Soyaux, Albi, Rodez et maintenant le FC Fleury Coeur d’Essonne. On leur promet toujours le pire en début de saison, mangés à la sauce de l’argent des clubs professionnels masculins,  mariés depuis peu avec les clubs féminins quand l’amour du foot féminin  se trouve là ; où seulement amant d’une ou plusieurs saisons dès lors que l’habitude dénude les vérités et que rien n’existe plus pour les fantasmer.

La descente et Basta ! Voilà le programme officieux fédéral. Cette déclaration d’amour au clubs professionnels masculins ; les clubs amateurs n’en veulent pas. A tort ou à raison. Peu importe. Ils se battent pour cela, sachant que la vérité des mots ne possède qu’une seule vérité : celle des points à la fin de championnat. A ce jeu précis du comptable, ces clubs amateurs savent précisément comment garnir leurs bourses et à quel moment, il faut la remplir. Quitte à y laisser son dernier souffle. Tout simplement, pour survivre.

Ainsi, en 2017, ce sont bien les Vertes (dites Amazones) qui ont pris l’ascenseur de la descente (ex-RC Saint-Etienne) poussées dans les dernières minutes par les Girondins de Bordeaux, sauvées par leur match nul face au PSG (2-2) lors de la dernière journée, tout juste mariées en 2016 à Blanquefort. Suivies par le FC Metz (ex-Algrange), pris dans le phénomène de l’ascenseur depuis trois saisons « je monte, je descends, je remonte et je redescends ».

En interrogeant Sébastien Joseph, le nouveau coach de Soyaux qui avait quitté Rodez en fin de saison pour une vision plus centrée sur le football que le club de l’Aveyron ; on a une idée de ce qui doit être les conditions de la réussite du maintien en D1F.

Une mobilisation collective de tous sur le maintien.

Le premier mot que je retiendrais de notre échange d’une vingtaine de minutes : « la cohésion du groupe. L’envie d’être ensemble ». Sébastien Joseph, pour sa troisième année ou quatrième année en tant que coach de football féminin, ne le dira pas comme une vérité. Dès le début de la conversation. Mais comme une conclusion. Un ensemble de faits et de vie qui doivent se terminer par cette vérité. Un groupe qui se bat ensemble, pour un projet commun, partagé différemment mais avec la même volonté par tous. Sébastien Joseph, dans son avant-saison, travaille particulièrement cette notion.

La mobilisation ne concerne pas que les joueuses et le staff. Ils sont des ingrédients au parfum le plus fort mais le plat n’est alléchant que si l’ensemble du club est tourné dans la même direction. Et lorsque je pose la question au coach de son plaisir d’être dans une structure qui a adhéré à sa cuisine particulière, il répond : « c’est un vrai plaisir de voir que les idées que nous formulons trouvent leurs échos, soit parce que les partenaires adhérent au projet et libèrent les joueuses, soit parce que la direction du club et l’ensemble des services intègrent l’idée de manière positive et la mettent en place pour qu’elle réussisse. » 

Sébastien Joseph. Coach ASJ SOyaux Charentes participe à un jeu d'équipes. Crédt ASJ Soyaux Charentes. Lesfeminines.fr

Sébastien Joseph. Coach ASJ SOyaux Charentes participe à un jeu d’équipes. Crédt ASJ Soyaux Charentes. Lesfeminines.fr

La seconde condition pourrait être la concurrence. 

Il y a douze clubs qui sont en D1F. Deux montants (Le Losc et le FC Fleury Coeur d’Essonne) et « dix anciens » avec un  trou significatif en terme d’expérience après l’Olympique Lyonnais, Montpellier, le Paris Saint Germain et le Paris FC (ex-Juvisy-Essonne).

Sébastien Joseph, a comme tous, vu que « tous les clubs se sont renforcés avec des joueuses de D1F, promettant une saison qui sera très homogène et relevée par le haut ». 

Par contre, il se garde bien de mettre en valeur plus un club qu’un autre. Et lorsque je lance le débat sur les Girondins de Bordeaux qui ont fait bien plus que ce qu’ Ulrich Ramé m’avait soufflé après le match du maintien à Charlety, le coach charentais pratique la langue de bois qui convient : « une bonne équipe qui s’est bien renforcée et qui devra lutter pour le maintien comme nous ». Peu importe, le (3-0) subi en match amical. Sébastien Joseph sait très bien qu’il y a une différence incroyable entre le monde amical et celui des trois points à prendre.

La saison dernière, Guingamp avait craqué sur un sévère 7-1 face à Juvisy pour, lors de la première journée, prendre les trois points à domicile et plonger les essonniennes dans le trou d’une saison faite « d’un grand huit » replaçant le club de l’Essonne comme un club qui possède des joueuses avec une activité professionnelle, jouant de plus en D1F.

La concurrence est plus relevée, c’est une évidence. Vient donc la question de la tactique ?

L’Euro a-t-il été un enseignement pour le coach charentais ? 

La réponse fuse. « j’ai particulièrement apprécié l’Autriche avec une volonté défensive commune qui a montré une voie intéressante ». La 24è nation FIFA en demi-finale européenne avec deux blocs qui ne lâche rien et une avant-centre qui possède un mental de central, jouant tous les ballons comme on les joue au rugby n’a laissé personne indifférent ! Quand vous jouez votre championnat comme un match de Coupe, avec l’effet couperet pas loin de souffler ! L’Autriche et l’Euro vous interpellent d’autant plus que la descente n’est plus la garantie d’une remontée. Plus que de vous interpeller, cela ne peut que vous faire réfléchir.

Fait-il posséder la joueuse idéale en avant-centre. Au combat et en utilisant l’impact, douée d’une intelligence rare pour ne pas sortir de ce rôle limitée mais utile et conservant la lucidité pour être, même seule face à quatre défenseures, dangereuse et présente. La médaille de la combattante quand Vivianne Médiéma lui a donné une dimension supplémentaire. Celle du titre européen.

Puis, Sébastien Joseph retient « le Danemark, avec ce jeu enlevé et direct qui lui a permis d’aller en finale ». En fait, dans ses choix, peu de surprises. L’Euro aura montré qu’il est maintenant possible de gagner en luttant et l’équipe de France des U19 en est la parfaite illustration, avec sa qualification en demi-finale européenne.

La lutte est payante. Soyaux a des armes. 

Les Charentaises, illustrent club de D1F féminine, et maintenant les seuls a être exclusivement féminin au plus haut niveau possède des clés qui sont souvent celles du maintien. Sébastien Joseph connaît son effectif sur le bout des doigts et j’ai droit à l’intégralité de l’énoncé des performances de ses joueuses, « d’une moyenne d’âge de 23 ans », avec la quasi-intégralité de l’effectif de l’an dernier au quelle a été rajouté des nouvelles têtes pour l’améliorer au niveau des points faibles qu’il a noté avec son staff.

Soyaux et donc une équipe jeune mais expérimentée en D1F avec un club tourné exclusivement vers la performance dans le football féminin. Cela compense souvent le déficit d’argent pour décider des deux clubs à descendre.

Reste la question qui interpelle. Pourquoi aucune internationale dans ces clubs ? 

Dès que vous sortez des U20, toutes les internationales A semblent tirées des équipes du Top 3 français avec, pour certains coaches, une source forte fédérale qui privilégierait la proximité parisienne par rapport à celle de province. Jean-Louis Saez, avec son humour méditerranéen, ne manque pas de le rappeler quand il a si peu de sélectionné au regard de la performance de son club (2è du championnat). L’Olympique de Marseille ne dit rien à cet égard, pourtant 4è et sans sélectionnée pour l’Euro 2017 quand Juvisy, auteure de la plus mauvaise saison de son histoire, en comptait quatre.

Comment ces clubs peuvent-ils survivre si, à la proximité d’un talent qui pourrait encore plus éclore, on ne leur donne pas ce coup de pouce qui ne pourrait que les aider, privilégiant l’habitude et la proximité, alors que le confort d’une liste de vingt trois offre d’autres possibilités à tout sélectionneur ?

Qu’en pense Sébastien Joseph. Sa réponse est claire. Il a bien une joueuse qui mériterait bien plus d’attention. « Laura Bourguoin, 24 ans, auteure d’une dizaine de buts par saison, ce qui montre la régularité de sa performance, mériterait d’être vue au plus haut niveau. » Pour cela, faudrait-il qu’elle aille à l’OL, au PSG, à Montpellier ou à Juvisy pour postuler prenant la place d’une jeune en devenir, condamnée à porter un maillot sans temps de jeu.

Guingamp avait posé la question en 2014. L’équipe de France des U20 était partie « le lendemain » avec 8 filles de Guingamp de mémoire au Mondial 2014. Revenue bronzée, qui est titulaire en D1F ? Il faudrait demander à Seb de footofeminin.

Voilà des extraits de notre conversation traitée autrement qu’en rendant compte de la respiration de chacun des mots d’un coach, que je me plaisais à retranscrire pour que chacun se fasse son opinion. Là, on se trouve face à un compte rendu plus dirigé. On verra avec le temps son intérêt.

Il reste un point que j’ai voulu développer avec le coach de Soyaux. L’ouverture à plus de clubs en D1F. De mon avis, 12 clubs ne correspond plus aux effectifs des joueuses féminines et condamnent les jeunes joueuses qui sortent de la formation française à ne plus jouer au plus haut niveau ou à partir à l’étranger (pour l’instant faits de nombreux échecs). Je pense qu’il faut ouvrir le championnat à 14 clubs voire à 16, si on veut que les jeunes trouvent du temps de jeu en D1F. Je propose 16 à Sébastien Joseph. Il ramène à 14 en parlant de niveau et de problèmes budgétaires.

Je réponds que les jeunes feront d’autres choses si elles ne jouent pas.

Je terminerais en disant que certains ou certaines ont planté une génération exceptionnelle en terme de titres mais qu’elle s’y est retrouvée en terme d’argent. Par contre, l’habitude de quarts de finale répétitifs et d’une concurrence plus dynamique, font que pour la génération suivante, moins qualitative ; elle prendra de plein fouet l’impact d’une dévalorisation si rien n’est fait pour qu’elle joue au plus haut niveau et qu’elle nous surprenne. Surtout, qu’elle nous surprenne.

Le problème des filles n’a jamais été la découverte. Cela a toujours été l’habitude.

William Commegrain lesfeminines.fr