Les Girondins de Bordeaux montent en D1F, sous les feux des médias confirmant que trois clubs de L1 masculine accèdent à la division de l’élite féminine, en ayant -sauf l’OM- repris des clubs féminins locaux.

Pour autant, Théodore Genoux, coach des Girondins fraichement débarqué l’année précédente, n’est pas renouvelé par les Girondins de Bordeaux ! Quelle surprise ? En effet, ne disposant pas du DES, il ne peut pas officier en D1F, comme il ne le pouvait pas d’ailleurs en D2F, pour autant, il était couvert par Anthony Vigneron. Selon l’Equipe, « reçu par Ulrich Ramé, on lui aurait signifié qu’il ne serait pas renouvelé et il s’est ouvert au quotidien national, en confirmant sa déception ».

Déception que l’on peut d’autant plus comprendre qu’il m’avait accordé un entretien mercredi dernier que je comptais retranscrire cette semaine. Trop tard. A l’évidence, il était dans une dynamique positive pour continuer l’aventure avec un projet précis expliquant la réussite, proposant un avenir.

J’ai le sentiment que le jeune coach est sacrifié sur l’autel de la D1 médiatique et stratégique qui se construit. Reste que le maintien est avant tout affaire de joueuses sur le terrain et le dynamisme qu’il avait sera peut être un élément manquant pour la saison prochaine. Le football féminin est très porté sur les liens entre le coach et ses joueuses. Elément fondamental de la réussite d’un groupe. Les différences sont sur ce point, totalement divergentes, avec le football masculin.

Pour l’avoir rencontré précédemment à Juvisy, j’avais eu le sentiment que cette expérience décisionnelle l’avait transformé et j’ai eu affaire à un coach déterminé à regarder les choses de manière positive tout en restant factuel et cartésien.

En raccrochant, il me semblait qu’il avait été un élément détonateur, une des clés de la réussite de la montée des féminines des Girondins de Bordeaux, qui l’année précédente, s’appelait rappelons-le, « Blanquefort » .. habituelles de la D2, ne dépassant jamais la 3ème place du classement.

Le travail de Théodore Genoux a permis certainement une réussite qui, n’oublions pas, a été inattendue. Que fera Bordeaux l’an prochain ? C’est une autre problématique. Mais revenons sur la perception et l’interprétation de Théodore Genoux sur cette superbe réussite d’une montée en D1F, qui s’est décidée, le dernier match, dans les dernières minutes d’une saison .. où 50% de la division descendait à l’étage inférieure.

Aucune équipe ne voulait laisser sa place. Un championnat très disputé. Pas si courant en football féminin.

Quelle magnifique performance cette montée en D1 !

C’est mérité sur l’ensemble de l’année.

Quel a été le travail pour que cela arrive aussi bien ? 

J’ai pris le groupe en Juillet. On a augmenté le nombre de séances. On est passé à quatre séances par semaine tout en augmentant l’exigence. C’est un groupe qui avait fini 3ème sous le maillot de Blanquefort, qui avait une qualité de base, il fallait mettre plus d’exigences et de travail.

Est-ce que le fait que Blanquefort soit devenu Bordeaux a eu une incidence pour les joueuses ? 

Cela m’a permis de faire passer le message plus facilement. Au niveau de la motivation cela joue. Je pense que pour venir aux séances et fournir le travail cela a eu aussi une incidence que je peux évoluer aux alentours de 20 %. Ce sont des filles qui sont de la région pour la plupart et elles sont toutes supportrices, à la base, des Girondins de Bordeaux.Elles ne viennent pas du Nord, elles sont toutes de la région Aquitaine ou du Sud Ouest. Il y a eu un sentiment d’appartenance avec le maillot bordelais et il n’y a pas beaucoup de clubs pros.

Quels sont les moments forts de la saison ? Les moments qui vont ont donné le droit de penser à une montée en D1F ? 

Le moment fort c’est lorsque l’on a gagné 5-0 contre Angers, le 1er Novembre. C’était la 7è journée. Angers à l’époque était premier. On les a reçu, on leur a mis 5-0 avec une grosse première mi-temps et là, le groupe s’est dit que l’on avait les capacités pour finir 1er .. et derrière on a eu huit victoires d’affilée. De début Octobre à fin février.

On a enchaîné sans plus jamais perdre de la saison puisque l’on a perdu notre deuxième match … le 13 Septembre. Après on a été invaincu toutes compétitions confondues. C’est cela qu’il faut savoir aussi. En Coupe de France, on a quand même éliminé deux D1, Soyaux et La Roche et on se fait sortir par la VGA aux tirs au but. Ces choses là font que le groupe y a cru !

Vous aviez un groupe de combien de joueuses ? 

On avait un groupe de 24 joueuses mais avec des filles qui se sont faits les croisés. Il a donc été très vite réduit. J’ai en plus un groupe très jeune. Dimanche, j’avais deux U17 dans un groupe de quatorze. J’ai une moyenne d’âge de vingt-deux ans. J’ai un tronc commun qui va de vingt-deux à vingt quatre ans. La plus âgée a vingt six ans. .

On a le sentiment que c’est la Région qui est montée. 

Il y a un gros engouement qui s’est crée autour de la section féminine. On a joué le dernier match devant une centaine de supporters qui ont fait le déplacement à l’extérieur, avec une grosse communion pour le titre. On a aussi des groupes de supporters en Ile de France. Dans tous les matches que nous jouons, on est suivi ce qui me fait dire que l’on joue presque à domicile quand on est à l’extérieur. Je peux vous assurer qu’ils nous ont beaucoup aidé, notamment dans notre match contre Saint-Malo.

Vous qui venez de la Région parisienne. Cela vous a fait quoi de défendre les couleurs bordelaises ? 

J’ai beaucoup de fierté car déjà Bordeaux est un grand club masculin et je me suis attaché à la Région. On est vraiment une famille avec un gros engouement que je n’ai pas connu à Juvisy. Avec des Ultras qui nous suivent et beaucoup d’encouragements. Des gens qui viennent à l’entraînement et prennent des photos. Des Facebooks de crées. C’est assez impressionnant d’autant plus que c’est vraiment du bénévolat. Des gens qui nous suivant par affection, sans aucune arrière-pensée. Cet engouement est assez unique dans le football féminin. Peut-être aussi à Lyon ?

On est quand même un club de D2 et on fait des affluences de 400 à 500 personnes à chaque match. On a joué au Matmut, le stade des pros et pas loin de dix mille personnes sont restées. On parle de D2 .. c’est quand même assez impressionnant.

Est-ce que vous vous êtes fait peur une fois dans la saison ? 

Lorsque l’on fait le 0-0 à domicile contre Yzeure. C’était dur, car il ne restait plus que huit matches. On était sur une série et la Coupe de France nous avait beaucoup fatigué. J’avais eu des absences et on avait pas pu remporter le match. C’était très dur mais on avait su  rebondir et j’avais dit aux filles que la roue allait tourner et effectivement, Yzeure a fait un faux pas. Il fait savoir que l’on était second toute la saison et on est passé premier seulement le 10 avril et à la différence de buts. Cela a été très serré jusqu’au bout !

La différence est assez large en notre faveur. On avait une vingtaine de buts d’avance. On mène 2-0 puis on prend ce but à la 88′ et on a eu 5 minutes très dur au niveau du coeur. J’avais l’info et je savais qu’Issy perdait 3-1 face à Yzeure. Donc en trois minutes, on pouvait perdre le championnat. Il y a eu deux corners et on a eu très peur mais après .. on a su tenir !

L’an prochain, c’est la D1. Vous savez que c’est très difficile pour un club de D2 de se maintenir en D1, même s’il n’y a que deux clubs qui descendent l’an prochain. 

Il va donc y avoir un promu qui restera ce qui n’était pas le cas les années précédentes. Cela, c’est déjà positif. Pour nous, on va continuer à augmenter le niveau d’exigence. Des séances de musculation que l’on n’avait pas cette année. On va recruter au maximum trois pros pour ne pas casser la dynamique.

On a un bon groupe et je suis intéressé à recruter par ligne. Bordeaux a les capacités de se maintenir. La D1 est à deux vitesses avec un Top four et les autres. De Rodez à Saint-Maur, est-ce qu’il y a tant d’écarts que cela ? Est-ce que l’on ne peut pas rivaliser avec Rodez ? Il faut prendre les points de la 5ème à la 12ème place et pour les quatre premiers, c’est du bonus.

Il faut faire surtout un bon départ aussi avec un calendrier favorable en évitant les gros immédiatement pour avoir de la confiance. C’est ce qui a manqué à Saint Maur l’an dernier, avec un très mauvais départ et je pense qu’ils ont perdu leur saison à cause de cela.

Il faut éviter d’avoir deux gros de suite car on ne se relève pas d’un 10 et d’un 11-0 en continu. 

Surtout que l’on vient de D2 et que l’on est pratiquement invaincu. Mentalement, c’est différent. Mais je pense qu’on a une chose que beaucoup de clubs n’ont pas : c’est l’engouement et cela peut réellement nous aider. Tous les clubs ne l’ont pas et on va essayer de surfer sur cela.

Franchement, je suis plutôt confiant. On sait bien qu’il y a un gros écart mais avec un bon état d’esprit, tout est possible.

Allez-vous recruter des joueuses locales ou avec des contrats fédéraux ? 

On en s’est pas encore réuni. On est en train de savourer. On va se mettre au travail la semaine prochaine.

Le sentiment que l’on a, à vous entendre, c’est que vous prouvez qu’en étant positif, tout est possible. 

Je crois qu’il faut être positif et surtout il faut avoir la gagne. Avoir confiance en soi. Se dire qu’il faut se mettre au niveau. Que l’on va gagner les matches importants sans se préoccuper du PSG ou de l’OL car tout le monde perd des points contre eux. Pour moi, il faut être positif dans la vie.

On peut réussir même quand il n’y a pas beaucoup de moyens. 

Par exemple, je trouve que Juvisy se débrouille pas mal. Ils sont 4è et ils ont failli être 3ème. Au niveau du jeu, ils ne sont pas ridicules. Contre le PSG, c’était bien alors que vous rendez compte de l’écart entre les deux clubs ? Elles n’avaient pas grand chose à leur envier sur le match. Même contre Lyon, il y avait 0-0 jusqu’à la 70′. Surtout sur la phase retour, je les ai trouvé vraiment en progrès et intéressant. Ils battent Montpellier et font match nul face au PSG. C’est pas mal.

Si on compare le Juvisy d’il y a cinq ans à maintenant, il y a un grand changement. Elles s’entraînent à 17 heures. Maintenant, est-ce qu’elles vont pouvoir passer ce palier de semi-professionnalisation ? Je ne sais pas. C’est cela qui va définir leur avenir car si les clubs pros veulent vraiment investir, cela va devenir compliqué.

Cela reste un club qui travaille. Une présidente dévouée et positive. Elle aussi a un esprit positif. Elle croit à son projet et ne baisse pas la tête. Affaire à suivre et je leur souhaite le meilleur.

Je vous souhaite le meilleur car je trouve que vous êtes un jeune dynamique avec un esprit positif et porteur. C’est une qualité et il faut la garder. Je vous souhaite un très bon calendrier car c’est important. 

C’est très important pour la dynamique et permettre de continuer à créer un engouement.

Si vous avez cinq cent spectateurs qui viennent tout le temps, cela sera super. 

On les aura.

William Commegrain lesfeminines.fr

Interview mercredi 25 mai.

On apprend par l’Equipe que Théodore Genoux n’est pas renouvelé. C’est un choix. ce jeune coach a prouvé ses qualités en réussissant une montée dans une année où la moitié des clubs se battaient pour ne pas descendre à l’étage inférieur. On peut donc affirmer que la saison a été relévée. Chaque match ayant ses enjeux.

Il est disponible pour d’autres clubs. Affaire à suivre.