Le Paris Saint Germain se déplaçait à Marseille pour jouer l’OM. En football, ces deux mots ont un sens opposé. Assez opposé pour que le résultat ait un sens au sein des deux clubs, leadeurs depuis longtemps de l’émotion en football masculin. 

l’OM fait une première mi-temps de rêve.

Bien qu’il s’agisse des filles, le résultat qui s’affichait sur twitter valait son pesant de surprise. L’OM, douzième et dernier de la D1F sans véritable raison menait (2-0) face au vice-champion d’Europe 2015 et 2017 et second actuel du championnat. Un premier but de Viviane Asseyi, buteuse acrobatique des ciels et blanches dès que l’occasion se présente (31′) et un second de Maelle Lakrar, d’une tête au second poteau (38′) sur un service de l’internationale française depuis que Corinne Diacre est au commande de la sélection.

L’affaire parisienne était mal engagée et Bruno Cheyrou, tout juste nommé Directeur sportif des féminines du PSG, devait se demander si le PSG n’aurait pas dû accepter sa nomination une quinzaine plus tôt, avec un PSG Montpellier que les parisiennes avaient dominé (3-0) lors de la journée précédente. Commencer avec Marseille à Marseille. Cela vaut une chanson d’intronisation. 

Le PSG s’enflamme en seconde.

Les mi-temps sont faites pour récupérer. Dans le silence. Hum … il ne faut pas être grand clerc pour se dire que Patrice Lair a claironné à ses joueuses que le silence serait pour une autre fois et qu’il fallait bien ouvrir les oreilles car il avait quelque chose à dire. Même plusieurs. Une mi-temps, c’est quinze minutes. Cela peut être court. Cela peut aussi être long. Là, en l’occurence, ces quinze minutes ont été plus qu’efficaces. 

La seconde mi-temps sera impensable et incroyable mais elle sera ce que le score affichera : (2-5) pour le PSG. Eve Perisset cinq minutes après la reprise (50′), Kadidiatou Diani les cinq minutes suivantes (55′), et un superbe triplé de Marie-Antoinette Katoto (67′, 68′, 81′). Son premier en D1F portant son total à 10 unités, mais certainement pas le dernier pour cette jeune joueuse qui vient de fêter ses 19 printemps, le 1er novembre.

Voilà un régime de lyonnaises qui aura le privilège d’être la remontée la plus conséquente du PSG qatari depuis 2012. Autrement dit, une performance !

Marie-Antoinette Katoto. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

Marie-Antoinette Katoto. Crédit Giovanni Pablo. Lesfeminines.fr

Marie-Antoinette Katoto, la joueuse qui sait surgir comme personne au niveau européen.

C’est une joueuse « tueuse » dans la surface qui est si motivée à marquer qu’elle va chercher tous les ballons disponibles. Il y a longtemps que les mots étaient présents dans mon esprit pour cette jeune joueuse de 17 ans en juin 2016, et qui avait brillé lors de l’Euro U19 en finissant meilleure buteuse de la compétition (6 buts) rejoignant des signatures du football féminin international (Anjà Mittag, Marie-Laure Delie, Ellen White, Sofia Jakobsson, Lieke Martens, Pauline Bremer, Viviane Miedema, Stina Blackstenius).

Déterminante dans la victoire, mais une blessure sur un excès de motivation

En fait, j’avais été interpellé à Clairefontaine, lors de la sélection des U20, prêtes à partir pour le championnat du monde de Novembre 2016 en Papouasie-Nouvelle Guinée. La veille, le dimanche, pour la 6è journée, elle était allée chercher un ballon inutile dans la surface montpelliéraine que Laetitia Philippe avait laissé un peu échapper. Une balle de relance. Un tacle qui avait engendré une blessure musculaire qui avait distendu son muscle de la cuisse lors d’un PSG Montpellier (1-0) du 30 Octobre où elle avait d’ailleurs marqué le seul but du match (33′, source statsfootofeminin).

Une motivation qui avait eu du sens. Le PSG avait terminé l’année 2016 avec le titre symbolique de Champion d’Automne en battant l’OL, délogé pour la première fois de la première place occupée pendant plus de dix ans consécutivement.

Blessée le dimanche, elle quittait la sélection dès le lundi. Cette jeune fille m’avait serré la main avec une telle éducation que cela m’avait étonné et cette désolation qu’elle portait, à quitter ses coéquipières et entrer dans ce minibus qui l’attendait pour la ramener à la gare. C’était incroyable à voir d’humanité. Convoquée comme pièce maitresse de Gilles Eyquem en EDF U20, elle était là, un peu seule sans être seule, à partir, avec son seul mental pour revenir.

Déterminante à nouveau pour la victoire mais une seconde blessure.

Elle ne reviendra que lors de la 14è journée (12 février 2017) face à Saint-Etienne mais se blessera à nouveau la semaine suivante dans un match important contre l’ex-Juvisy, actuellement Paris FC (1-2) où elle marquera le but vainqueur, deux minutes après l’égalisation d’Irène Parédes.

Elle ne refoulera les terrains que pour la nouvelle saison, regardant ses co-équipières jouer leur trilogie (championnat de France, finale de la Coupe de France, finale de la Coupe d’Europe) « Lyon-PSG » de 2017 sans elle ..! Et, en plus, elle ratera l’aventure de l’équipe de France des U19, arrivée en finale européenne devant l’Espagne en Août 2017 sur les terres irlandaises.

Imaginez ce que cette jeune fille de 18 ans a vu passer devant elle en 2016-2017 : une finale des championnats du monde U20 (déc 2016), une finale européenne U19 (Août 2017), une finale de la Women’s Champions League 2017 face à l’OL (Juin 2017), une finale de la Coupe de France contre l’équipe de Gérard Prêcheur (Mai 2017), et un titre de Champion de France qu’elle aurait pu donner au PSG si elle n’avait pas été blessée dans cette seconde partie de saison (mars à mai 2017).

Avec Marie-Antoinette Katoto, plusieurs de ces titres ne se seraient pas échappés pour le PSG et l’EDF.

Dans cette joueuse, il y a du « Yannick Noah ». 

Après avoir déjà marqué 7 buts dans les 8 premières journées, elle plante à l’Olympique de Marseille qui mène deux zéros à la mi-temps, comme « une torera », un triplé qui envoie le PSG sur un siège européen qui lui était bien contesté, les quarante cinq minutes précédentes.

A chercher une ressemblance, on aurait pu penser à Thierry Henry avec ses qualités longilignes de perforation. La star d’Arsenal a un jeu de percussion dont le fameux intérieur du pied droit déposé poteau opposé est une des signatures. Je ne reconnais pas Marie Antoinette Katoto dans ce jeu particulier où je verrais plutôt Kadidiatou Diani.

A mon sens, la jeune joueuse du PSG possède le même mental que l’ex-joueur de tennis français Yannick Noah, dernier vainqueur de Roland Garros en 1983 lorsqu’il allait à la volée. Il surgissait. Il bondissait. Il s’imposait physiquement à l’autre avec des qualités uniques qu’il associait à un mental très rare : « sa confiance prenait toujours le pas sur le doute ».

De plus, elle a aussi, comme lui, cet égoïsme que le sport canalise et exploite à juste titre qui fait que sa meilleure amie est son pire ennemi lors d’un match.

Il faut du talent pour maîtriser tout cela quand on a ce talent que la Vie nous a donné.

Farid Benstiti en juin 2016, lors d’un long échange téléphonique, m’avait répondu immédiatement à ma question : quelle est la joueuse d’avenir ? « Marie-Antoinette Katoto ». Il avait juste complété. « Il ne faut pas trop lui dire ». J’avais écouté la remarque et elle était restée ancrée en moi, même quand Patrice Lair, autre grand spécialiste de la performance féminine, l’avait encensé. Comme il est. Avec évidence et clarté.

Marie Antoinette Katoto a un physique unique. Certes. Plus que cela, elle a une confiance véritable en Elle qui l’amène, sur une durée de 90′, à surgir avant sa défenseuse pour marquer quand elle est devant le but et dans la surface de réparation. C’est une « Bernard Lacombe » d’un mètre 76. Une « Gerd Müller » à la française. Au même niveau qu’une « Alex Morgan » de 2012. Elle surgit et marque. 

Alors, il ne s’agit pas d’imaginer ce que sera Marie-Antoinette Katoto dans l’avenir. C’est à Elle de le construire. Il est certain qu’elle peut aller très haut en conservant cette confiance en Elle, en surgissant grâce à sa lecture du jeu et à ses qualités physiques, et en conservant ces regards « pragmatique et ambitieux » que sa performance justifie.

Elle peut rêver à ses trois mots qui lui vont bien :  » Aller plus haut, plus vite et plus fort ». L’Olympisme et son âme.

William Commegrain lesfeminines.fr