Il y avait longtemps que Louisa Necib ne s’était pas arrêtée aussi facilement en zone mixte. Qui ne le sait pas, et pour celui qui le découvre, autant le rappeler, la jeune femme s’est mariée au début du mois de Juin avec Liassine Cadamuro, international algérien, évoluant au Servette de Genève. Quelqu’un m’a dit : « tu verras. Depuis qu’elle est mariée, elle est radieuse ! » Effectivement, cette femme de bientôt -de 30 ans arrive dans la zone mixte en prenant naturellement le couloir des interviews quand elle avait souvent l’habitude de s’infiltrer dans celui qui mène quasiment directement à la collation d’après-match.

Il parait qu’être amoureux donne des ailes. C’est la formule qui s’écrit ou se dit, au bout d’une table quelque soit la famille qui le constate, avec le sourire qui convient. Comme la signature d’une marque qui ne se vend pas mais se recherche : « le bonheur ».

Pour autant son football n’en est pas plus éclairé ou éclairant pour l’équipe de France. Et quand on connait la qualité de jeu qu’elle a apporté aux couleurs « bleu, blanc,rouge » ; cela montre à quel point, déjà, avant -et que son mari accepte à l’avance mes excuses-, elle pratiquait le jeu « du bonheur » balle au pied, illuminant tous ceux qui la regardaient, quand, soudain, on ne savait pourquoi, de ce qu’elle créait nous semblait avoir la signature du talent.

Elle est la « seule lyonnaise acceptée et acceptable à avoir un tel accent marseillais ». C’est peu dire quand on connait l’esprit de « clocher de village » qu’ont chaque supporter pour leur club et ses couleurs. Avoir réussi ce challenge, cette performance montre à quel point la « fenotte » du Sud de la France a porté haut les couleurs rhodaniennes de telle manière, même, à donner à son Président le goût de la répartie d’un César, défendant des mots et de la voix, son Port de Marseille.

Là, l’Olympique Lyonnais.

Elle va arrêter son football. C’est décidé et en même temps, à l’évidence, elle nous montre que c’est un effort mais qu’elle a des certitudes de vivre quelque chose d’encore plus fort. A la question que je pose, après les interventions d’autres, elle le dit, en zone mixte : « Pendant ces jeux Olympiques, à chaque match qui avancera, j’aurais le coeur un peu plus pris. » A chaque fois, un peu plus près du dernier. Et à un moment, le dernier. Quelques jours passés après ce Samedi, je me dis, comme une signature de la vérité humaine : cette jeune femme qui ne disait rien autrement qu’avec son talent, là encore, sur ce dernier match -gros plan sur son visage- elle aura la justesse de laisser couler quelques larmes, d’émotions.

C’est fini. On ne quitte pas une si grande passion qu’est le football, sans pleurer. Comme un train qui part. Juste, les mots du coeur sur un visage.

Et puis la Vie reprendra. Que fera-t-elle ? A cette question que j’ai essayé de poser, juste avant son départ, elle se retourne, a simplement répondu : « je ne sais pas. pour l’instant, je suis aux Jeux ». Et elle part aussi vite qu’elle est arrivée. J’ai le sentiment d’avoir vu ce que ressent une de ses adversaires quand elle dribble. Là, présente, puis dans l’instant, passée. Dribblé.

Une évidence s’est imposée. Cette femme est une romantique. Quitter un monde connu par Amour de son mari pour aller vivre l’inconnue, sans se poser d’autres questions que de constater qu’à chaque instant son coeur est plein de ce qu’elle attendait. C’est une romantique et c’est une artiste. Vivre avec talent sur un fil. Hier et Aujourd’hui, c’était le football. Demain, son interprétation sera celle de la vie.

C’est avec ce talent qu’elle va jouer les Jeux Olympiques et tout tenter pour enfin, ramener une médaille. Au niveau où elle évolue, je ne la vois pas faire autre chose que de penser à l’Or. On est avec une joueuse qui a 140 sélections en équipe de France, 39 buts, 3 fois championnes d’Europe 2011, 2012 et 2016, 9 fois championnes de France, 2008 à 2016, 5 coupes de France de 2012 à 2016.

Pensez-vous que cette joueuse peut seulement penser à de l’Argent ou du Bronze ?

J’ai envie de retenir deux buts réalisés en Equipe de France. La premier est de la période Bruno Bini avec un France-Allemagne à Strasbourg, le 13 février 2013. La France a été menée 0-1 (12′) rapidement et les françaises sont parties pour subir le résultat, face à des allemandes vexées d’un match nul en novembre 2012. Le match est fait sous la banderole du « Match de l’Amitié ». Mais entre des français et des allemands, en football, l’amitié c’est avant et après le match. Rarement pendant.

Louisa Necib touche un ballon à droite et prise d’une illumination envoie un missile qui ira directement se figer dans la lucarne opposée ! Nous sommes à la 14′ et la France vient d’égaliser. Le public strasbourgeois entame une marseillaise et, assis à côté de Yann Hautbois de l’Equipe et de Seb de footofeminin, on reste « éberlué » devant ce tir de génie.

Puis, bien dans l’esprit lyonnais. Sans jamais chercher le perpétuel magnifique, la voilà qui 6′ plus tard, bénéficie d’une superbe balle dans la surface récupérée par Marie-Laure Delie pour la convertir en but, avant que la défense ne puisse revenir. A l’allemande. Sans se poser d’autres questions que celle essentielle. Qu’elle aille dans les filets. Et c’est Marie-Laure Delie, à l’affût qui concluera les chants du stade avec un 3ème but plein d’intiatives et de bonheur (53′). On mène 3-1 face à l’Allemagne. Je ne vous dit pas le sourire que nous avons.

Le souvenir est d’autant plus fort que c’est Nadine Kessler, la future meilleure joueuse UEFA et FIFA de 2014, qui mettra un doublé plein de volonté pour qu’au final, on se trouve avec un 3-3 qui semblait avoir les couleurs de Séville 82. La joueuse allemande ayant tout d’un Rummenigge et la France, de celle de 82. On est égalisé 3-3 par l’Allemagne, … je ne vous dis pas le sourire qu’ont les journalistes allemands !

Le second moment que je vais prendre, c’est celui d’hier soir. Avec la sélection faite pour les JO par Philippe Bergerôo qui a tout d’une sélection de clubs avec des joueuses qui se connaissent comme peuvent l’être des mécanismes d’horlogerie Suisse. D’une précision et d’une répétition redoutable. On voit la nouvelle Louisa Cadamuro. Celle qui fait jouer et briller les autres.

La balle déposée par Louisa Necib sur la zone vide, qui va devenir avec évidence pour les deux joueuses, celle de Wendie Renard, est d’une telle précision qu’elle donne envie à tous les concepteurs de machines automatiques à vous envoyer des ballons, d’arrêter la recherche plus avant, certains qu’au jeu de l’opposition, c’est la marseillaise qui donnerait les meilleurs ballons.

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Est-il possible de donner un ballon avec une telle précision une seconde fois ? Je réponds oui. Louisa Cadamuro, née Nécib, est capable de le faire. Et cela, dans le monde du football, hommes et femmes confondues. Vous ne dépasserez pas les doigts des deux mains. Et si vous êtes sévère, vous vous arrêterez aux cinq doigts de la main.

Alors qui que vous soyez, soyez juste. Car, il faudra compter Louisa Cadamuro, née Necib.

Tout cela pour finir par écrire. Que cette jeune femme qui demain, sera quelqu’un d’autre qu’une footballeuse, mérite amplement un titre ou un podium individuel mondial. Appelée en Janvier 2017 lors de la cérémonie des Ballons d’Or, avec au cou, une médaille d’Or.

William Commegrain lesfeminines.fr