Pourquoi cela ne tournerait pas ? Voilà le sentiment que j’ai au sortir de cette conférence de presse d’avant-match organisé au camp d’entraînement des féminines à Bougival.

En Angleterre, le titre est passé d’Arsenal (14 championnats dont 8 consécutifs) à Liverpool (2), Chelsea (3) avec un intermède Manchester City (2016). En Allemagne, les titres se sont partagés entre Frankfurt (9), le Turbine Potsdam (5), Wolfsburg (4) et le Bayern de Munich (2) qui s’est inséré dans la performance du Vfl Wolfsburg, championnes d’Europe. En Italie, les quatre dernières années ont donné quatre champions différents (Vérone, Brescia, Fiorentina et la Juventus) et en Espagne, le FC Barcelone (4) a laissé les titres à l’Atletico Bilbao en 2016 (1) puis l’Atletico Madrid a repris les rênes (2).

Partout en Europe, les champions ont changé. Alors pourquoi cela ne tournerait pas en France ? D’autant que le PSG a l’expérience des grands matches depuis 2012, que le PSG titille l’OL sur des scores serrés, que les deux équipes sont au coude à coude et n’ont jamais été aussi près l’une de l’autre, que l’affiche est juste magique, que l’exploit serait historique et que Paris progresse logiquement pour jouer, légitimement, sa chance.

Maintenant, en face, c’est l’OL. Et tout le monde sait ce que sont ces joueuses. En fait, tout dépendra de l’OL. Seront-elles assez fortes pour contrer le challenger parisien, très motivé ? Pas si certain. Elles le disent souvent. Gagner les titres, ce n’est jamais simple.

On a jamais été aussi proche d’elles ! C’est une occasion unique de prendre le titre ! Aminata Diallo

Tout le PSG reconnait le titre de « Meilleure équipe d’Europe et même du Monde » attribué sans souci par Aminata Diallo, mais jamais l’équipe du PSG n’a été aussi près de l’Olympique Lyonnais depuis 2012 et sa course au championnat. A l’évidence, les premiers mots de la joueuse, concernés par le terrain, ne peuvent que poser un cadre précis « Le groupe se sent bien et il est très concerné par ce dernier gros match de la saison ».

Olivier Echouafni ne dit pas autre chose quand il fait constater à l’assemblée que, si certes, les scores parisiens n’ont jamais été aussi forts que ceux lyonnais, souvent proche du (0-4) à l’extérieur ou du (4-0) à domicile, « ce qui est certain, nos performances sont dues à une équipe qui a une grosse force de caractère réalisés dans un parcours pas facile mais au bout du compte on a 53 points ! » concluant son propos ainsi : « on fait une belle saison, elle peut devenir magique et même Historique en cas de victoire ». 

12 championnats de suite du côté lyonnais. 5 titres de championnes d’Europe dont 3 consécutifs et un quatrième qui s’annonce bien selon Olivier Echouafni, sans parler des victoires en Coupe de France depuis 2012 (à l’exception parisienne de 2018). Être là, au même niveau que l’OL (53 points) et avoir la possibilité de lui ravir le titre. Pour le PSG, c’est une performance. C’est avec ce regard qu’il faut voir les interventions d’Olivier Echouafni et d’Aminata Diallo, joueuse à l’aller (1-1) et qui pourrait être alignée sur ce retour, avec cette hargne qui lui est propre quand elle est sur le terrain. « Une équipe de l’Ol très forte mais à la portée du PSG ».

Lyon est en haut mais le PSG se rapproche de cette équipe de Lyon. Olivier Echouafni.

Les matches se décident avec des contextes. L’importance de « cette finale » oblige à être précis et méticuleux sur l’environnement.

Olivier Echouafni ne pouvant s’empêcher de rappeler la proximité du retour des internationales qui arrivent au compte goutte, semblant sortir d’un aéroport voisin. Peut-être le détail qui fera une différence ? Bien que les deux équipes soient à la même enseigne, avec seulement « 48 heures pour préparer cette rencontre » essentielle au championnat. Du côté parisien, le coach soulève des incertitudes compte tenu des matches internationaux joués, mais reste dans la dynamique de groupe. « On fera avec. On est un groupe qui a vécu une saison pleine et qui aura à coeur de faire ce qu’il faut à Lyon, samedi. »

Tout est à prendre quand on joue l’Olympique Lyonnais et cela doit être identique de l’autre côté du Rhône. On peut s’étonner -par exemple- que Marie Antoinette Katoto, potentiel très marqué en A, ait joué les trois rencontres de l’Equipe de France B. Sans se reposer. « J’espérais qu’elle joue un peu moins quand même ! ». rappellera le coach parisien en précisant qu’il avait pris langue avec le sélectionneur des B.

18 buts au compteur, partageant la première place avec Ada Hegerberg. Entre une Marie-Antoinette reposée et une Marie-Antoinette fatiguée, il y a la différence qui peut faire la victoire. Olivier Echouafni, au football féminin depuis 2016, regarde les détails. « Récupération » est le mot clé pour la jeune attaquante française de 20 ans qui « doit gérer tout ce qu’elle a vécu dans la saison, sur le plan physique mais aussi psychologique. Et à 20 ans, c’est pas simple. Terminant ainsi au sujet du principal atout offensif parisien : « j’espère qu’elle va faire un grand match, elle en est capable ». Aminata Diallo, plus près d’elle n’en doute pas une seconde. « Elle veut le titre ». Important quand on sait que c’est elle qui a donné la Coupe de France 2018 à Paris (1-0) face à l’OL.

Si le poste d’avant-centre préoccupe les débats. Celui de gardienne, qui est essentiel quand on rencontre l’OL, se pose avec un turn-over organisé entre Kiedrzynek et Endler, toutes les deux nominées aux trophées de la D1F et pas dans la même dynamique avec leur équipe nationale. Un sévère (7-0) face aux Pays-bas pour la capitaine chilienne, une défaite plus serrée pour la polonaise contre la Finlande (1-0) avec une Pologne finaliste de l’Algarve quand le Chili s’est qualifié pour la 1ère fois à un Mondial avec le titre de vice-championne d’Amérique du Sud. Le coach botte en touche, parle de physique et de psychologique, attendant surtout « des filles à 200%, 400% » quand on joue l’OL.

Autre particularité, là plus parisienne, avec ce douzième homme parisien. Ces supporters uniques et considérés comme « les meilleurs supporters du monde » leur donnant maintenant l’habitude de jouer devant un public présent. Cce qui ne leur posera aucun problème dans un Groupama, même fait de 15.000 à 25.000 lyonnais. On risque quand même de les entendre, confirme le coach parisien encore émerveillé « d’avoir vu une cinquantaine de supporters les attendre à l’arrivée de la Gare de Lyon, après la défaite en Coupe de France. En chantant. »

Des détails qui comptent dans le sport de haut niveau, notamment quand tu joues ta saison et un titre sur un match. Reconnu comme une « finale de championnat et dont le résultat ne peut être qu’une victoire pour le PSG, sinon le titre restera lyonnais », bien que le coach parisien et la milieu de terrain rappellent qu’il y aura deux autres matches ensuite pour le PSG. « il n’y aura pas que ce match ». Bordeaux et Guingamp les attendent. Des équipes pas simples à jouer.

L’actualité lyonnaise étant si présente que ce serait une erreur de ne pas poser la question de l’ambiance générale dans ces deux clubs où les ambitions masculines et féminines sont au plus haut niveau national. Aminata Diallo répond sans réfléchir, précisant que pour elle, les lyonnaises font faire fi de tout cela, « savent faire la part des choses » et se concentrer uniquement sur la rencontre quand Olivier Echouafni, à la recherche du détail, ne peut s’empêcher de sourire.

Dernier contexte et pas des moindres, autre moteur de motivation, celui de rappeler cette récente défaite en Coupe de France par Olivier Echouafni : « qui a laissé des images aux filles. Elles ont envie de montrer autre chose ».

Il faut s’attendre à souffrir et toucher au dépassement de soi ! Aminata Diallo

L’Olympique Lyonnais. Aminata Diallo les a maintenant souvent jouées. Sa réflexion concerne le début de rencontre « toutes les équipes souffrent car elles mettent beaucoup d’intensité et de rythme. Il faudra être patientes et costauds et s’attendre à souffrir pour derrière attaquer et marquer ce premier but ». Au bout de son émotion, elle évoquera « le dépassement de soi ». Comment peut-il en être autrement face à l’OL ? C’est ainsi qu’avait gagné Benstiti en 2014 par deux fois. Un total dépassement de soi et une stricte application des consignes. Patrice Lair avec Cristiane, avait plus joué au ballon en 2016. La solution, dans les trois cas, étaient venus d’un seul but. Pas plus.

En remontant plus loin, en 2014, où le PSG avait vaincu deux fois l’OL à Gerland. Inévitablement se pose la question de la transmission des valeurs. Laure Boulleau, salariée du PSG, est-elle là pour faire passer des messages sur la force des couleurs parisiennes à Lyon et sur le plaisir qu’elle a connu en faisant les premières victoires contre l’OL, en terre extérieure ? Aminata Diallo confirme les contacts, les mots d’encouragements et le regard positif de l’ex-latérale parisienne mais le PSG regarde devant. « Nous avons toutes notre préparation personnelle et maintenant, nous avons assez d’expérience pour préparer chacune nos matches importants ». Il est vrai que le PSG est devenu un PSG d’expérience avec des finales de Coupe de France (2014, 2017, 2018), des finales européennes (2015, 2017), et une constante deuxième place de championnat depuis 2012, sauf en 2017.

Quand on joue un titre, tous les regards sont bons. Si l’Olympique Lyonnais a des joueuses qui se connaissent depuis très longtemps – peut-être trop – et qu’elles pourraient très bien partir en vacances ensemble ; le Paris Saint Germain, plus jeune a assez de joueuses qui ont connu les récentes confrontations et savent tirer le bilan des trois dernières. Aucune défaite à domicile depuis 3 saisons, Notamment, précise Diallo : « nous sommes la seule équipe à leur tenir tête dans les confrontations directes » en rappelant que la mauvaise expérience de Chelsea, avec une élimination à la 92′ en quart de finale, se doit d’être une bonne leçon à retenir. Et sans donner plus de corps au match nul de l’Olympique Lyonnais contre le FC Fleury 91 (1-1) la journée précédente. Un très bon résultat pour Fleury qui ne change rien au contexte de la rencontre de Samedi. La victoire parisienne est impérative pour le titre.

Le scénario idéal ? (0-1), les 90′ minutes face à Chelsea et vous enlevez la 91′. Olivier Echouafni

Olivier Echouafni pourrait se reposer sur le passé. En fait, il a préféré regarder devant. Dire à ses joueuses à quel point elles ont réalisé une performance en suivant le train d’enfer lyonnais et rappelant le séisme que ce serait que de prendre le championnat à cette équipe quasiment imbattable !

Avec un tel enjeu, l’ex-sélectionneur des Bleues dit à quel point il n’y a pas besoin de traduction. Une observation qu’ont peut faire à Bougival où l’anglais se pratique autant que le français. Ni en Chinois pour Wang Shuang, comme en portugais pour Formiga (41 ans). L’affiche est plus que parlante. Elle est mondiale. A l’exemple de la brésilienne, six coupes du monde et autant de JO comme expérience. « Une légende du football féminin, qui ne pense qu’à une chose, être sur le terrain ».

Vient l’entraînement. Les premières touches de balles. Pied gauche, pied droit. Nadia Nadim s’amuse à taper une planche. Un pied, l’autre. La balle revient. La joueuse améliore son contact. Coup du pied, meilleur contact sur le ballon. Tranquille comme une chanteuse d’opéra qui fait ses gammes. Une histoire avec Soi. D’autres arrivent. Puis de plus en plus. Les trois quart sont sur le terrain. Je me retourne, Irène Parèdes est en habit de ville. Cinq minutes plus tard, elle est sur le terrain. Rapide. Concentrée. Toutes sont là. Andrine Hegerberg écoute Katarzyna Kiedrzynek lui parler anglais. J’imagine ce qu’aurait été ce match avec les deux soeurs en opposition. Je me dis qu’elles ne joueront pas la Coupe du Monde. Un match important contre elles à Nice pour les Bleues qui n’aura pas le même parfum. Le football est vraiment affaire d’instants. De moments. A prendre ou à laisser.

Un titre face à l’OL, c’est Madonna dans un stade. Beyoncé pour d’autres. L’OL, au féminin, c’est une marque que LVMH serait en droit d’acquérir. Le PSG, acteur de la concurrence, s’est construit pour le devenir. Pour un duel, en France, où si tu veux le vivre, il faut que tu sois, ou à l’Ol soit au PSG.

Gagner l’OL, c’est faire le tour du monde. Prendre le championnat français à l’OL, c’est entrer dans la Légende du football féminin de la D1F, et même d’ailleurs.

C’est ce qui attend les parisiennes Samedi soir, 20h45, en direct sur Canal Plus. Les lyonnaises auront leur mot à dire. Les parisiennes aussi.

William Commegrain Lesfeminines.fr