Docu « Les Bleues avec un E ». France 4. 3 Diffusions. 16 Juillet 2017. 22h40/19 juillet à 19h55/20 juillet à 19h55.  Alain Alain Vernon est entré à Stade 2 en 1982. Ses reportages allaient toujours chercher quelque chose au-delà du sport. Il apportait un regard intéressant et sociétal. Son documentaire de 40 minutes fait avec Abdel Zouioueche va chercher l’Histoire avec un grand comme un petit H. Celle du quotidien de l’équipe de France. Entre voyage en bus et seulement 17 matches de la période 71 à 78 aux voyages aériens en Business Class de maintenant, avec lits et staff technique pour travailler tous les aspects de la récupération.

Les pionnières sont là, armées d’une volonté et d’un plaisir d’exister au niveau de leurs capacités et dont le meilleur exemple est Marinette Pichon (meilleure buteuse de l’EDF avec 81 sélections) avec les joueuses d’aujourd’hui, entourées et bénéficiaires d’un statut de Sportive de Haut Niveau devant aller chercher au fond d’elles-mêmes, individuellement et collectivement, le détail qui fera la performance face à des adversaires au titre, qui sont exactement dans la même situation et volonté.

Pour donner une force au présent et à son avenir, on ouvre souvent la discussion avec cette phrase : « si tu sais d’où tu viens, tu sauras encore mieux ou aller ! ». Avec « les Bleues avec un E », chacun d’entre nous comprendront mieux le chemin parcouru, les exploits réalisés pour que les plus jeunes qui découvrent le football féminin, en âge de grandir, sachent aussi que « si elles viennent de loin ; elles aussi peuvent aller loin ! ».

Lesfeminines.fr D’où vient cette idée de documentaire ?

Alain Vernon. J’en avais déjà fait beaucoup de 2000 à 2006 avec notamment l’histoire des Bleus, du XV de France, Des JO .. J’avais fait une dizaine de documentaires et j’avais envie de raconter l’Histoire des filles, comme on approchait de l’Euro et que c’était chez nous (on avait les droits), on pouvait exploiter les images des JO. J’ai proposé cette idée chez nous, et ils ont accepté. J’étais content car j’avais envie de raconter cette Histoire que l’on avait jamais raconté. L’Histoire des Bleues n’avait jamais été faite et comme il y a pas mal de choses à raconter, c’était intéressant.

Les bleues avec un E. Crédit fff.fr. Lesfeminines.fr

Les bleues avec un E. Crédit fff.fr. Lesfeminines.fr

Lesfeminines.fr Justement, quels sont les moments forts de ce travail de recherche ?

Alain Vernon. C’est toujours sympa de retrouver les pionnières. Les filles de Reims et de l’équipe de France. les anciens coachs, Aimé Mignot (pro à l’OL de 1955 à 66) est encore avec nous (sélectionneur de l’équipe de France 1987, 1997). Après revoir toutes les archives, c’est génial. J’ai visionné dix heures pour en retenir trois et voir tout cela à Bry sur marne, c’était génial ! J’ai même retrouvé certains de mes reportages de l’époque sous Stade 2 quand j’étais rentré dans l’équipe de Chapatte en 82.

Je suis cela depuis longtemps et c’était tout simplement génial notamment de voir ce journaliste de L’Union, Pierre Geoffroy, correspondant de L’Equipe et de France Football, qui faire revivre le football féminin français en remontant l’équipe de Reims pour devenir sélectionneur de l’Equipe de France (1971 à 1978).

Lesfeminines.fr C’est un travail de long haleine ?

Alain Vernon. J’ai mis six mois à faire cela et j’y pense depuis un an. Il faut une bonne saison pour travailler dessus.

Lesfeminines.fr Quel est votre regard sur le football féminin ?

Alain Vernon. Je suis souvent choqué car je vois l’Equipe ne fait pas souvent l’effort de mettre en « Une ». Les grosses victoires des femmes sont souvent oubliées. Le championnat, il y a un entrefilet. Il pourrait faire un effort et consacrer une page au football féminin. Il y a des efforts à faire. Il n’y a pas que le foot, le sport féminin en général. Il y avait une grosse performance avec la fille qui avait gagné Roland Garros et rien en « Une de l’Equipe ».

Lesfeminines.fr Quel bilan faîtes vous de ce documentaire ?

Alain Vernon. Les gens vont découvrir le football féminin. Cela s’installe doucement et cela gagne ses galons. Grosso modo, ils l’ont découvert en 96, avec les américaines en se disant que cela ne joue pas mal. Pour les françaises, ils l’ont découvert en 2012 et 2016 et deux-trois Coupe du Monde. Ils voient des matches. Les gens ont vu cela. Il y aura L’Euro féminin sur France TV sans décodeur pour voir les matches. Ils vont voir le docu. La finale 2017 entre Lyon et le PSG en Ligue des Champions, cela a donné entre 5 et 9 millions de Téléspectateurs, c’est énorme !

Les mecs se sont trompés sur toute la ligne. J’ai un sentiment de culpabilité par rapport à notre génération. On n’a jamais cru que les filles joueraient aussi bien !

L’intérêt c’était de montrer comment les femmes avaient conquis leur place dans le sport de haut niveau, avec difficultés. On revient de loin. C’est une histoire un petit peu sociétale et sportive à la fois. Les gens vont découvrir qu’il y a eu des hommes qui ont fait la beauté du football féminin et qui ont donné leur chance aux femmes. Le fameux Pierre Geoffroy, visionnaire à son époque. Aimé Mignot, premier professionnel qui avait pris les filles sans trop savoir ce qu’il allait trouver et il a structuré le tout. Ensuite Aimé Jaquet a eu cette idée géniale d’ouvrir Clairefontaine aux filles et les clubs ont pu bénéficier de la formation des filles avec Lyon et les autres. Et le bon Loulou Nicollin a été le premier à ouvrir une section féminine professionnelle qui est présent dans cette histoire.

Parmi tous ceux que j’ai fait, celui là est original car cela traite d’un sujet un peu nouveau dans la société.

Lesfeminines.fr Quel est votre regard sur le football féminin. Je vous ai souvent vu à Issy les Moulineaux suivre les matches d’Issy FF.

Alain Vernon. Le football féminin est en train d’exploser. Les garçons sont nés en 1904 et ont gagné le championnat d’Europe en 1984, soit 80 ans après et Champion du Monde au bout d’un siècle quasiment. Le foot masculin ux Jeux date des JO alors que les filles sont arrivées tard. 71 pour le début du jeu. Elles entrent aux JO en 96. C’est récent et cela va encore plus exploser avec les accords de la fédération et France 2 comme Eurosport pour diffuser les matches de D1. Tous les clubs profs sont obligés d’avoir une secteur féminine et il y aura à terme un championnat de très haut niveau comme la Ligue 1. La Ligue des Champions, on voit que les françaises gagnent et il y a la Coupe du Monde qui arrive en 2019.

C’est en train d’exploser un petit peu comme le reste de la société. Le foot est à l’image du reste. Les femmes prennent de plus en plus de places dans la politique, les entreprises. C’est très bien. C’est parfait. On n’aura plus rien à faire après !

Lesfeminines.fr Explosion ou croissance ?

Alain Vernon. L’explosion c’est le nombre de licenciés. De 53.000 à 123.000. La médiatisation, il n’y en avait pratiquement pas. Maintenant, on va avoir quasiment un match toutes les semaines. C’est la première fois que France TV diffuse en prime-time un championnat d’Europe. Les JO de 2012 et 2016. Sur 10 ans, cela a explosé.

Lesféminines.fr Et la D1F, comment la voyez vous ?

Alain Vernon. Il y a des clubs qui n’auront plus leur place en D1F. Rodez, Albi, Soyaux. Ils n’ont plus les reins pour affronter les clubs de D1F avec les sections féminines des clubs pros. Tout cela va se structurer. On aura les clubs de Ligue 1 en féminine avec certes moins d’argent, moins d’exposition, moins d’intensité mais les clubs amateurs ne pourront pas suivre.

Lesféminines.fr Et l’Euro à venir ?

Alain Vernon. Cela va prendre de l’ampleur, surtout si elles vont faire un résultat. Ce que je crois car il y a des filles qui arrivent à terme sans rien avoir gagné et il y a celles qui ont gagné chez les U17, U19, U20 et qui ont la culture de la gagne. Echouafni  a fait un gros travail au niveau de l’état d’esprit. avant, il y avait des clans entre Paris, Ol, Juvisy, les entraîneurs n’avaient pas réussi à passer au-dessus de cela et à fédérer et là je crois qu’Echouafni a réussi à fédérer. Cela va le faire.

Elles vont passer le 1er tour car les adversaires semblent faciles. En quart, elles prennent ou l’Angleterre ou l’Espagne. Cela devrait passer car elles ont gagné ces équipes plusieurs fois et le gros morceau c’est l’Allemagne en demi. Les championnes d’Europe en titre et championne olympique. Et après, ce sera la Suède ou la Norvège en finale.

William Commegrain lesfeminines.fr