Le football féminin est fait avec des partenaires.

Jeudi en en fin de journée, j’étais à Bondoufle pour voir le Président d’une grande société de l’Essonne ESG, signer un partenariat avec le FCF Juvisy-Essonne pour l’intégration professionnelle d’une joueuse de l’équipe de France, Anaig Butel, qui confirmait son entrée dans son groupe.

L’économique n’est pas si éloigné du sportif quand il en a les moyens et le retour.
J’ai aimé écouter le Président du Directoire dire que la joueuse allait pouvoir faire plusieurs découvertes de métiers au sein du groupe afin de prendre le temps de bien choisir son avenir. J’ai trouvé que c’était une bonne idée. Il faut dire que ledit groupe a 2000 salariés. C’était une bonne solution pour elle.

Le football féminin se crée aussi ainsi, en établissant des passerelles entre l’environnement professionnel futur et la performance sportive dès lors que le tissu économique peut supporter les absences et aménagements d’horaires, sans contrarier les opportunités d’évolution professionnelle future de la joueuse.

Le football féminin se crée d’abord à l’entraînement

Un peu avant, les féminines venaient de s’entrainer et cela m’a permis de voir l’élite de Juvisy dans un six – six en prévision du match en retard face à Montpellier qui se profilait à l’horizon

Voir un entraînement, c’est comprendre plein de choses d’un club et d’un coach. On devrait rendre les entraînements publics. C’est souvent le cas en football masculin ; cela intéresse moins de monde en football féminin.

Si le vestiaire a sa vérité ; l’entrainement en est aussi une des sources. Terrain privilégié entre staff et joueuses.
La fois dernière, je m’étais fait sortir par la sécurité de l’équipe du Canada qui m’avait, gentiment mais fermement escorté jusqu’à la porte de sortie du stade, me confirmant que l’entraînement était à huis clos. Impossible pour moi de jouer au français qui ne comprend pas l’anglais ni le canadien. J’avais affaire à une sécurité française et, pour un court instant, j’ai eu l’idée de m’essayer à un accent canadien pour entériner l’idée d’une appartenance lointaine à l’équipe des « Rouges et Blancs » mais le discernement propre à l’expérience m’a fait oublier cette idée, pour attendre patiemment mon tour.

Voir un entraînement et comprendre. C’est l’idée qui me revient trois jours après et je comprends maintenant ce que veut dire un entrainement à huis clos.

Les féminines s’entrainent à l’opposé des garçons.

Allez voir des professionnels s’entraîner en fin de saison et vous aurez l’impression légitime que tout le monde peut faire ce métier ; sauf si vous allez plus loin dans la découverte et que vous vous rendez au stade pour voir la capacité athlétique qu’il faut aujourd’hui pour être sur un terrain. En dehors de l’aspect technique.

Je comprends un peu mieux la raison pour laquelle les féminines françaises sont en pleine amélioration. On est à Juvisy, 3ème club français après l’Olympique Lyonnais et le Paris Saint Germain ; avec certaines filles de l’équipe de France qui sont classées 3ème mondial.

A l’entraînement, en fin de saison, les garçons tapotent le ballon ; les féminines jouent au ballon.

Les filles sont dans le jeu ; elles s’investissent pour réussir l’exercice.
Il s’agissait d’une opposition six contre six et la finalité était d’enclencher le maximum de tirs, à bon escient, sur un demi-terrain long d’une quarante de mètres. Les joueuses étaient donc en configuration serrée avec devant elles, à chaque fois, un ou plusieurs adversaires. Les tirs partaient à la moindre occasion, venue du plus loin, avec Kadidiatou Diani qui a envoyé un exocet gagnant de 25 mètres pour manifester son plaisir d’être prise en sélection ; Amélie Coquet qui a signé une transversale lobée qui est tombée à 2 mètres des buts ; Sandrine Bretigny qui a repris de volée un centre de la droite pour la prendre, plein pied quand la volée est souvent prise légèrement extérieur ; la gardienne remplaçante que l’on voit rarement à l’œuvre en match qui sort d’une balle claquette une balle qui va au minimum sur la transversale ; et Julie Machart qui décolle toujours quand elle envoie un missile cadré.

On ne peut pas parler d’une joueuse qui ne joue pas en match avec précision si on ne voit pas les entraînements.
Le jeu va à gauche et droite, ressort toujours proprement, se perd dans quelques profondeurs que la défense adverse récupère puis la relance, construite aussi vite, part dans l’autre sens.

Les filles sont en pleine forme physique et on comprend ce que le mot implication veut dire. Pascal Gouzènes, le coach regarde tous les mouvements, il soupèse, juge et lance des compliments comme des directives.

Les filles sont autant dans un match que dans un entrainement. Elles fournissent un effort et sont investies du travail demandé. Une forme de réalité se prononce. Je constate une vérité.

On ne peut pas parler d’une joueuse qui ne joue pas en match avec précision si on ne voit pas les entraînements. C’est évident. Et en même temps, on s’interroge sur la capacité délicate de voir des phases d’entraînements se retrouver en match.

Et on se dit que lorsque la double alchimie se produit (même qualité à l’entrainement qu’en match), c’est quelque chose plutôt de rare ou alors quelque chose de parfaitement maitrisé qui doit donner un sentiment de fierté à la joueuse, au staff technique et médical.

L’observateur d’un match ne voit que la partie visible du jeu et pourtant sa vérité ; la partie immergée de l’iceberg est plus camouflée. Elle fait partie de l’univers des joueuses et du groupe. Elle est non négligeable.

Une journée en retard qui fait jouer les 3ème, 4ème et 5ème du championnat impliquant le 10ème et premier relégable. 

Pour avoir vu comme d’autres l’entraînement du Paris Saint Germain, je sais que la description que j’ai transcrite est souvent la même dans tous les clubs de l’élite. La même implication au jeu du côté des féminines.

Pour ce dimanche, les deux matchs en retard propose aux 3ème Juvisy, 4ème Guingamp et 5ème Montpellier de peaufiner leur position, voire de les interchanger pour un challenge qui, s’il n’a pas d’incidence européenne est très important dans le monde du football féminin.

Etre 3ème ne veut pas dire la même chose qu’être 5ème. Et si le 5ème passe 4ème, alors il sauve sa saison. Ne parlons même pas du 4ème qui pourrait se positionner en 3ème.

C’est l’enjeu de ces rencontres. un play off avec plein de conséquences pour des féminines qui se connaissent par cœur.

Juvisy Fcf, Guingamp Ea, Montpellier Hsc jouent pour un petit jeu de chaises musicales qui a son importance dans le milieu du football féminin.
Montpellier (5ème, 54 pts) reçoit Juvisy (3ème, 61 pts), après l’avoir battu en Coupe de France au stade des quarts de finale et auréolée d’une belle finale perdue face à l’Olympique Lyonnais après avoir mené au score (1-2). Juvisy vient pour prendre les quatre points de la victoire avec quatre joueuses directement sélectionnées pour le Canada et une cinquième qui pourrait tout autant y entrer en cas de blessures face à Montpellier qui présente moins de sélectionnées, mais plus de « réservistes ».

La semaine suivante, les deux équipes se retrouvent cette fois à Bondoufle, pour le match retour (21 journée)

Metz (10ème, 32 pts et premier relégable) reçoit Guingamp (4ème, 55 pts) pour essayer de trouver les derniers espoirs d’une saison qui a montré toute la difficulté des équipes montantes, même renforcées, à se maintenir en D1 notamment quand elles rencontrent successivement Lyon et le Paris Saint Germain. Quoi qu’on en dise, on se relève difficilement de scores trop lourds et ces équipes, comme Muret une année, ne peuvent reprendre leur souffle aussitôt après, augmentant l’impact des lourdes défaites avec un écart creusé face ses concurrents directs qui devient trop lourd à gérer.

Guingamp a eu le même calendrier avec les deux ténors du championnat à jouer immédiatement mais, avec une équipe déjà formée à travailler ensemble, les bretonnes ont pu prendre les points nécessaires juste après pour se créer une dynamique positive, jusqu’à éliminer le Paris Saint Germain en Coupe de France et se positionner à la 4ème place du championnat.

Les bretonnes viendront pour gagner et ne voudront pas laisser la 4ème place à Montpellier qui les suit avec un point en retard.

Ces deux matches donneront « le la » du classement de la D1. Ils seront joués pour être gagnés. les filles s’entrainent à cela. Pour ma part, je l’ai vu. je suis certain qu’il en est de même sur les terrains de la D1. Rien d ‘exceptionnel, juste l’envie de travailler.

Vous voulez vous faire une idée plus précise du football féminin ? Allez de temps en temps au entraînements de l’élite.

William Commegrain