1 FFC TURBINE POTSDAM 1er de la Bundesliga pendant les matches allers. Gerd Weidemann est un observateur averti du football féminin allemand. Toujours discrètement, pas loin des balustrades, il sait avoir le jugement pragmatique et il a ce côté latin de donner de l’espoir à l’impossible. C’est certainement une des raisons pour lesquelles il apprécie le football féminin français. Le voici, avec ses questions réfléchies et organisés, à nous faire découvrir une potion magique germanique. Celle du 1 FFC Turbine Potsdam !

Tous les observateurs du football féminin l’ont remarqué, le 1 FFC Turbine Potsdam a fait des matches allers incroyables !

Club exclusivement féminin, coincé entre son Histoire et son passé récent (champion d’Europe 2010, finaliste 2011), poussé sans ménagement hors de l’Europe depuis cinq saisons par des clubs de l’élite de la Bundesliga masculine (Wolfsburg et le Bayern de Munich) avec une saison 2015-2016 dramatique, se maintenant tout juste dans le coeur de ses fans puis prenant le temps d’un dernier « aurevoir » au coach européen qui aurait pu recevoir la symbolique coupe Guy Roux de la longévité avec 45 ans à la tête du Turbine Potsdam pour Bernd Schröder ; l’avenir du Turbine Potsdam n’était pas teinté de rose, plutôt de noir.

Pourtant qui l’aurait cru ? Cinq mois plus tard, le Turbine Potsdam finit la première partie de la saison en tête de la Bundesliga, après avoir pris la tête sans discontinuité du meilleur championnat européen depuis les premières journées.

Matthias Rudolph, un jeune coach de 34 ans, est venu prendre en mains les destinées du club qui tourne avec un budget correct mais qui trouve, dans des principes, l’essence de sa réussite.

Valeurs ! Où êtes-vous ? Avez-vous remarqué à quel point dans le monde du football, là où tant d’émotions négatives et positives sont mises en exergue, heure après heure, sur des écrans d’ordinateurs qui inscrivent « les faits comme les rumeurs » dans toutes les langues du monde … la performance sportive dans ce sport se construit en se protégeant en interne, sur une réalité sans impôt, sans guerre et sans excès négatifs : LES VALEURS COLLECTIVES.

v.l.: Elise Kellond-Knight (Potsdam, 6), Wibke Meister (Potsdam, 8), Sarah Zadrazil (Potsdam, 27, oben), Eseosa Aigbogun (Potsdam, 16) , Jubel, jubeln, Freude, Sieg, freuen, Erfolg , 1.FFC Turbine Potsdam - SGS Essen, Fußball, Frauen, Bundesliga, Saison 2016/2017, Potsdam, 15.10.2016, Foto: Jan Kuppert

v.l.: Elise Kellond-Knight (Potsdam, 6), Wibke Meister (Potsdam, 8), Sarah Zadrazil (Potsdam, 27, oben), Eseosa Aigbogun (Potsdam, 16) , Jubel, jubeln, Freude, Sieg, freuen, Erfolg , 1.FFC Turbine Potsdam – SGS Essen, Fußball, Frauen, Bundesliga, Saison 2016/2017, Potsdam, 15.10.2016, Foto: Jan Kuppert

Nul ne sera surpris, de notre côté du Rhin, de lire que le jeune coach allemand parle de discipline comme socle sacré de la performance. Mais si vous y regardez bien, vous y trouverez de la patience, de la vérité, de la reconnaissance auprès des joueuses et du travail fait ensemble.

Avec moins de moyens que les clubs leadeurs, avec ses mots, il me semble y trouver la personnalité du coach de Juvisy, Emmanuel Beauchet comme de celui de l’Olympique de Marseille, Christophe Parra. L’un est dans le moins bien mais pourrait mériter mieux ; l’autre est dans le mieux mais pourrait finir moins bien. Nul ne sait, et eux le savent.

Mais dans les trois, je ressens la même chose : Ils ont une vérité. Elle est tout autant humaine que performance.

Essayons de comprendre ce qu’a réalisé Matthias Rudolph et disons nous que la nouvelle Mannschaft se construit pareil : un projet. Celui de Steffi Jones auquel on ne peut rien donner de plus comme crédits malgré l’Or Olympique de Rio 2016 et ses huit titres européens en vue de l’Euro 2017.

Dans le monde actuel qui se construit, L’Histoire ne fait pas l’Avenir. A l’image du Monde qui se crée dans le Monde depuis 2017, c’est un Nouveau Monde. La réponse, c’est Aujourd’hui. Pour Demain.

Lesfeminines.fr Depuis le début de la saison 2016/2017 vous êtes l’entraîneur du 1. FFCTurbine Potsdam. Qu’avez-vous fait avant ?

Matthias Rudolph. Pendant plusieurs années j’ai joué au foot pour un club de la troisième division, SV Babelsberg 03, comme joueur ; je dirais semi-professionnel, puis que en même temps j’ai poursuivi mes études pour devenir enseignant en sport et géographie. Maintenant je travaille comme enseignant.

En 2013 j’ai arrêté ma carrière comme footballeur.

J’avais aussi été entraîneur pour les U-17 et U-19. Avant de venir à ce club, j’ai entrainé des équipes juniors pendant cinq ans. Lors de la saison dernière j’ai été l’entraîneur adjoint à côté de Bernd Schröder et maintenant je suis l’entraîneur principal.

Lesfeminines.fr Comment avez-vous découvert le foot féminin?

Matthias Rudolph. Il existe une relation étroite entre les deux clubs [SV Babelsberg 03 et 1. FFC Turbine Potsdam], puisqu’on fait nos matches dans le même stade.

Souvent Turbine Potsdam a eu des matches le dimanche tandis que nous jouions le samedi. Quand j’étais encore joueur, le dimanche nous faisions nos exercices de régénération sur les terrains à côté du stade et souvent nous sommes allés voir les matches de Turbine Potsdam.

Ainsi les relations avec le club de Turbine étaient très étroites, comme en ce qui concerne le contact avec les dirigeants du club.

Lesfeminines.fr Voyez-vous une grande différence entre le foot masculin et le foot féminin?

Matthias Rudolph. En ce qui concerne le nombre d’unités d’entraînements et l’intensité, je ne vois pas de grandes différences, mais dans la manière dont on approche les choses, il faut donner plus d’explications aux joueuses, tandis que les hommes le font tout simplement, parce qu’on leur demande de le faire.

Lesfeminines.fr Comment arrivez-vous à exercer votre profession comme enseignant en étant aussi entraîneur?

Matthias Rudolph. C’est très bien organisé. Ce qui est très important, c’est que les deux tâches me donnent beaucoup de plaisirs. En tout cas ce n’est pas du stress pour moi.

Il faut aussi voir que mes études pour devenir professeur de sport s’arrangent parfaitement avec le poste d’entraîneur, surtout aussi avec la science d’entrainement. En plus j’ai deux entraîneurs adjoints : Jennifer Zietz qui a évolué pour Turbine pendant longtemps et Dirk Heinrichs, qui a été longtemps l’entraîneur adjoint de Bernd Schröder.

Les deux s’occupent des unités d’entraînement de la matinée, et moi, après avoir fini mon travail comme enseignant, je suis présent pour les séances de l’après-midi.

Lesfeminines.fr Le fait que ces deux personnes fassent partie du staff, est-ce que c’est un signe de la continuité du travail?

Matthias Rudolph. C’est dû au fait qu’ils connaissent bien les structures du club et qu’ils s’y connaissent bien en matière du foot féminin. Les avoir dans le staff, c’était une décision bien réfléchie.

Lesfeminines.fr. Qu’avez-vous pensé avant votre premier match de la saison ? Le premier match sans l’entraîneur Bernd Schröder qui avait occupé ce poste pendant 45 ans?

Matthias Rudolph. Le premier match était un match à l’extérieur contre 1899 Hoffenheim, et nous l’avons gagné 3-0. En ce moment la personne de Bernd Schröder restait en arrière-plan, puisqu’il s’agissait du premier match de la saison en Bundesliga. Le jour de match on ne réfléchit pas sur : qui était le prédécesseur ?

Lesfeminines.fr. La saison dernière était décevante pour le 1. FFC Turbine Potsdam. Beaucoup de joueuses de l’ère Bernd Schröder ont continué d’évoluer pour le club. À la fin des matches aller Turbine Potsdam s’est retrouvé sur la première place du championnat. Qu’est-ce que vous avez apporté comme changement ou est-ce que vous êtes le seul changement?

Matthias Rudolph. Je peux répondre à cela que partiellement. On devrait poser ces questions aussi aux joueuses. Nous avons changé la tactique, nous ne jouons plus toujours avec une défense à trois en ligne, ce qui était toujours le cas avant. Nous sommes plus flexibles et il arrive que nous jouons en ligne de défense à quatre.

En plus il y a de nouvelles joueuses qui sont venues, comme Sarah Zadrazil, internationale autrichienne, ou encore Eseosa Aigbogun, internationale suisse, qui par rapport à la saison précédente ont augmenté la qualité et la quantité de l’équipe. On m’a souvent posé la question quelle sont les différences entre Bernd Schröder et Matthias Rudolph dans leur fonction de l’entraîneur. Je dirais que peut-être je communique plus souvent avec les joueuses.

Mais je ne veux pas l’évaluer, je présente tout simplement cette idée comme une observation. À part cela nous sommes de la même façon concentré sur la nécessité de la discipline au sein de l’équipe, puisque autrement cela ne fonctionnerait pas.

La quantité et l’intensité de l’entraînement sont semblables aux années précédentes, on ne s’entraîne pas moins qu’avant. Le contenu des séances a probablement changé un peu (gros travail d’avant-saison avec trois entrainements par jour).

Lesfeminines.fr Est-ce que, par exemple, cela a joué un grand rôle que Tabea Kemme ne joue plus en défense mais soit maintenant attaquante?

Matthias Rudolph. Quand on regarde la saison: elle a marqué sept buts et elle se sent parfaitement à l’aise quand elle joue devant. Avec Svenja Huth elles forment un bon duo d’attaque et je crois que c’est un changement qui a largement contribué à ce que, actuellement, nous occupons la première place dans le classement.

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Lesfeminines.fr En France un club de foot féminin, le FCF Juvisy Essonne, grand palmarès et riche en tradition, a l’intention de fusionner avec un club du foot masculin. En même temps il y a des activités des grands clubs qui s’engagent de plus en plus en foot féminin. Est-ce que vous pensez qu’ici en Allemagne, le modèle de clubs purement foot féminin va continuer d’être un modèle solide?

Matthias Rudolph. Pourquoi pas? Un club comme le 1. FFC Turbine Potsdam avec ses structures établies est sans aucun doute un modèle durable. Je ne le remettrais pas en question. Il est très important de vivre la tradition dans le foot. Il y a ici une tradition qui est vécue, on le voit quand on voit nos supporteurs qui nous soutiennent lors des matches à domicile et à l’extérieur.

Mais si les signes des temps sont ainsi et que beaucoup de clubs en Bundesliga soient une section d’un grand club du foot masculin, on devrait l’accepter.

Nous, pour notre part, devons veiller à ce que nous tirons le meilleur de nos possibilités et continuer à être compétitifs en Bundesliga.

Lesféminines.fr Est-ce qu’il y a – pour les matches retour – de nouvelles joueuses ou peut-être des changements tactiques?

Matthias Rudolph. Les joueuses qui ont joué les matches aller l’ont fait d’une façon excellente. En plus nous avons « en deuxième ligne » un nombre de très, très jeunes joueuses qui attendent leur chance de pouvoir se montrer. Je n’aurais pas vu la nécessité de renforcer la qualité de l’effectif.

Cette équipe a toute notre confiance et avec les prolongements de la trève hivernale [Elise Kellond-Knight, Svenja Huth, Bianca Schmidt et d’autres] nous voulons que la composition actuelle de l’équipe continue d’exister au moins pour les deux ans qui viennent. C’est parce que -nous, pas seulement les entraîneurs mais aussi les joueuses qui ont prolongés- sommes convaincus que nous sommes à 100 % compétitifs et pouvons rivaliser avec les autres équipes.

S’il y avait des changements de tactique ou dans le jeu, je ne le dirais pas ici.

Lesfeminines.fr Pensez-vous déjà à la saison prochaine?

Les prolongements de la trève hivernale montrent clairement que nous faisons du planning pour la saison prochaine. Nous avons en tête certains modèles concernant l’équipe entière, mais cela restera interne.

Svenja Huth (Potsdam, 9), Jubel, jubeln, Freude, Sieg, freuen, Erfolg , 1.FFC Turbine Potsdam - MSV Duisburg, Fußball, Frauen, Bundesliga, Saison 2016/2017, Potsdam, 18.12.2016, Foto: Jan Kuppert

Svenja Huth (Potsdam, 9), Jubel, jubeln, Freude, Sieg, freuen, Erfolg , 1.FFC Turbine Potsdam – MSV Duisburg, Fußball, Frauen, Bundesliga, Saison 2016/2017, Potsdam, 18.12.2016, Foto: Jan Kuppert

Lesfeminines.fr Quels sont les facteurs décisifs pour le succès actuel du 1. FFC Turbine Potsdam?

Matthias Rudolph. La cohésion au sein de l’équipe joue un très grand rôle, et ce ne sont pas seulement les joueuses titulaires. Avec chaque joueuse remplaçante, qui est entrée en jeu, l’équipe a aussi reçu « une nouvelle poussée ». Il faut absolument aussi penser aux remplaçantes qui sont en deuxième ligne, mais qui peut-être pour trente ou seulement dix minutes font preuve d’un si grand engagement qu’elles changent le résultat du match ou donnent une nouvelle orientation.

C’est à cause de la cohésion de l’équipe et la discipline de l’équipe, démontrées lors de toute la série Aller, que en ce moment, en le regardant d’une manière réaliste, nous avons mérité d’être les premiers du classement.

Lesfeminines.fr Pendant la trêve hivernale vous avez eu un match amical contre Manchester City (actuel quart-finaliste Ligue des Champions) que vous avez gagné 4 : 1. Est-ce que cela donne envie de faire d’autres matches internationaux?

Matthias Rudolph. Sûrement, cela donne envie, nous mentirions si nous disions le contraire. Mais nous n’abandons pas notre devise, que nous avons déjà eu pendant la série aller: Nous ne pensons pas à la saison prochaine, notre seul focus est sur dimanche, le prochain match, premier match de la série retour du championnat.

Il n’est pas nécessaire de faire des prévisions pour des choses qui à la fin ne se réalisent pas. Il est important pour nous de bien démarrer dans la série retour et on verra ce que ça donne à la fin. Et si nous avions la possibilité de jouer contre des équipes dans le cadre de la Ligue des Champions cela serait super, mais ce n’est pas une obligation.

Gerd Weidemann Interview / William Commegrain présentation.

Lesfeminines.fr vous remercie pour cette interview « Merci beaucoup ».

Wolfsburg (32 points) vient de prendre la tête du championnat et le Turbine Potsdam joue sa première place le 12 mars dans son match en retard contre 1899 Hoffenheim (8è). Si le résultat est favorable, Potsdam prendrait la tête avec 2 points d’avance sur Wolfsburg et trois sur le Bayern. Dans le cas contraire, Les troupes de Matthias Rudolph seraient au coude à coude avec le Bayern pour la seconde place (31 chacun).

C’est une nouveauté comme en France, les joueuses vont avoir un double enjeu à prendre en compte : la Mannschaft et/ou la réussite de leur club. Pourront-elles jouer les deux ? Ce sera sûrement un des enjeux de cette deuxième partie de saison.

William Commegrain lesfeminines.fr

Classement de la Bundesliga. source dfb. Lesfeminines.fr

Classement de la Bundesliga. source dfb. Lesfeminines.fr