé homme-femme en 2008 en championnat. Lyon est une montagne. Il y a des joueuses à Lyon qui sont parmi les meilleures au Monde. C’est cette montagne que Chelsea veut buter hors de l’Europe.

L’Histoire lyonnaise à écrire est grande. Un sixième titre européen, un quatrième consécutif. Aujourd’hui, elles gagnent des titres sur une saison mais elles ne produisent pas leur meilleur jeu sur un match. C’est la seule porte disponible pour les anglaises. Tout le monde ne pourra pas l’ouvrir. Chelsea a le jeu et les joueuses pour les battre. Emma Hayes confirme qu’elle a fait intervenir une rescapée de l’Holocauste pour délivrer des messages sur la réalité de la Vie. Sur la force à ne pas se résigner.

L’Olympique Lyonnais a les joueuses pour se qualifier et remporter cette qualification, sauf qu’elles ne produisent plus la garantie passée. Il y a dans cette équipe, le début d’une incertitude de la performance suprême. Logiquement en finales européennes depuis 2016, maintenant de temps en temps en championnat.

Pourtant l’Olympique Lyonnais a aussi sa montagne. Remporter le titre européen depuis 2016 a été difficile. Deux victoires aux tirs au but (2016, 2017), une autre en prolongation (2018). Prendre le titre 2019 sera un vrai challenge. Loin d’être acquit. Et il en sera de même pour les saisons à venir.

Chelsea n’est pas un adversaire plus faible. Il est un adversaire européen. Penser autrement serait une belle erreur du passé.

Le match se jouera dimanche à 15h00 sur Canal+. Un match qui ne sera pas loin de l’intensité de la bagarre entre le Paris FC et Montpellier. Une odeur de Coupe du Monde. Un match à regarder.

Une bagarre où personne ne doit passer où tout cela pourrait se décider sur la fulgurance d’une joueuse qui fera exploser le coeur de ses équipières dans une couleur rouge sang de bonheur. Qui sera la couleur des larmes, pour les autres. L’injustice du sport qui ne veut qu’un vainqueur.

William Commegrain lesfeminines.fr