UNE EQUIPE A CONSTRUIRE

CANNES !..Rien que d’évoquer le nom de cette ville de la Cote d’azur, c’est une image qui apparait et qui se matérialise : la Croisette, le festival, le cinéma, les stars sur le tapis rouge !.. Mais lorsque l’esprit se fixe sur le football, sur l’AS Cannes plus précisément, c’est en tout premier lieu son centre de formation qui s’affiche dans la mémoire.

Couveuse de futurs internationaux : Yazid Zidane, Johan Micoud, Patrick Viera, Sébastien Frey, Gaël Clichy pour ne citer que les plus connus. Tous ont porté le maillot bleu orné du coq France. Excusez du peu !..

Le joyau Zidane, le plus emblématique, prénommé « Yaz » par Guy Lacombe, responsable du centre de formation lors de son intégration en 1987, surnommé ensuite affectueusement « Zizou » par Rolland Courbis, alors qu’il le dirigeait aux Girondins de Bordeaux. Sans oublier Jean Fernandez, son entraineur en équipe pro, qui l’a lancé dans le grand bain un jour de mai 89. C’était le 20 mai à la Beaujoire pour douze minutes de jeu face au FC Nantes de Didier Deschamps et Marcel Desailly. Il avait seulement 16 ans et 11 mois.

La formation, toujours la formation, fleuron du club à la fin du siècle dernier. Une fierté sans limite de voir éclore les étoiles du lendemain. Ces noms prestigieux cités plus haut, auxquels il faut adjoindre des formateurs hors pair : Arsène Wenger, Guy Lacombe ou Jean Fernandez. L’un ne va pas sans l’autre.

Alors me direz-vous, pourquoi évoquer l’AS Cannes sur ce site réservé aux féminines. D’une part parce que ce site ne pratique pas l’ostracisme et qu’il s’ouvre à toutes formes de sujets, mais surtout parce que la curiosité qui est souvent considéré comme un vilain défaut est une qualité première en matière de journalisme.

L’idée donc était bien de rattacher le football féminin au prestigieux passé de ce club qui faillit mourir deux fois (rétrogradation en CFA en 2011 puis liquidation judiciaire en 2014) et qui vit encore dans l’ombre du National 3 (ex CFA2) du District Côte d’Azur. La remontada pour reprendre une expression lancée par Pascal Dupraz lors de l’épopée du maintien du Toulouse FC en Ligue 1-risque d’être longue pour retrouver la lumière des projecteurs !

L’AS Cannes joue au féminin !

Ainsi donc l’AS Cannes possède son équipe féminine sénior comme aujourd’hui la plupart des clubs, j’ai failli écrire pro alors que le club est redevenu simplement amateur avec le statut d’association. Toutefois les personnalités qui composent le comité directeur interpellent. Ce sont des anciens joueurs professionnels issus de la « bordelaise connexion » : Johan Micoud, le président, Michel Pavon l’entraineur, et Bernard Lambourde, le responsable du sportif. Les deux premiers champions de France avec Elie Baup en 1999.Le troisième parti en Angleterre à Chelsea.

C’est le maire David Lisnard, amoureux de foot et du patrimoine du club, qui a fait appel aux anciens glorieux cannois pour sauver le navire en perdition. Seul Johan Micoud a répondu à l’appel et est devenu président au cours de l’été 2016.La mairie cannoise a mis tous les moyens en terme financier pour que le club fonctionne correctement ce qui a fait grincer quelques dents évidemment dans cette ville tranquille à la bourgeoisie surannée.

Un président très investi, selon Bernard Lambourde, très présent même alors qu’on le voit apparaitre très fréquemment sur l’écran de « la chaine l’Equipe » pour l’émission d’Olivier Ménard «L’équipe du soir». « Non, non détrompez-vous, ajoute l’ex défenseur central guadeloupéen, «  Yo-c’est son surnom-est très présent au club. Il est à Paris uniquement pour les matches de Champion’s League et de l’Equipe de France. Il assiste à toutes nos rencontres. C’est un vrai Président, très axé sur le terrain certes avec un rôle qui ressemble à celui d’un Directeur Sportif ». Un club champion de DH Méditerranée l’an dernier qui a donné accès à la N3 (cinquième niveau national) inscrit comme un autre  du championnat Corse-Méditerranée. A la lutte avec des clubs régionaux comme Marseille Endoume, Bastia, Villefranche sur Mer ou Gémenos, afin de revenir au plus haut niveau (ndlr : actuellement quatrième à 12 points d’Endoume). Histoire de rêver devant des photos défraichies au siège qui rappellent le glorieux passé.

B. Lambourde. Chelsea.

Les Féminines-Malgré la disparition du Centre de Formation devenu Centre de vie en 2016, vous avez encore une trentaine d’équipes à gérer ?

Bernard Lambourde-Nous avons trente équipes à gérer des U6 aux séniors. Il s’agit d’une association. On est là, Yo et moi, pour apporter notre savoir-faire d’anciens joueurs et amener nos équipes à progresser pour monter dans les catégories supérieures. On s’occupe exclusivement du sportif.

LF-Et entre autre, d’une section féminine ?

BL-Trois équipes féminines : une équipe première en district, une équipe U15 et les toutes petites.

LF-Et combien d’éducateurs pour ces équipes féminines ?

BL-Quatre. Deux pour les séniors avec des filles de cette équipe qui entrainent les toutes petites et un entraineur pour les U15.

Malheureusement, nous sommes descendus la saison dernière de DH, et ce qui me semble le plus difficile à mon sens, dans les catégories féminines, c’est la grande quantité de joueuses avec plein de facteurs différents. Elles ont du mal à s’inscrire dans la vie du club. Pourtant la section avait sa place à l’AS Cannes bien avant notre arrivée (ndlr : trois saisons auparavant) sans que personne n’en connaisse son existence. Ce problème faisant, c’est dur d’avoir une section féminine qui soit ancrée dans le club et qui appartienne réellement au club. C’est à nous aujourd’hui de faire en sorte qu’elle existe en quantité, ensuite en qualité, et le faire savoir à l’extérieur d’où la difficulté de recruter.

LF-Est ce que la proximité de l’OGC Nice, en tête du championnat de DH depuis dimanche dernier, ne vous fait-elle pas de l’ombre ?

BL-Oui, oui, ils nous font de l’ombre dans la mesure où cette année, leur souhait est de monter au niveau national(D2) ; toutefois, nous ne sommes pas encore sur ce créneau-là. On est moins sur la compétition. Nous savons fort bien que nous sommes moins compétitifs que l’OGC Nice. Ils ont un passé que nous n’avons pas avec une section vieille de dix ans et un centre de formation tout neuf. Nous ne jouons pas dans la même catégorie.

LF-Vous seriez alors, plutôt dans l’idée de posséder une section féminine parce que c’est dans l’air du temps sans ambitions particulières ?

BL-(Résolu) Ah, non pas du tout ! On est dans l’ambition. Moi, je suis dans l’ambition. Le souci que j’ai aujourd’hui c’est qu’en descendant de DH, beaucoup de joueuses sont parties en accompagnant les anciens coaches. Ces entraineurs mal intentionnés sont partis avec la moitié des filles. Sept joueuses. Et comme elles n’avaient pas un véritable « esprit club », elles sont parties comme ça.

Je constate que chez les filles, ce sont les amitiés particulières qui sont supérieures à l’esprit club. Elles mutent en « troupeau » (NDLR : Bernard Lambourde insiste pour les guillemets, car c’est juste un mode d’expression pour se faire mieux comprendre. On pourrait dire esprit grégaire).

LF-Elles sont parties dans un club ou en foot loisir, puisque vous évoquez 7 joueuses ?

BL-C’est ça !..En foot loisir.

LF-D ‘où la difficulté de trouver des joueuses à l’esprit compétitif qui veulent s’inscrire dans une compétition de longue durée ?

BL-C ‘est tout à fait çà

LF-D ‘après vos estimations, il vous faudrait combien de temps pour mettre en place une équipe compétitive avec les moyens associés pour grimper les échelons ?

BL-Je pense que dans le football féminin, cela peut aller assez vite. Mais je reviens sur notre priorité, c’est de se faire connaitre, faire savoir que nous existons et qu’elles peuvent venir pour se sentir chez elles au club. On a bien bossé cette année, et je pense que la saison prochaine, on sera en place pour arriver avec de l’ambition et espérer le haut niveau. Il faudra au moins encore trois ans.

Nous avons aussi bien compris lorsque nous étions en DH l’an dernier que c’est également une question de moyens.

LF-Et surtout prévoir un projet de vie associé au football pour attirer les jeunes filles car cela ne ressemble en rien au football masculin ?

BL-Oui, emploi ou fac. Trouver de ce fait des disponibilités pour les entrainements, car aujourd’hui je vois qu’avec les horaires de début de soirée pour des joueuses mères de famille, cela pose d’énormes problèmes car elles terminent le plus souvent à 22 heures. C’est vraiment plus complexe que les garçons.

LF-Si d’aventure, et je vous le souhaite, votre équipe féminine grimpe régulièrement les étages vers le haut et que d’une façon concomitante, les garçons montent en National voir D2, est ce qu’il n’y aura pas des arbitrages à faire par rapport au budget ?

BL-Ce que je vais vous dire n’engage que moi, les équipes féminines sont à l’intérieur du club mais c’est un groupement à part. On pourra à ce moment-là se positionner mais il n’y a aucune raison que l’on ne fasse pas l’effort nécessaire.

LF-Anny Courtade, ex présidente de la super équipe de volley du Racing Club de Cannes, double vainqueur de la Ligue des Champions(2002 et 2003), comme vice-présidente actuelle de l’AS Cannes football, c’est une compétence avérée, mais est-ce un regard sur le foot féminin ?

BL-C ‘est ce que l’on souhaite. Elle amène surtout son expérience en tant que femme du monde sportif. C’est plus qu’un regard d’ailleurs. Elle s’engage à fond dans la découverte d’un club de foot.  Elle s’est prise au jeu avec les hommes ; j’imagine qu’elle va plonger dans l’univers du foot féminin pour faire les choses correctement. Elle ignorait d’ailleurs que le club possédait en son sein une section féminine.

Aujourd’hui, elle est très présente et s’investit dans le club. Le foot n’est pas le volley, et elle se donne le temps d’observer et de bien voir pour apporter une contribution encore plus efficace au progrès du club.

Jean-Louis MORIN pour les féminines.fr