Corine Petit vient de re-signer pour une nouvelle saison avec l’Olympique Lyonnais. L’arrière latérale au 89 sélections et 11 buts en équipe de France a porté le maillot des Bleues de 2003 (France-Chine) à 2014 (France-Australie) pour ne plus être appelée par Philippe Bergerôo et sentir que Gérard Prêcheur ne lui donnait plus réellement sa chance ensuite (2015-2017).

Ce qui m’a interpellé dans le parcours de la lyonnaise, d’origine charentaise, c’est le message fort qu’elle a posté : « Reynald Pedros m’a dit qu’il comptait sur moi ! » à sa signature pour une nouvelle saison. Pour l’avoir souvent vu jouer en équipe de France, cette joueuse a un vrai mental lié à la performance (9 titres de championnes de France, 6 Coupes de France, 4 ligue des Champions, 2 finales européennes) et j’ai immédiatement pensé qu’elle pourrait revenir au plus haut niveau, car présentant des qualités rares dont une : la taille.

Lorsque l’on sait que Carli Lloyd a été élue meilleure joueuse du monde a 33 et 34 ans, on se dit que dans un grand club, ces filles ont quelque chose que les autres n’ont pas. Corine Petit a des atouts pour apporter de la concurrence en Equipe de France.

Lesfeminines.fr Pouvez vous retracer votre parcours ?

Corine Petit. J’ai joué à partir de 14 ans en D2 à la Rochelle et puis après, j’ai signé en 2001 à Soyaux  (D1F) où je suis restée sept saisons et je suis allée en 2008 à Lyon. J’ai démarré très jeune bien qu’il n’y ait rien dans ma famille qui préconisait cela avec un frère qui était très rugby ! J’allais juste jouer avec mes copains et j’étais un vrai garçon manqué.

Lesfeminines.fr La période lyonnaise a été excellente !

Corine Petit. C’est l’aboutissement d’une carrière avec des titres et des choses que l’on n’oubliera jamais, des rencontres. Ce n’est que du positif.

Lesfeminines.fr Quels sont les grand moments d’une carrière qui justifient de tout le travail réalisé ?

Corine Petit. Les titres car si on y réfléchit bien, il y a aussi beaucoup d’inconvénients par rapport à la vie d’à côté. Des choses que l’on rate avec la famille et les ami.es. Quand on gagne des titres, cela fait oublier tout cela et on sait pourquoi on se lève tous les matins pour aller courir sur un terrain. Après, je pense que c’est surtout lorsque l’on s’arrête que l’on se met à penser que les titres, c’était beau mais aussi la vie des vestiaires et les personnes que l’on a appris à connaître resteront de grands moments.

Lesfeminines.fr Quand on compare avec une vie en entreprise, vous vivez tout le temps avec les mêmes personnes, cela peut être frustrant !

Corine Petit. Frustrant non. C’est particulier. Nous avons appris depuis notre plus jeune âge à gérer cela. Je vois plus mes coéquipières que ma famille, c’est comme cela. Après, on arrive à trouver des moments pour nous mais c’est sûr que l’on passe beaucoup de moments ensemble avec les déplacements et les entraînements quotidiens.

Lesfeminines.fr Quelle est la joueuse à Lyon qui vous a le plus impressionnée ?

Corine Petit. Sur l’ensemble de la carrière, je dirais que Camille Abily, c’est une sacrée joueuse et une personne parfaite. Une vraie bonne personne. En tant que joueuse, Dszenifer Maroszan, l’Allemande. Avec ses pieds .. c’est vraiment impressionnant. A côté, elle est calme et agréable. Je l’adore ! Après, on parle tout le temps de techniques et d’offensives donc ce sont les deux qui me viennent à l’esprit. Si on prend défensivement, Wendie Renard (26 ans), c’est quelque chose ! Elle vit football, elle est passionnée. Elle a déjà réussie mais elle va faire une très longue carrière pour moi.

Lesfeminines.fr Comment définiriez-vous la performance ?

Corine Petit. (Réflexion). Performer, c’est réussir quelque chose pour moi. Après, il faut se donner les moyens. Le travail permet la performance et c’est tout un ensemble. Ce n’est pas sur un jour, c’est plein de petites choses qui font que l’on réussit une carrière. Gagner un titre ne suffit pas à avoir une belle carrière, ce sont tous les à-côtés. Comment les gens nous perçoivent en tant que professionnelle ? Sur et en dehors du terrain.

Lesfeminines.fr La confiance est essentielle dans la performance ?

Corine Petit. Enormément. On le voit avec la confiance que peuvent donner les coaches à certains moments. Après certaines personnes arrivent à passer au-dessus de tout et ont une confiance extrême en elle. Ce n’est pas tout le temps le cas. On peut essayer de le montrer mais ce n’est pas le cas. D’autres ont un manque de confiance et il faut que les gens autour d’elles l’entoure bien. La confiance, c’est primordial. Trop, ce n’est pas bien. Qu’il n’y en ait pas, ce n’est pas bien. La confiance, c’est très important pour un sportif de haut niveau. Il faut être sûr de soi tout en connaissant ses limites pour pouvoir y pallier et faire attention au moment où on entre dans ses limites et dans les petits défauts que l’on peut avoir. La confiance et se connaître sont deux éléments clés du sportif de haut niveau.

Lesfeminines.fr J’ai souvenir de votre fameux tacle du bout du pied ! C’est un geste de confiance.

Corine Petit. Pour moi, si je le fais, je sais que cela va marcher. Maintenant, certainement que je me suis loupé des fois mais c’est comme pour Louisa Necib qui fait un geste technique complètement fou. Pour elle, c’est le plus simple et le plus naturel. On se connait et on sait qu’on est capable de le faire au moment où il faut le faire. Des fois, on saute, mais on essaie de trouver le geste opportun au bon moment.

Lesfeminines.fr. Une petite question sur Lyon. De l’extérieur, c’est une église. Le vatican ! Comment voyez-vous Lyon de l’intérieur, car cela a l’air d’être très fermé de l’extérieur !

Corine Petit. On voit cela comme une petite famille. Quelque chose que l’on a bâti depuis des années et qu’on essaye de garder tout en haut et c’est le plus difficile. On est des joueuses encore en nombre assez importantes, qui sont là depuis des années et c’est vrai que ce qu’on a réussi à faire, on a envie de le garder. De montrer l’état d’esprit lyonnais qui est important aux nouvelles et aux plus jeunes et que cela soit vraiment, comme vous le dîtes,  une forteresse avec une âme. Que cela soit beau pas uniquement sur le superficiel mais aussi avec quelque chose à l’intérieur.

Quand je suis arrivée, ce n’était pas un club que je supportais et on se prend au jeu et cela devient une grande famille. C’est vrai que l’on essaie de faire passer « cet amour du maillot », le rouge et bleu. C’est vrai que c’est un élément important car lorsque l’on joue pour un maillot avec des valeurs, cela fait un plus quand tu joues.

Lesfeminines.fr L’équipe de France, ce n’est pas quelque chose qu’il faut retirer de l’esprit car la meilleure joueuse du monde avait 33 ans en 2015. Que retenez vous de l’équipe de France ?

Corine Petit. C’est une fierté. Tant que je n’aurais pas arrêté le foot, je l’ai encore dans la tête. C’est un rêve que d’arriver à être en EDF et participer à de grandes compétitions. Ces deux dernières années, c’était plus difficile pour moi avec moins de temps de jeu en club mais je travaille chaque jour pour être performante et physiquement, je suis bien. Mon corps ne me dit pas d’arrêter alors que je me donne toujours à fond.

Après le choix du coach est là. Dans le sport, la sélection c’est comme l’arbitrage : on ne peut rien faire et il faut tout faire pour que cela tourne en notre faveur.

Lesfeminines.fr Quels sont les matches les plus significatifs ou les voyages que vous avez fait avec l’EDF (89 sélections) ?

Corine Petit. L’équipe de France prenait une place importante dans mon quotidien. Après le plus grand événement, cela reste la coupe du monde en Allemagne (2011). Cela a été un des grands moments qui a lancé tout cela (développement du foot féminin). L’importance de la compétition, des stades pleins de 50.000 personnes à chaque match. On a été loin et personne ne nous attendait. Cela a vraiment été le gros truc. C’était magique ! Grand ! Après malheureusement on n’a pas été au bout mais c’était la première compétition où on faisait quelque chose avec, sur le plan de l’émotion, une qualif aux tirs au but. C’était vraiment un bon moment.

Lesfeminines.fr Vous avez rencontré les grandes nations. Quel est votre ressenti ?

Corine Petit. Les grandes équipes sont impressionnantes. Les Etats-Unis, l’Allemagne. Physiquement, plus pour les allemandes ; et chez les américaines, si elles étaient impressionnantes physiquement, c’est vraiment dans la tête qu’elles faisaient la diffiérence. Elles n’ont pas honte de dire qu’elles sont les meilleures et qu’elles veulent tout gagner. C’est une chance pour Elles. Cela leur a apporté des choses. Ce sont les deux grandes nations qui sont un peu au-dessus.

Lesfeminines.fr C’est ce que vous avez trouvé à Alex Morgan ?

Corine Petit. On sent que c’est une américaine. Qu’elle a cela en Elle et qu’elle veut gagner, se montrer et réussir. C’est truc purement américain je pense.

Lesfeminines.fr Vous n’avez pas eu beaucoup de blessures.

Corine Petit. J’ai eu un croisé, il y a longtemps. Après cela va. Je touche du bois et je fais attention car il est important que le corps aille bien. Quand le corps va bien, la tête va encore mieux !

Lesfeminines.fr Avec votre parcours titré unique, un nouveau coach à l’OL. Quel est votre objectif ?

Corine Petit. Je ne veux pas me donner de limites. Je ne sais pas si je vais jouer plus d’un an, peut-être deux, trois -pourquoi pas- bien que je ne le pense pas. Je veux juste me donner à fond et profiter. Il ne faut pas faire l’année de trop, c’est sûr, mais il ne faut pas non plus regretter car lorsque l’on aura arrêté, on ne pourra plus retourner en arrière.

Vivre de sa passion et faire tous les jours quelque chose qui nous plait, il faut le vivre jusqu’au bout. Pour une femme, cela peut être aussi difficile car on a envie d’avoir sa vie à côté, mais il faut en profiter pour ne pas avoir de regrets. Jusqu’où je peux et je donnerais le meilleur. On verra bien. Ces deux années ont été difficiles mentalement car quand on est « mis à l’écart » (même si c’est un peu fort) par le coach car il ne compte pas sur vous, c’est difficile. Je veux bien finir avec mon envie qui est toujours là !

Corine Petit a un palmarès exceptionnel en club, acquit dans sa très grande majorité sur le terrain. Pour qui a croisé la joueuse lyonnaise, chacun sait qu’elle a un vrai esprit de sportive de haut niveau. Il suffit d’ailleurs de discuter avec Elle pour savoir que ses propos sont mesurés et réfléchis et que derrière chaque objectif, il n’ y a pas pas l’émotion mais d’abord : est-il réalisable ?

Si elle s’engage une nouvelle saison, c’est pour faire et bien faire.

William Commegrain lesfeminines.fr