Normalement, d’années en années, les U19 changent de catégories et deviennent candidates au niveau des séniors. Rien de nouveau à cela, sauf qu’elles avaient un mal fou à se mettre au niveau des exigences de la D1F et pénalisaient souvent la performance de leur équipe.

C’est la raison pour laquelle elles devenaient titulaires avec parcimonie. Plutôt sur deux ou trois ans, soit à 21 ou 22 ans. Pour celles qui avaient été sélectionnées en équipe de France des jeunes (U17, U19), elles avaient le sentiment légitime de régresser, n’arrivant même plus à gagner leur place, sauf pour les meilleures.

La jeunesse actuelle peut bousculer tout cela. 

La France a connu une période faste en terme de titres et de récompenses dans les jeunes catégories d’âge quand les A n’ont aucune médaille ni de titres à leur palmarès hors le gain du Tournoi de Chypre en 2012 (Bruno Bini) et 2014 (Philippe Bergerôo).

Elles ont entre 19 ans et 22 ans. Les 94, 95, 96 et 97 entrent en force dans le championnat de France !

Cela a démarré avec le titre de championne du Monde des U17 de Griedge MBock (95) et Kadidiatou Diani en 2012, renforcé par le titre de championne d’Europe des U19 en 2013 d’Aissatou Tounkara (95) ; la médaille de bronze au Mondial U20 en 2014 de Claire Lavogez (94) et Aminata Diallo (95) et maintenant le nouveau titre de championne d’Europe des U19 de Théa Gréboval (97), Clara Mateo, Grace Geyoro et Marie Antoinette Katoto. Sans compter l’entrée en fanfare de Marie Charlotte Léger (96) dans le championnat de France et la sélection des A et la découverte de Valérie Gauvin (96).

Pas un club qui n’a pas recruté une ou plusieurs jeunes joueuses, prometteuses dans les derniers championnats nationaux U19 de la saison dernière en leur offrant une place de titulaires en D1 féminine. Il y a même des 98 qui sont dans le groupe de l’élite.

A cela plusieurs raisons.

La première financière. Ce sont des joueuses qui, aujourd’hui ne peuvent exiger ; ce qui correspond au budget de la quasi totalité des clubs français. La seconde est sportive. L’évidence est là, les joueuses ont des promesses d’avenir. La troisième est structurelle. Puisque tous les clubs ont la même démarche, alors il n’y a pas de risques pour les clubs à la suivre. De manière modérée mais présente. La quatrième est un objectif commun : faire jouer les jeunes dans l’attente de 2019 avec la Coupe du Monde à domicile.

La marche va-t-elle être trop haute ? 

Le football féminin est un sport d’équipe où l’expérience prime compte tenu que les jeunes joueuses manquent de technique, de tactique et physique. Elles arrivaient à maturité vers 24-25 ans. C’était la conséquence des entraînements parcimonieux, tard le soir et dans une structure associative qui a ses avantages mais sur le plan de la performance sportive, ses défauts.

La génération qui arrive sera à maturité plus tôt. 

C’est la conséquences des Pôles régionaux, de l’INSEP, de la structuration des clubs avec des entraînements plus nombreux, des horaires aménagés, des staffs qui se sont étoffés sur le plan de la préparation physique et surtout de l’envie des jeunes joueuses à se lancer dans le football féminin plus tôt, bénéficiant souvent de nombreuses sélections les invitant au voyage et à une vie « de rêves » quand on a 16-17 et 18 ans.

Leur maturité va arriver plus vite et à l’instar d’une Tabea Kemme pour l’Allemagne ou d’une Amel Majri pour la France ; leur explosion ne sera pas seulement la conséquence d’un talent mais aussi le fruit d’un travail qui permettra une régularité dans la performance correspondant aux exigences du très haut niveau.

L’opportunité du moment : tous les clubs agissent ainsi. 

Dès lors que tous les clubs ont appliqué la même politique, le risque va s’estomper et on verra certainement cette année, compte tenu des défaits et qualités des jeunes, des résultats surprenants. Non plus en terme de buts, mais plutôt en victoires ou défaites inattendues.

Les équipes vont présenter une homogénéité qui sera faite de temps forts mais aussi de temps faibles dont la jeunesse des titulaires donnera à l’adversaire, des possibilités de retourner la rencontre, sans que les jeunes ne puissent réagir collectivement dans le temps imparti d’un match. 90′. Il y aura moins de rigueur dans la gestion des matches.

Qui a vu jouer le PSG ne peut que le reconnaître. La production n’est pas identique tout le match. Ce sera alors le banc et la capacité du coach à les identifier qui feront le maintien de la performance. Jean-Louis Saez qui a été un des premiers à lancer des jeunes « dans le Top Four » du championnat ne dit pas autre chose. Son problème est la constance.

Un obstacle en Novembre. 

La génération qui va partir en Coupe du Monde U20 pendant un mois (Novembre 2016) risque de générer des conséquences sur la performance de leur club respectif. Le PSG et Juvisy étaient les clubs les plus concernés par la sélection de joueuses lors de l’Euro U19 (5 joueuses chacun) ; là, il s’agira de la tranche d’âge supérieure.

L’équipe de France ? Surtout une titularisation. 

Inévitablement, pour les joueuses qui ont le talent et qui ont été reconnu comme tels, l’équipe de France est dans un coin de leur tête, bien présent. J’ai réalisé une interview de Claire Lavogez (22 ans), sélectionnée aux JO de Rio 2016. Son interrogation est la qualité de sa trajectoire pour 2019, ayant bien conscience que ce sont ces temps de jeu de titulaire qui détermineront de la suite internationale de sa carrière, dans un club où la concurrence est rude : l’Olympique Lyonnais en ayant pris la contrainte d’être professionnelle, ce qui en France ferme plus de portes que cela n’en ouvre. Les employeurs étant rares.

Grace Geroyo (19 ans), plus jeune, moins sélectionnée et moins connue puisqu’elle n’a pas connu le regard des A sur elle, est dans la recherche d’une titularisation au Paris Saint Germain.

On peut en conclure, quelque soit leur notoriété, les jeunes joueuses qui ont investi dans le football féminin et ont obtenu des résultats sont dans cette démarche. Une titularisation. Et le reste, on verra.

La comparaison avec l’étranger

C’est en comparant avec les jeunes étrangères que l’on verra et surtout -qu’elles verront- le niveau réel de leur prestation dans la compétition sénior. A cet effet, le parcours européen du Paris Saint Germain 2017 et pour un moindre niveau de celui de l’Olympique Lyonnais donnera le ton de la valeur à attendre du football féminin français.

Car l’objectif reste de s’évaluer et se mesurer sur le plan international. Pour l’instant, la France produit l’un des meilleurs jeux de football du monde, mais est la seule nation dans le Top 10, à n’avoir ni titre ni médaille. Montée trop récente. Hormis l’Olympique Lyonnais.

Voilà le challenge qui attend la nouvelle génération française. Être titulaire. Sélectionnée en EDF et gagner un premier titre en A.

William Commegrain lesfeminines.fr