Laurent Nicollin, fils de Louis connaît le football sur le bout de ses doigts. Je le rencontre au siège social du Mhsc au lendemain de l’Affaire « Gaetan Laborde » qui a coûté son fauteuil de coach à Gustavo Poyet (Girondins de Bordeaux), après sa conférence de presse unique qui restera dans les annales des écoles de journalisme sportif.

Aucun mot ne sera échangé à ce sujet entre nous. Seuls deux téléphones sont posés à côté du Président, à la tête du Mhsc depuis plus de quinze ans (2002). Le sujet est sur le football féminin et la discussion sera passionnante.

Il est temps de sortir de l’idolâtrie du football féminin. 

L’homme de 45 ans est pragmatique. Une qualité absolument nécessaire quand tu sais que la famille Nicollin est au centre de l’émotion de Montpellier. Ce que je rappelle au fils de Louis, en lui précisant la réponse que j’avais reçu d’un simple artisan à Aigues Mortes à ma question. Quelles sont les deux personnes les plus reconnues dans votre région ? La réponse fuse calmement, entre un bourguignon de taureau et une bouteille de cidre local. « Georges Frêche et Louis Nicollin ». 

Un sourire de Laurent Nicollin. « deux personnes qui ont marqué la ville. L’un en politique, l’autre comme chef d’entreprise. C’est ainsi. Quand tu fais parler en bien de ta ville, en France et à l’Etranger, c’est que tu fais du bon travail et les gens le retiennent. »

La section féminine est au Mhsc depuis 2001. On prête au Président Louis Nicollin la primeur de l’initiative d’incorporer une section féminine à un club professionnel masculin. Depuis, les couleurs de Montpellier ne se sont  jamais éloignées de la quatrième place du championnat de D1F, naviguant entre la seconde, troisième et quatrième place. « Plus souvent troisième que quatrième » me reprend Laurent Nicollin.

Le football féminin, « cela fait 15 ans que nous y sommes. Donc pour moi, c’est naturel. Je regarde un match féminin comme un autre. Pas avec le même oeil car ce n’est pas le même engagement physique, mais pour le reste. Je le vois pareil ». 

Pour autant l’homme sait très bien qu’il n’y a pas que des adeptes à cette pratique féminine. « Il y a des gens qui le regarde de manière plus attentionnée depuis 4 à 10 ans, mais pour autant, on a des gens qui resteront focalisés sur le football masculin et ne viendront jamais au féminin. C’est comme cela, tu accroches ou pas. »

Dans ce cadre, l’homme attend beaucoup de sa section féminine et utilise tous les outils qu’il a à sa disposition pour réaliser la meilleure performance.

Montpellier, c’est Barcelone en France ? 

« C’est vrai qu’on a un super cadre de vie. La mer, les plages, il fait beau. On a associé avec cela un centre d’entraînement qui est l’un des meilleurs en France. Le tout dans une ville qui est sympathique à vivre. »

Lorsque vous pointez les joueuses élites du Mhsc, on s’aperçoit que la plupart restent, notamment les étrangères. Ne partent que celles qui n’ont pas de temps de jeu. « Nos étrangères viennent car on dispose d’un bon réseau pour les récupérer. On a eu une première suédoise en fin de carrière et début de maternité qui a parlé de nous en bien. Le bouche à oreille a bien fonctionné en sélections. D’autant qu’on a toujours la possibilité de faire des performances et d’offrir des opportunités de sélection. »

Alors, on garde. On revalorise les salaires mais on ne fera jamais comme l’Olympique Lyonnais et le PSG. C’est d’autant plus notre politique (60% d’étrangères) que les internationales étrangères sont moins chères que les françaises, alors on va chercher à l’étranger et on tient notre budget et notre objectif. La fédération nous en fait le reproche.”

Inévitablement, vient la question du budget. Est-ce confidentiel ? Le Président hausse les épaules. Non pas précisément. La somme sort rapidement. « Un million 4, 1 million 5 ». Je lui précise qu’elle est inférieure à celle du Paris FC. L’homme entend sans s’en préoccuper. Laurent Nicollin est un émotif pragmatique. Peu importe ce que font les autres, il regarde ce qu’il fait et il ne peut pas faire plus sur un budget global de 40 à 45 millions d’euros.

Pourquoi ? « C’est simple, c’est une somme à fond perdu. On le fait, mais tu ne peux pas faire tout et n’importe quoi. Car malgré tout, tu investis sans retour ». 

On touche à la seconde limite du football féminin quand tu regardes les choses comme un Président de club. Un club de football masculin professionnel, « c’est quinze à vingt résultats par dimanche. De la CFA, les féminines, la formation garçons et filles, l’élite. Puis il faut associer le marketing, le développement, payer les gens. »

Après le public limité « On a fait Chelsea en Coupe d’Europe avec seulement 50 à 100 ultras à la Mosson sur un public de 5000. Et Chelsea, au retour a fait moins que nous », le football féminin associé au monde professionnel rencontre le souci du retour sur investissement (Roi).

Notion logique, en concurrence normale avec les autres départements sportifs d’un club professionnel.

Les limites sont faites pour être repoussées. Et le Président Nicollin en est adepte. « C’est pas évident, il faut beaucoup d’énergies et sur le temps, on va y arriver bien que je ne vois pas du football féminin dans un stade plein de 25.000 personnes même si je le souhaite et je l’espère. Pour s’être investi dans un projet qui a fait que tu as travaillé pour que cela arrive. »

Dans ce cadre réel, quelles sont les freins et raisons d’avancer, notamment la nouvelle diffusion par Canal Plus du Championnat de France ? Ce sera la seconde partie de notre discussion.

William Commegrain lesfeminines.fr