HENIN-BEAUMONT (DH) élimine SOYAUX-CHARENTE (D1F) et se qualifie pour une demi-finale historique face à l’Olympique Lyonnais. Voilà une superbe photo (credit Francis Stevenard) qui montre tout ce que peut faire le football. La Présidente Dorothée DEGOR et sa fille, joueuse, Clara, dans les bras l’une de l’autre après cet exploit sportif.

La fille est tout à son bonheur d’être passée. Gardienne, elle a eu plus que les autres peur de ce but égalisateur. La mère, Dorothée Degor, Présidente à la rescousse il y a deux ans, vit un moment rare en tant que parent. Elle a aidé sa fille à avoir ce bonheur. Mieux, elle en a été actrice. Mieux, elle en a vécu toutes les secondes. Mieux, elle le partage sur le moment. Cette photo montre une fusion unique et rare. Un moment pur de bonheur. De l’émotion « nette d’impôts et de charges ! » et que souvent, même les plus riches n’ont pas le temps d’avoir.

« Mesdames, franchissez la barrière ! » dit le slogan de la fff. Voilà un superbe moment vrai qui l’illustre bien. Cet article ne pouvait s’écrire que par de l’humanité. Il en sera la droite ligne. Comment envisager autrement cette demi-finale quand un tel déséquilibre sportif oppose les deux adversaires : Hénin-Beaumont en Régional d’un côté face à l’Olympique Lyonnais, installée sur la planète « Monde » depuis une décennie.

Le Football amateur est fait de réalités mais aussi de rêves.

Tout le monde connaît la fierté bretonne, marseillaise mais on évalue mal celle du Nord, de la toute nouvelle région des Hauts de France. C’est que le Nordiste a du tempérament et nombreux sont ceux qui leur attribuent comme première vertue : le courage.

Soyaux Charente (D1F) pourrait difficilement dire le contraire après une victoire à la Pyrrhus des héninoises (Régional) qui ont cassé plus d’une fois le moral des sojaldiciennes, menées dès la 23 secondes par un but surprise de Lewandowski.

Elles ont tenu les vertes d’Hénin-Beaumont, du nom de ces deux villes réunies en 1971 pour n’en faire qu’une. Comme ont tenu les footballeuses après être descendues en Enfer en 2015, de D1F  en D2F (2015) puis en interrégions (2017), elles qui faisaient partie de l’Histoire du football féminin (créée en 1974, en D1F en 78), ayant vu le plus jeune voisin, ARRAS FF (crée en 2001), lui prendre les premières lumières d’un sport qui commence à poindre dans l’horizon féminin.

Avoir gagné contre une D1F, ce qui en football féminin, correspond aux gouffres du Grand Canyon quand on est si loin en division. Impossible à penser avant, un bonheur à vivre après.

Je me suis interrogé sur la véracité du football amateur et son apport à l’environnement quand une performance incroyable est réussi par un sport. Là le football. Il y a un mois sous les lumières du bonheur. Depuis, au travail du quotidien. Un sacré ascenseur émotionnel ! Partagé avec qui ? Et comment ?

Laurent Brice, le maire adjoint aux sports de la ville d’Hénin-Beaumont (26.000 habitants) résume assez bien l’état d’esprit des héninoises et du Nord, avec cet accent de sincérité qui n’empêche pas sa part d’inconnue « A coeur vaillant, rien d’impossible ! » quand le médaillé de bronze de boxe des derniers JO de Rio, membre de l’équipe 2016 qui a réveillé la boxe française, Mathieu Bauderlique, 27 ans, le lendemain me confirme : « Dans le Nord, c’est la volonté qui compte !« .

1/2 finale de la Coupe de France. Henin-Beaumont rencontre l’Olympique Lyonnais, le match des extrêmes !

« Rien n’est là par hasard ! »

Ce sont les premiers mots que j’ai compris des gens du Nord. Ils viennent d’un sportif : Mathieu Bauderlique. Natif et habitant d’Hénin-Beaumont, boxe, médaille de bronze à Rio, -81 kgs, Champion du Monde APB Poids Mi-lourds. 10 combats pros. 10 victoires dont 5 par KO.

L’homme répond aux questions comme il frappe. Vite et directement. C’est sa qualité en boxe anglaise. C’est certainement son tempérament. Pour lui, la réponse est claire : « il faut se donner les moyens, être soudés dans les bons et les mauvais moments et de base, tout le monde a ses chances. » Si on lui rappelle que l’équipe de l’Olympique Lyonnais est certainement la meilleure équipe du monde et qu’il est impossible qu’une équipe régionale puisse la battre, il vous répondra : « il faut se donner les moyens, être soudés dans les bons et les mauvais moments et de base, tout le monde a ses chances. » Les Hauts de France sont têtus. Quand ils sont supporters, ils anticipent et leurs coeurs parlent. Quand ils sont au coeur de l’action, ce sont leurs tripes qui prennent les devants.

Sa maxime de SHN (sportif de Haut Niveau) est très claire. « Défendre le maillot ! » : « Il ne faut rien regretter. Il faut avoir donné tout le nécessaire pour vouloir gagner » en sachant très bien la situer dans un sport collectif. « Si un seul élément baisse le rythme psychologiquement, l’équipe ne tient plus. Il faut que tout le monde ait cette mentalité. Tout dépend de celle de l’équipe comme de savoir gérer cette émotion ».

C’est ainsi qu’il explique la performance de l’équipe de France de Boxe aux JO : « On a tous été soudés et pas seulement pendant la compétition, mais bien avant, lors de la préparation. Il y a eu de belles guerres sur les mises de gants et on a appris grâce à cela. »

Etre en interrégions et se qualifier en 1/2 finale de la Coupe de France. Avoir gagné un club de D1F bien placé. Jouer l’Olympique Lyonnais, la meilleure équipe du monde. La recevoir et si elles gagnent .. Faire une finale ! C’est juste impensable et incroyable.

L’homme est habitué au challenge difficile mentalement car lorsque l’on est sur un ring, psychologiquement et physiquement, on ne peut pas s’échapper. L’espace est petit et le combat est là et pas ailleurs. Portant, même là, dans ce sport souvent décrié car intensément physique, on réfléchit. On s’adapte.

Il le confirme, sa pensée au combat est de s’adapter : « soit on est attaquant, soit on est défenseur. Tout dépend de la tactique. Bien sûr, il faut utiliser toute la surface. Si c’est un gars offensif, il ne faut pas accepter la bagarre. C’est une adaptation qui se travaille tout au long de l’année, des années. C’est un travail de long terme. Et croyez-moi, il y a des failles partout ». 

« Les gens du Nord ont dans le coeur le soleil … »

Cette chanson d’Enrico Macias a fait le tour de l’Hexagone.  Mathieu Bauderlique : « C’est juste magnifique pour notre Région mais vous savez. Dans le sport tout est possible. Tout est possible. Les équipes peuvent surprendre car elles ont la volonté de gagner, elles sont soudées et je pense qu’elles ont la volonté et la capacité. Elles vont surprendre pas mal de monde ! ». Immédiatement, il me vient une idée : « seriez-vous près à aller les voir pour leur donner un petit mot d’encouragement ? ». La réponse fuse : « Bien sûr ! Bien sûr ! On a le même objectif : c’est de réussir et de véhiculer une bonne image : la mentalité de notre région ! ».

Gagner, une médaille olympique, c’est quoi ? « Gagner, c’est juste fantastique pour toutes les années acharnées. Cela paye. Avec la victoire, je suis plus épanoui pour mes cadres, mes entraineurs, ma famille. Je suis dedans mais je ne suis pas émotif. Ainsi va la Vie. Jusqu’à présent tout va, on travaille dur pour que cela fonctionne. Entraînement difficile, combat facile. Certes, gagner une médaille Olympique vous donne de l’importance ; maintenant, il faut garder la tête sur les épaules et rester soi-même. Il faut que les héninoises nous fassent juste une surprise. »

La Région, le Nord. Maintenant les « Hauts de France ».

Mais qu’est-ce que peut apporter une telle performance à une Mairie qui est la principale partenaire d’une association sportive ? Est-ce financier ? Humain ? Social ? D’image.

A une semaine des élections présidentielles, parler d’Hénin-Beaumont et de sa municipalité Front National, c’est risqué. Etre pris pour un partisan que je ne suis pas. Je ne le suis pas bien que comme beaucoup, j’aurais pu l’être. J’ai appris à écouter et à entendre avec l’âge ; je sais toutes les erreurs de notre parisianisme, je comprends les vérités des autres mais dans l’ensemble de mes constats, j’ai établi mes priorités ailleurs.

Cet interview a été fait trop tard après la qualification (une semaine) pour être publiable. Le calendrier était celui-là, la demi-finale se passera une semaine avant les élections. Donc, je restitue les interviews maintenant. Avec un constat. L’environnement n’est pas neutre dans la gestion d’une association sportive. Loin s’en faut. Pour le football féminin, Hénin Beaumont a fait le boulot.

Un bonheur et un honneur de recevoir un club comme l’Olympique Lyonnais.

Ce seront les premiers mots de Laurent Brice, le maire-adjoint délégué aux sports de la ville d’Hénin-Beaumont. « ce sera vraiment une belle fête du football ! ». La Mairie prévoyait de recevoir 2.000 à 3.000 personnes (ce qui me parait inférieur au score habituel de l’OL), quand bien même le score moyen est de 150 personnes en interrégional, notamment si l’Olympique Lyonnais vient avec ses stars internationales, dont par exemple Alex Morgan.

La Mairie donne 70.000 euros pour le football féminin.

C’est une somme pour une Mairie au regard de ce qui se fait ailleurs. Le FCF Henin-Beaumont était mal. Sportivement, je me souviens les avoir vu prendre un 12-0 à Charlety l’année de leur descente de D1F. Financièrement, pire. « C’est un club qui revient de loin qui avait 100.000 euros de dettes. C’est une maman de joueuse, Dorothée Degor, qui a repris le club et je ne pense pas qu’elle ait imaginé un jour d’être présidente d’un club. Elle a repris, on l’a accompagné et elle a réussi à solder les dettes du club en deux saisons et à remonter un groupe, une équipe pour cette année, des entraineurs avec l’objectif de la montée en D2F. C’est juste un très grand bonheur et le mérite du travail qui paie. »

La ville d’Hénin-Beaumont a quatre disciplines phares avec l’escrime qui a eu un médaillé olympique, la boxe masculine et l’équipe de gymnastique depuis 12 ans en national, l’homme relativise en précisant que si le club est sorti de l’impasse : « avec nous mais aussi avec un bureau fait de parents de joueuses qui ont voulu sauver le club et lui redonner sa splendeur. D’ailleurs, ils commencent à avoir des contacts avec des joueuses qui veulent revenir malgré la concurrence proche d’Arras. »

Laurent Brice explique les raisons pour lesquelles il a voulu continuer avec le football féminin, malgré ses déboires et le fait d’être exclusivement féminin. « Je voulais absolument que le club demeure car c’était vraiment une excellence sportive et je voulais vraiment la maintenir et lui donner les moyens de pouvoir poursuivre son oeuvre, tout simplement. »

Du mécénat de proximité.

Inévitablement la question qui se pose est celle du comment ? Laurent Brice : « Nous sommes le principal partenaire mais j’ai la chance d’être aussi l’adjoint au développement économique et j’ai organisé, par exemple dernièrement, un petit déjeuner avec les entrepreneurs d’Hénin-Beaumont et de ceux alentours pour présenter ces clubs d’excellences sportifs, le football féminin, l’escrime, la boxe, la gym, le club de basket et j’ai donné comme message de communiquer en utilisant l’image positive des clubs sportifs de la ville. Par le sponsoring, le mécènat. Et cela marche car des entreprises locales sont venues aider le monde du sport dont le football féminin, je sais  le mal qu’ils ont eu ces dernières années à revenir sur leur déficit, à recruter de nouvelles joueuses, à redonner une bonne image du club et aujourd’hui, c’est la récompense. » ». 

Reste le combien ? Laurent Brice indique un effort conséquent pour une mairie « avec 70.000 euros » de la municipalité et des sponsors diversifiés en plus (Auchan, Terre en Vie, Bonnet paysagiste) qui vont même jusqu’au cabinet d’avocat ! « Rien à voir bien entendu avec l’Olympique Lyonnais ! »

Je terminerais cette discussion en précisant, qu’en football féminin, c’était la chose la plus difficile que d’être récompensé. L’Homme écoute et il a envie de communiquer son ressenti : « Vous savez, j’ai assisté à de nombreux matches et on a senti une volonté de défendre le maillot et d’être pour le club. C’est Allez les verts ! » 

Et là, je ne peux m’empêcher de situer l’importance de la performance. Hénin-Beaumont gagne contre l’OL, l’info fait le tour du Monde et ils passent aux 20 heures de TF1 ! C’est tout simplement la meilleure équipe féminine au Monde. Laurent Brice, commence à prendre l’avion pour Paris, avec les joueuses : « je pense aux joueuses, c’est un véritable rêve pour Elles de jouer contre les meilleures joueuses du Monde. Elles vont le vivre ! ». Laurent Brice terminera cette conversation avec cette maxime : « A coeur vaillant, rien d’impossible ! ».

L’Olympique lyonnais. Je pose mon enregistreur. Je sais encore mieux une chose après ces deux interviews. D’abord ce qui m’avait interpellé : auparavant, elles rencontraient l’Olympique Lyonnais car c’était une obligation faisant partie du même championnat ; là elles ont gagné et mérité le droit de les rencontrer. Elles ont fait une performance !

Maintenant, avec une nouvelle sensation : « Il sont courageux ces gens du Nord ! » 

William Commegrain lesfeminines.fr

  • Merci au coach de Mathieu Bauderlique, Mohamed Nichane pour notre discussion.
  • Fcf Hénin-Beaumont (club régional) – Olympique Lyonnais (10 titres de champion de France, 5 coupes de France, 3 Coupes d’Europe. Tenant du titre 2016 de Champion de France, de la Coupe de France et de la Coupe d’Europe (Women’s Champions League).
  • Le 16 avril 2017.
  • 1/2 finale de la Coupe de France de football féminin 2016-2017.
  • Finale à Vannes.