Difficile de faire un bilan de cette demi-saison 2017-2018. Le football féminin semble repartir sur de nouvelles bases sans proposer de vérités ni de contre vérités. Coincé entre un objectif fixé qui pourrait s’avérer bien trop dimensionné (gagner la Coupe du Monde à domicile) mais qui reste logiquement à portée dès lors que les matches ne se jouent pas avant une compétition mais pendant (7 juin – 7 juillet 2019).

A la réflexion, la bonne surprise de ces quatre mois de football est le transfert réussi de kadidiatou Diani au PSG. Durant le match face à l’Olympique Lyonnais, elle nous a montré qu’elle avait mis un autre costume : celui de la certitude, proche d’une cadre déterminante dans le jeu des parisiennes.

Kadidiatou Diani, prête à poindre au plus haut niveau. 

Kadidiatou Diani, 22 ans, joue au football féminin dans une équipe de filles. Pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit du Paris Saint Germain, quatre fois vice-championnes de France (2013-2014-2015-2016) et un titre de Coupe de France en 2010. Au plus haut niveau depuis qu’elle a 16 ans pour un total de 85 matches en D1F et déjà sa huitième saison en D1F.

Pourtant, cette joueuse est incroyablement discrète. Elle ne recherche pas les twittos sur les réseaux sociaux, elle ne court pas après des instagrams qui mettent en valeur chacun de ses gestes. Elle joue au foot comme on en fait un métier. Normalement, la tête sur les épaules pour savoir ce qu’elle peut faire et où elle peut le faire. 

Championne du Monde des U17 en 2012. De cette génération qui a donné le premier titre au football féminin de la fédération française de football. Titrée lors d’une compétition qui commençait juste son histoire (3e édition). Face à des coréennes du Nord (1-1, 7 tab à 6) qui carburent à une régime très militaire, c’est avec les équipes de France des jeunes qu’elle a appris à soulever les Coupes. Championne d’Europe U19 2013. Médaille de bronze au Mondial U20 2014.

Sélectionnée au Mondial 2015 des A et aux JO de Rio 2016 dans le groupe des 23 et 18 brésilien avec Philippe Bergerôo (12 sélections). Reprise par Olivier Echouafni en 2017 (11 matches) pour l’Euro gagné par les Pays-Bas. On peut se demander ce qu’elle a raté comme sélection depuis ses 17 ans ? Aucune. Juste une petite frayeur de ne pas être prise en 2016 par Philippe Bergerôo avant le ShebelievesCup pour deux sélections oubliées. Et maintenant le train est pris.

Un transfert vers le Paris Saint Germain.

Une sacré surprise ce changement de maillot. D’abord, les transferts (rachat de contrats) sont très rares en football féminin. Et puis, vers le Paris Saint Germain, le club voisin qui n’a jamais reçu de joueuses juvisiennes. On ne quitte pas facilement l’église du football féminin.

En effet, elle a fait toute sa carrière à Juvisy avec notamment un superbe but en demi-finale de la Ligue des Champions 2013 face à l’OL pour en partir en 2017 (7 saisons passés) car elle avait certainement décidé de se tester plus haut. A part l’OL où la concurrence est rude. Avec peut-être Montpellier où le nombre de jeunes attaquantes est très conséquent, il restait le Paris Saint Germain qui lui faisait visiblement les yeux doux où l’international. 

C’est le PSG qu’elle choisira. Pourtant, Patrice Lair, en 2017 n’est plus qualifié en Ligue des Champions. Il y a, là, une part de risques.

Difficile de savoir ce qui a profondément motivé ce déplaçement si court en kilomètres mais innovateur sur le plan de l’image, pour être la première « juvisienne » à passer de l’autre côté. Difficile de résister à une offre financière ? Certainement. On a le sentiment que cette joueuse sait depuis longtemps qu’elle est joueuse professionnelle et qu’à ce titre, elle doit intégrer dans ses choix, l’ambition, la rémunération et la performance. Globalement, cela pourrait être le projet d’un club qui a buté trois fois, la saison dernière, face à l’Ol mais dans les plus grandes sphères européennes du football féminin (championnat, Coupe de France et Coupe d’Europe).

Il faut dire aussi que Juvisy montre les limites de son système, les épaules affaissées par les nouvelles contraintes du football féminin qui salarient les joueuses sans avoir en face de garanties de recettes – plus à imaginer qu’à encaisser -. Paris sur ce plan, apporte de vraies garanties que le Paris FC, nouveau partenaire essonnien, ne peut assurer et garantir. 

Une réussite et une joueuse qui a une influence dans le jeu parisien.

A Paris, elle est devenue titulaire sans contestation (12 matches, onze titularisations) sur le coté droit de l’attaque. Cela parait simple mais ce n’est pas si évident avec une cohorte d’internationales qui se proposent et peuvent donner des solutions tactiques à Patrice Lair où inévitablement, des filles se retrouvent sur le banc. En Equipe de France, elle l’était devenue progressivement, faisant constater à Elodie Thomis que la relève devait vivre sa vie.

Le régime parisien a ses lettres de noblesse avec une Laure Boulleau, Sabrina Delannoy et Jessica Houara d’Hommeaux venues aux lumières de l’Equipe de France après la professionnalisation. Une incursion d’Aminata Diallo sur le récent et l’explosion l’an dernier d’Eve Perisset.

Son match face à l’Olympique Lyonnais (1-0, 11e J) pour une première place potentielle a été époustouflant de présence et de détermination. Je ne l’avais jamais vu aussi volontaire à se projeter vers l’avant dès que la balle était dans ses pieds. Ses partenaires la cherchait continuellement pour qu’elle projette le jeu parisien. Sa volonté crevait l’écran. Cette nouvelle envie associée aux qualités défensives qu’elle exprimait depuis plus d’une année en EDF en fait une joueuse au potentiel du top mondial.

Il lui manque l’efficacité (3 buts en championnat, 2 en sélections) et le choix instinctif, dans l’instant, de faire l’action qui va bien au moment ou elle va bien. Elle n’a que 22 ans.

Pour la Coupe du Monde 2019, au régime PSG avec ses obligations de performances, elle pourrait être la joueuse offensive française.

Cette joueuse est un indicateur flagrant de l’amélioration et de l’évolution d’une jeune joueuse avec ses qualités, vers une joueuse au potentiel mondial qui peut faire très mal à l’adversaire. Il faut du temps pour être « un standard » au plus haut niveau chez les filles. Il faut du temps pour passer la barre des américaines et des allemandes. 25 ans paraît être le bon âge.

La France en aura beaucoup en 2023 et 2024. Il va lui en manquer en 2019.

William Commegrain lesfeminines.fr