Léa Le Garrec (25 ans au 9 juillet), totalement motivée par la nouvelle stratégie de Corinne Diacre, a la tête sur les épaules. Au lendemain de son match face au Ghana (8-0) et après ses deux convocations sur les deux derniers rassemblements, la joueuse n’a qu’une idée en tête : « tout donner pour ne rien regretter ». Rien de surprenant quand on sait qu’elle a su bénéficier d’une blessure d’Ines Jaurena en septembre pour entrer en jeu, prouver son investissement en stage lui donnant le plaisir d’être rappelée en Octobre et de profiter de cette première titularisation pour trois sélections.

Un parcours unique pour une jeune joueuse passée de la D2F avec les Diablesses de Saint Malo (2014-2016), élue meilleure joueuse de D2F et décider, fin décembre 2016, avec l’accord de son club, de passer professionnel en janvier pour retrouver les couleurs de Guingamp (2012-2014) qu’elle avait quitté pour des raisons universitaires.

Aujourd’hui, épanouie dans son rôle de professionnelle, motivée par l’arrivée de Corinne Diacre, prête à faire les efforts pour aller chercher cette sélection en Coupe du Monde auxquelles toutes les filles vont postuler, elle répond à nos questions lors d’un long entretien téléphonique :

Lesfeminines.fr : quelle histoire ! Passer de la D2F à l’équipe de France féminine. Vous pouvez nous retracer les choix de votre parcours ? 

Léa Le Garrec : Tout simplement, j’ai toujours privilégié les études et le travail avant le football. A 18 ans, j’ai déjà pris une décision importante en quittant le PSG pour pouvoir poursuivre mes études. A l’époque, on nous proposait d’être professionnelle et pour moi, c’était compliqué. Si il m’arrivait quelque chose, reprendre des études à 25-26 ans, c’est complexe.

Pour terminer ma licence en immobilier, il a fallu que j’aille à Saint Malo
J’ai travaillé cinq ans dans l’immobilier. A Guingamp, je suis restée deux ans et j’ai obtenu mon BTS dans l’immobilier. Puis j’ai été prise dans une licence en immobilier mais à Saint Malo. C’est à une heure de Saint Brieuc. On s’entraine à Guingamp et comme on joue en D1F, c’est un entraînement tous les jours. C’est juste impossible. 

Pour terminer ma licence en alternance, il fallait que j’aille à Saint Malo. En tant que sportive de haut niveau, c’est difficile de trouver un employeur. Dans l’immobilier, on ne peut pas finir de bonne heure. C’est juste impossible. C’est un métier commercial. Il y a une entreprise qui s’appelle Square habitat qui travaille avec l’école qui est la seule entreprise qui m’ait fait confiance et qui m’a embauché malgré mes contraintes sportives. .

Cette agence n’était qu’à Saint Malo. C’était compliqué donc j’ai signé à Saint Malo en ayant un emploi là-bas. J’y suis restée deux ans et demi

Lesféminines.fr Entre choisir des études dans l’immobilier et un contrat au PSG, toutes les filles prennent le contrat pro ?

Léa Le Garrec. Tout simplement, ce que me proposait le PSG ne me permettait pas de vivre et, our moi devenir professionnelle à 18 ans, effectivement c’était un rêve mais je ne voulais pas le faire maintenant. Il me fallait quelque chose pour mon avenir. J’ai fait un BTS et une licence en alternance dans l’immobilier. Pourquoi l’immobilier ? J’ai toujours aimé cela sans raison particulière. J’adore la pierre tout simplement.

Mais c’est fini. Depuis le 1er janvier 2017, je suis professionnelle à Guingamp.

Léa Le Garrec à l'entraînement en Equipe de France. ENtre Grace Geyoro et Sarah Bouhaddi. Crédit fff.fr Lesfeminines.fr

Léa Le Garrec à l’entraînement en Equipe de France. ENtre Grace Geyoro et Sarah Bouhaddi. Crédit fff.fr Lesfeminines.fr

Lesfeminines.fr Quel changement cela vous apporte de passer professionnelle plutôt que de gérer un double projet ? 

Léa Le Garrec. On est plus concentrée au niveau de notre sport. Dans le double projet, on rentre fatiguée par les deux univers. En tant que professionnelle, on a des séances supplémentaires, plus de récupération, une hygiène de vie. Cela joue énormément notamment au niveau du stress du travail que l’on a pas.

Tout donner pour ne rien regretter
Il y en a qui sont capables de faire les deux cela dépend du domaine dans lequel elles sont, mais moi dans l’immobilier où il faut travailler les week-ends, cela n’était pas possible. Je me suis aperçu en fin de saison dernière qu’il fallait que je retrouve en D1F pour pouvoir peut-être toucher à l’équipe de France A

Le changement m’a fait progresser comme de retrouver le niveau de la D1F sans compter l’expérience en D2F qui m’a fait prendre des responsabilités dans le jeu. Je me suis endurcie car tous les week-ends, en étant sélectionnée en France B, on est attendue (2 à chaque rassemblement).

Et depuis que Corinne Diacre est arrivée, elle a totalement changé le discours dans l’EDF en faisant appel à des joueuses comme Lille et Guingamp. Avant, cela n’existait pas. C’est très motivant pour progresser. 

Lesfeminines.fr Est-ce que c’était une erreur avant de ne pas ouvrir l’EDF ou aujourd’hui est-ce un pari sur l’avenir pour Corinne Diacre ?

Léa Le Garrec. Honnêtement, je pense qu’avant c’était une erreur. En EDF, il prenait des joueuses qui ne jouait pas en club même si à Lyon, il y avait de la concurrence avec les étrangères. Mais les joueuses, même sans temps de jeu étaient quand même prises en EDF.

Pour moi, Corinne Diacre a fait le bon pari. Il faudra travailler mais on est toutes motivées pour cela
Alors que nous à Guingamp comme dans d’autres clubs, on est dans la difficulté tous les week-ends. Donc on a du temps de jeu mais aussi l’habitude de gérer la difficulté et dans un match international, on est forcément dans la difficulté. On a un temps d’adaptation bien plus court car on voit cela toutes les semaines.

Pour moi, elle fait un bon pari. Bien entendu qu’il va y avoir du travail après mais il faut aussi laisser du temps car on se connait à peine, on a jamais joué ensemble et il nous faut des matches pour trouver des automatismes.

Lesféminines.fr Comment allez-vous vous organiser pour vous améliorer ?

Léa Le Garrec. Son discours est très clair et je sais ce que je dois améliorer. J’en ai discuté vaguement avec elle mais j’ai aussi des échos.  Il faut travailler en club. Il va falloir que tous les jours à l’entraînement je sois dans l’intensité pour me mettre au niveau d’un match international qui n’a rien à voir avec un match de D1F. Il faut que je me crée des objectifs pour pouvoir rester dans la dynamique et continuer à être sélectionnée pour postuler à la Coupe du Monde.

Tout le monde est concerné et tout le monde a envie de prouver.

Lesfeminines.fr Comment vous vous situez par rapport aux autres sélectionnées ? 

Léa Le Garrec. Je me dis qu’il y a du travail pour être encore plus performante. C’est encourageant car j’ai aussi du temps et j’arrive à un âge où on devient  meilleur. Aujourd’hui, je ne suis pas prête. J’ai joué le Ghana, c’est une bonne équipe mais ce n’est pas l’Allemagne. Il reste un an et demi à travailler pour donner le meilleur.

Lesfeminines.fr Guingamp est le bon club pour s’améliorer !

Léa Le Garrec. Oui. Tous les clubs professionnels se sont beaucoup professionnaliser. Maintenant, on a des lacunes sur les déplacements. Tous les week-ends, on se déplace en bus. Il reste des points à améliorer. C’est frustrant car on est là pour gagner des matches.

Lesfeminines.fr Pour ce retour en D1F début Janvier 2017 ! Au final, quel parcours.

Léa Le Garrec. Je me suis toujours accrochée et on a toujours cru en moi aussi. J’ai cru en mes qualités. Donc tout peut arriver.

Pour l’instant, je profite et je prends ce qu’il y a à prendre. Je ne me pose pas de questions. Je vis au jour le jour. J’ai accompli mon rêve d’aller en A et je vais tout donner pour y rester et être en EDF jusqu’à la fin de ma carrière. Il ne faut pas avoir de regrets.

Merci Léa Le Garrec.

William Commegrain lesfeminines.fr