A quelques mois des JO de Rio, sous les yeux de Thiago Silva, en mémoire de tous les brésiliens parisiens si nombreux avec Ricardo, Rai, les féminines parisiennes se qualifient avec une musique 100% brésilienne. Transversale puissante de Rosana, tête plongeante de l’Archange Cristiane. 1-0. C’est fait, c’est gagné, c’est qualifié !!!

Et pourtant … nous sommes à la 86′. 85 minutes que les féminines du Paris Saint Germain sont dans le camp barcelonais. A essayer de passer. A passer. A repasser et à trouver à chaque fois, un pied, une tête, les mains de la gardienne Sandra Panos. Stressant. Très stressant. En zone mixte, Caroline Seger, capitaine de l’équipe de Suède, me dira : « J’ai commencé à avoir peur à la 60′. Elles défendaient bien. Mais on a continué toutes ensembles » puis un large sourire : « nous avons gagné ! ».

But de Cristiane fêté par toute l'équipe. Qualification PSG pour les 1/2F. WCL. Crédit Giovanni Pablo. lesfeminines.fr

But de Cristiane fêté par toute l’équipe. Qualification PSG pour les 1/2F. WCL. Crédit Giovanni Pablo. lesfeminines.fr

En football féminin, des « mélées » de bonheur après un but sont rares. Vous savez, ce but dévastateur pour l’adversaire et détonateur pour les vainqueurs qui fait que tous et toutes courent vers le sauveur. Pour s’écrouler de bonheur. Ce genre de geste inconscient qui porte toute l’interrogation d’un match comme sa souffrance et enfin sa délivrance est rare en football féminin, car on est rarement amené à un tel paroxysme.

« Allons-nous nous qualifier ou pas pour cette demi-finale de WCL ? « 

Là devant plus de 12.000 spectateurs. Sous les caméras de Bein Sport. Avec tout l’environnement habituel des grands matches de Ligue des Champions masculins, les couleurs parisiennes se débattent depuis 85′ et les cris stridents des supporters ont plus d’une fois, fait rugir le stade de Charlety, enceinte qui donne aux bruits vombrissant d’un stade, des uppercuts constants d’émotions et de cris partagés.

Une gardienne espagnole qui a réalisé une superbe prestation. 

C’est que la gardienne de Barcelone a fait des arrêts incroyables depuis le début du match (3′ Morroni, 9′ Cruz, 14′ Cristiane, 28′ Dali), 56′ Erika, ..). Déjà qu’à l’aller, elle avait marqué ses 5m50 d’une très belle présence (0-0) sans pour autant avoir eu à beaucoup à s’employer, les initiatives parisiennes étant souvent hors cadre ; là il en est tout autrement.

Tout est dans le cadre, dans les coins, dans les hauteurs, à ras de terre. Mais cet incroyable « numéro 13 » est là à chaque fois. Présente et bien présente. Mettant Barcelone toujours dans la course potentielle. (0-0) sur les deux matches.

Alors, quand l’interrogation s’insère : que faire ? Farid Benstiti répondra en zone mixte, là où d’habitude on est quatre à respirer un air trop large et quand il s’agit de grands matches comme ce soir, on se maudit d’avoir un bras et uniquement un bras quand il faudrait une perche pour capter les sons, tellement la foule de la presse est nombreuse.

« J’ai demandé qu’on continue ». « Surtout ne rien changer ». « Construire pour arriver devant la zone de vérité ». Précisant même qu’il trouvait qu’il y avait des velléités de jeunesse trop prononcées de la part de Kheira Hamraoui à qui il avait demandé « d’être patiente, patiente et encore plus patiente. »

Patiente. Patiente. Quand le but ne vient pas. Pas facile. Mais les deux équipes ont décidé d’appliquer un plan de jeu précis.

Les deux équipes n’ont pas changé une ligne de leur plan de jeu. Un plan de jeu qui pouvait les faire gagner comme les éliminer. 

Nous assistons à un match où tout est écrit. Paris qui prend le ballon pour ne jamais le laisser à l’adversaire, et qui pousse son adversaire dans les quatre coins du terrain. A gauche, à droite. A droite, à gauche. Cognant. Revenant. Cognant. Revenant. Et Barcelone qui de son côté, nous montre ce qu’est une philosophie de jeu d’un club.

Le fameux « Tika, Taka ». A toi, à moi. A moi à toi. Les voilà, pressées dans tous les coins du terrain et qui cherchent à chaque fois la passe à cinq mètres, pour tisser une toile qui s’engrange puis se désagrège. S’engrange, puis se désagrège. On ne verra que trois ballons dégagés loin devant. C’est peu, très peu alors que les parisiennes ont fait le siège de la surface barcelonaise.

A ce jeu, on ne croit pas qu’il soit possible d’autre chose pour Barcelone d’espérer un match nul pendant 120 minutes et finir sur les tirs au but. On voit bien que les parisiennes ont depuis longtemps intégré que c’était la volonté du Barca. Qu’elles ont beau lutter, mais inexorablement, le temps devient l’ami, puis l’associé de la tactique espagnole.

Il reste si peu de temps.

La chance espagnole que le Barca laisse échapper. 

Et le pire arriva. Une balle de contre. Jennifer Hermoso lance légerement décalée à gauche, Barbara Latorre qui vient d’entrer. Jeune. Remontée comme une abeille. Comment ne pas être remontée quand tu a été sur le banc pendant 75′ et que tu sens ton équipe tenir tête aux stars parisiennes. En se faisant boxer sans jamais tomber.

Alors, elle courre. Effectivement elle est seule. Effectivement, le stade devient en un instant rempli d’un vide sidéral. Elle est là, comme le cosmonaute dans l’espace. A se rendre compte que peut-être, la corde qui maintient le Paris Saint Germain à la station spatiale peut se détacher. Va-t-elle mettre ce contre ? Et là, c’est la fin. Il faudrait deux buts parisiens. Nous en sommes à la 80′. Impossible.

On voit rapidement qu’elle est sur son pied naturel. L’allemande, Anne Katrin Berger, la gardienne parisienne s’approche. Elle qui vient de gagner sa place depuis le début de 2016 sur l’excellente Katarzyna Kiedrzynek. Quand une boule de feu vient s’opposer à l’espagnole. C’est la jeune Perle Morroni qui n’en veut pas. Excellente sur le match. Elle tâcle dans la surface. Silence. La Barcelonaise décide de ne pas tomber. C’est une fille. C’est le football féminin. Elle va au bout de son action et pour elle, de son rêve.

Elle part extérieur. Le gauche. Berger s’est couchée. Elle est grande. La balle est à deux doigts de passer la gardienne. Quand l’allemande s’étend et va chercher du bout de sa main droite, cette sphère qui, quand elle roule, à ce moment, a tout de la puissance du Monde.

Cri de stupeur ! Soulagement ! Nous sommes en France, à Charlety. Le Barca vient de rater sa seule occasion du match. Des deux matches. Une occasion qui aurait pu et dû donner la qualification aux espagnoles. La meilleure occasion de la partie.

Ce genre d’événement peut vous détruire un match. Un groupe. On peut avoir peur. Dans les yeux de Caroline Seger, on comprendra que la performance parisienne a été justement : « d’être gigantesque de la 1ère à la dernière minute de jeu ». C’est rare, c’est une performance. C’est ce qui fera gagner le Paris Saint Germain.

Un but Samba et Carioca !!! Rio est déjà là !

Rosana est entrée. Rosana est brésilienne. Farid Benstiti dira : « les brésiliennes elles sont extraordinaires. Un grand professionnalisme. Toujours enjouées. Quoi qu’il leur arrivent, elles « positivent ». Cette fille, qui est arrivée à Paris pendant l’intersaison, est une ancienne lyonnaise. Elle a, comme toutes les internationales étrangères, jouée sur tous les continents. Elle a un jeu très puissant. Un buffle de puissance.

Gauchère, là elle est à droite. Nous sommes aux 30 mètres. Elle peut piquer sur la profondeur mais elle a tendance à toujours entrer intérieur. Elle aime tirer. Elle aime envoyer sa puissance. Là, elle part extérieur gauche. Elle est donc entrante. Lève la tête et voit .. tel le Christ Rédempteur de la Baie de Rio, sa compatriote Cristiane au point de pénalty. La balle part. Une fusée.

Cristiane tête plongeante qui qualifiera le PSG face à Barcelone. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

Cristiane tête plongeante qui qualifiera le PSG face à Barcelone. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

La meilleure buteuse parisienne en Ligue des Champions est seule. Incroyable de la voir seule. Les barcelonaises, et l’excellente Marta Torrejon (N°18), ont pour une fois jouées le hors jeu, soumettant la réponse à l’arbitre quand pendant toute la partie, elles ont pris la décision, elles, de défendre.

Cristiane, comprend vite l’incroyable. Farid Benstiti dira : « j’ai dit à la mi-temps à Cristiane, tu en auras deux pas plus. Je compte sur toi. Sois calme ». Effectivement, la brésilienne en a eu une, seule, qui est partie extérieure (51′).

Là, j’ai l’impression de voir la statue qui domine Rio. Elle écarte les bras. Se lance. Ce sera une tête plongeante. Ne pas rater le cadre et espérer en sa chance. La balle part. Mince ! Encore cette gardienne. Elle l’a dans ses mains. Elle la touche. Elle est tout autant surprise. Trop surprises. Cette différence d’expérience fera la différence.

La balle était accessible. Elle lui échappe. La dépasse. Rebondit et inexorablement roule pour dépasser cette ligne fatidique qu’elle passera sous un tonnerre d’émotions du stade !

Sandra panos laisse échapper la balle. Elle entre. c'est la qualification du PSG. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

Sandra panos laisse échapper la balle. Elle entre. c’est la qualification du PSG. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

Les parisiennes courent vers l’ange sauveur. On voit Sabrina Delannoy faire un 60 mètres de feu. Deux autres à côté du banc sont enchevêtrées de bonheur. Pourquoi ne vont-elles pas avec les autres ? Mais oui, elles sont remplaçantes. Plus personne n’est sur le banc. Farid Benstiti crie sa joie. C’est incroyable. Elles ont marqué. Enfin marqué. Surtout marqué.

Et elles sont qualifiées. Il reste 10′ avec les arrêts de jeu. Impossible qu’elles égalisent. Barcelone le sait. Elles n’en ont pas les moyens. Elles n’auront eu qu’une occasion. Elles l’ont raté. Elles n’ont plié qu’une seule fois. Elles vont perdre et ne pas éliminer le PSG.

La vérité de la zone mixte. 

De la zone mixte, on entend les trois coups de sifflet de l’arbitre. Le cri d’un stade. Puis le trio arbitral qui passe. Et enfin, une à une, on voit passer les barcelonaises. Visages fermés. Elles passent du côté inaccessible à la presse. Font le détour pour ne pas avoir cette forêt de micros. La gardienne, auteur d’une superbe partie ne voit même pas le chemin protecteur. Elle avance. Furibonde. Tant d’arrêts pour cette balle qui s’échappe. Trop surprise que cette parisienne soit si seule. Trop surprise d’avoir eu la chance de pouvoir l’arrêter. Et cette balle qui entre quand même. Puis ce contre qui aurait pu être vainqueur. Elle mettra longtemps à dormir. Longtemps.

Elles auraient pu y croire.

Les parisiennes marchent sur l’eau. Elles sont heureuses. Incroyablement heureuses. Superbement heureuses. En cet instant, éternellement heureuses. Elles sont passées dans un match où toutes ont joué à un très haut niveau, pour l’équipe et vers l’équipe. Sans jamais se désagréger. En allant de l’avant, toutes ensembles.

Sacré moment, sacré souvenir. Sacré performance.

L’Olympique Lyonnais. Un autre match. 

La prochaine fois, ce sera Lyon. « Oui et alors ? » Voilà le sentiment sur le moment. Elles ont engrangé un capital confiance qui leur fait penser « Et alors ? ». Farid Benstiti, dira avec le respect qui convient : « Je sais comment les jouer ». Paris est comme tous les clubs, un club qui a perdu face à Lyon (5-0 en championnat). Mais c’est aussi le seul club qui les a gagné deux fois. Et une fois en Ligue des Champions, pour les éliminer.

Alors. A cet instant. « Et alors ».

Et l’avenir ?

Shirley Cruz répondra : « cela va dépendre de qui va rester et qui va être dans la future équipe ». Avec un geste et un mot plein de respect « Et si notre capitaine reste ». Elle parlait de Caroline Seger. Elles étaient côte à côte. Ne répondaient pas aux mêmes personnes. Le geste est parti vers la capitaine suédoise. Beaucoup de respect.

Shriley Cruz. Auteure d'une grande partie prendra sa décision en fonction du futur groupe du PSG. Crédit Giavanni Pablo. Les feminines.fr

Shriley Cruz. Auteure d’une grande partie prendra sa décision en fonction du futur groupe du PSG. Crédit Giavanni Pablo. Les feminines.fr

Quand vous avez une fille comme Shirley Cruz considérée comme une des meilleures joueuses du monde qui vous dit « que cela dépendra de cette joueuse. » Vous vous dîtes que cela doit être une superbe joueuse et que décidément, Paris devrait apprendre le suédois.

Sauf que Caroline Seger parle très bien le français. Elle m’a répondu en français, s’amusant de dire qu’elle le faisait pour moi. C’est une fille intelligente. Elle en a marre de m’entendre m’essayer en anglais. Elle a raison. Je suis d’une génération où dès que l’on disait « yes » on se considérait comme bilingue. Marié en AFS, on m’a demandé mon accord. J’ai répondu instinctivement « Yes ». Divorcé depuis longtemps. Je sais que je ne suis pas bilingue.

Mais si cette joueuse parle et a fait l’effort de parler aussi bien le français. Alors, ce n’est pas pour partir. Elle répond souvent : « Je suis professionnelle, je laisse la porte ouverte ». Paris a tout à fait les possibilités qu’elle ferme cette porte pour la saison prochaine. A mon avis, ils devraient.

Une demi-finale qui va faire parler du football féminin. 

Paris se qualifie face à une belle prestation barcelonaise sur un score serré (1-0), comme d’habitude (voir l’article précédent), qui a donné beaucoup d’émotions gagnantes aux joueuses et certainement au public. C’était un quitte ou double.

La demi-finale les opposeront à l’Olympique Lyonnais. Elles se connaissent. « Lyon, toujours Lyon » disait en riant Caroline Seger. Et oui, Lyon c’est quelque chose ! Rosana : « c’est la meilleure équipe de monde ».  Et si Dieu veut, alors peut-être « qu’on mettra le même but en finale des JO à Rio avec Cristiane ..  » et peut-être « qu’on éliminera Lyon ».

Sacré match et sacré challenge. En attendant, on aura un club francais en finale de la Ligue des Champions, tout à fait capable de la remporter. Lyon, deux fois déjà. Paris, une finale l’an dernier. On va parler du football féminin.

Et de l’Allemagne. Wolfsburg (deux titres) face à Frankfurt (quatre titres dont celui de champion en titre).

Le meilleur quatuor européen.

William Commegrain lesfeminines.fr

PARIS SAINT-GERMAIN – FC BARCELONE : 1-0 (0-0)
UEFA Women’s Champions League – Quart de finale
Stade Charléty (Paris)
Buts : Cristiane (86e)
PARIS SAINT-GERMAIN : Berger, Delannoy, Erika, Morroni, Houara-D’Hommeaux, Hamraoui (Rosana, 65e), Dahlkvist, Seger (c), Cruz, Dali (Mittag, 76e), Cristiane. Entraineur : Farid Benstiti.
BARCELONE : Panos, Garcia, Torrejon, Serrano, Bergara, Unzue (c), Gili (Latore, 75e), Guijarro, Putellas, Garcia, Hermoso. Entraineur : Xavi Llorens.