Dans les travées de Bondoufle qui accueillera le dernier match de l’équipe de France à domicile avant de partir au Canada, le silence se fait du côté de Juvisy au regard de la joie communicante tout en étant maitrisée des jeunes Guingamp Féminines, qui coup sur coup, viennent de prendre l’avantage sur deux grosses écuries du championnat que sont le Paris Saint Germain en Coupe de France (quart de finale, 0-0, tirs au but), premier actuel du championnat et les franciliennes du Fcf Juvisy-Essonne (3ème habituel du championnat depuis plusieurs saisons).

Avec six victoires consécutives dont cette dernière victoire à l’extérieur, Guingamp prend l’avantage face à Montpellier, son poursuivant, et le met dans l’obligation de faire la même performance face aux essonniennes (deux matches de championnat qui n’ont pas encore été joués).

La victoire de Guingamp féminines s’est construite sur deux coups de canon et une maitrise de la stratégie que le match proposait.

Deux minutes, ce n’est pas grand chose. Deux fois deux minutes (2′ et 43′), au début du match et à la fin de la mi-temps et c’est deux buts de Guingamp à l’extérieur. Les deux fois pour prendre l’avantage comme le reprendre. Deux coups de canon, tellement le tir est puissant, habité par peu de doutes et sans autre envie que de tenter sereinement sa chance, sans l’excès de volonté qui fait souvent envoler les tentatives.

C’est la nouvelle force de Guingamp qui fait dire à Sarah M’Barek « attendons la saison prochaine pour faire de ses victoires (PSG et Juvisy) des certitudes » se rendant bien compte qu’elles ont gagné « en ne faisant pas le grand match de l’année, mais avec beaucoup de cœur, de générosité et de solidarité ; tout en ayant très peu d’occasions mais en les mettant au fond ».

Guingamp avait l’esprit masculin hier soir. Une occasion, une première balle pour Oparanozie (Nigéria, 21 ans, 10 buts, meilleure buteuse de l’EA Guingap), un but. 2′. Juste parfait.
Guingamp m’a semblé d’une maturité assez exceptionnelle présentant une stratégie, qui la faisait prête à subir la domination essonnienne qui fût importante dans les trente premières minutes, (1-1), et de fait, sans jamais s’enflammer après l’ouverture du score en sa faveur aussi tôt dans la partie (2′), sur une balle en retrait de Julie Soyer, que la nigérienne Desiré Oparanozie intercepta en contre pour, en deux touches de balle, arriver à la limite du rond de la surface de réparation sans avoir pu être reprise, et la catapulter au fond des filets de Céline Deville, .

Guingamp était prêt pour ce match dès la première minute. Juvisy ne l’était pas. Sarah M’Barek précisait « je me suis servie de la correction du match aller (1-6) pour la causerie d’avant-match ». Visiblement, les filles l’avaient entendu, car chez les féminines, si la créativité est une des sources principales de leur jeu, l’efficacité est bien inférieure au plus haut niveau masculin et les occasions ratées ne sont pas rares, ce qui crée d’ailleurs le suspense qui fait la saveur des matches féminins. Guingamp avait l’esprit masculin hier soir. Une simple maladresse qui se transforme en occasion, pour la première balle d’Oparanozie (Nigéria, 21 ans, 10 buts, meilleure buteuse de l’EA Guingap), qui la catapultera pour faire un but. Deuxième minute. Juste parfait.

Le vent éssonnien souffle fort dans cette première mi-temps, tellement fort qu’un proche feu d’artifice semble être un appel du pied à faire trembler les cages bretonnes. 

Juvisy joue bien. Juvisy joue même très bien et le côté de Camille Catala est très souvent utilisé pour faire descendre cette défense sur ses trente mètres afin que Juvisy s’offre les déviations qui permettraient à l’attaque francilienne de revenir au score. C’est Camille Catala qui profitera d’une déviation de Gaetane Thiney pour, en angle, réduire le score (22′) et marquer ainsi son troisième but consécutif alors que l’angle qui lui était offert était loin d’être facile.

Camille Catala se donne pour le collectif et, sur une déviation de Gaetane Thiney, égalise à la 22′ dans un angle difficile pour marquer son dixième but de la saison. Après plein de percussions, ce sera sa seule occasion. Elle la mettra au fond.
Bondoufle respire. A voir Kadidiatou Diani chercher tous les ballons en en perdant sa place de numéro 9, on se dit que la grande marée va peut-être avoir des répercussions franciliennes, seulement l’efficacité n’est pas nécessairement amie avec la domination. Les occasions des unes sont plutôt rares face à une domination aussi grande. Le jeu demande des attaquantes et l’équipe de Juvisy semble trop jouer en déviation, par des attaquantes – milieu de terrain, trouvant la défense à cinq de Guingamp sur de nombreuses trajectoires, soit en profondeur, soit sur des centres. On en vient à s’apercevoir que le football féminin de l’élite demande maintenant une exigence de tous les instants, et les deux têtes hors du cadre de Juvisy reviennent vite en mémoire. Juvisy manque sur ce match, de pointes qui puissent perforer la ligne adverse.

Après la 30′, Juvisy souffle quand il aurait fallu continuer ce qui permet à Guingamp, aux qualités athlétiques certaines, de s’apercevoir que l’on peut sortir vivant (1-1) d’une tornade et placer, avec ses qualités, sa première emprise sur ce match. La balle est maintenant dans le camp essonnien et le coup franc à la 43′ face au but, sent le danger. C’est Marine Dafeur qui se place, pourtant bousculée sur son côté gauche par une très bonne Camille Catala, qui montre que pour autant, elle n’en a pas été déboussolée, prête plus qu’au tir, à le réussir face au trou qu’elle voit et d’une superbe patte gauche, envoie un missile au fond des buts de Céline Deville. (1-2, 43′).

Les joueuses, en deux minutes, vont vers les vestiaires autrement qu’elles auraient pu y aller deux minutes avant. Guingamp avec une vraie performance en prenant deux fois l’avantage en 45′ ; Juvisy avec un coup de massue inattendu. Être menée deux fois en l’espace de 45′. A la 2′ et à la 43′.

La seconde mi-temps va montrer la force nouvelle de Guingamp et la faiblesse sur ce match de Juvisy. 

45′ minutes, c’est peu ou c’est beaucoup pour marquer suivant l’état d’esprit que l’on a en sortant des vestiaires. Sarah M’Barek ne se prête pas à ce jeu et sa décision est claire. 45′ de combat. Ni plus, ni moins. Le seul adversaire doit être nous et le temps qui s’écoule, pour qu’au coup de sifflet final, il devienne le meilleur ami du monde.

Les joueuses de Juvisy, en dominant, manquent d’occasions et d’efficacité quand les féminines de Guingamp tiennent le combat proposé sans défaillir physiquement et psychologiquement
En faisant entrer Ami Otaki (ex Ol) au milieu de terrain, en faisant sortir Desiré Oparanozie (72′), avant-centre et buteuse, elle joue sans problème la défense à l’italienne avec cinq alignées et une autre ligne de 4 pour une pointe qui n’en est pas une (Clarisse Le Bihan). Reste à Juvisy de passer ce double mur quand Emelyne Mainguy maitrise tous les ballons aériens. Reste le jeu aux pieds et les déviations mais la ligne de défense bretonne étant basse, les attaquantes franciliennes trouvent quatre fois la gardienne en libéro de sa surface, tel Manuel Neuer de la Coupe du Monde.

La seule possibilité, c’est donc soit les côtés, soit avec une percée individuelle. Et c’est Camille Catala qui s’imposera physiquement puis en vitesse pour aller à 1 mètre des buts de Guingamp, sur la ligne de but et faire un centre en retrait impeccable qui ne demandera qu’un soulier francilien, pour trouver celui d’Amélie Coquet qui passera juste au-dessus du ballon, pour que la balle roule définitivement à l’extérieur des buts.

Quand Mlle Aurélie Efe siffle la fin du match, on s’aperçoit que Guingamp a tenu toute sa mi-temps  quand Juvisy n’a pas réussi à imposer des occasions aux bretonnes. La domination a été grande, des situations mettant à mal la gardienne bretonne, plus rares. C’est une réelle performance des bretonnes et une vraie interrogation pour les franciliennes. En effet, Guingamp en est à sa seconde victoire face à l’un des trios du championnat (PSG et Juvisy) quand Juvisy en est à sa seconde défaite face à deux poursuivants (Montpellier et Guingamp) et avec une double opposition à venir.

Juvisy reste troisième du championnat ce qui est correct mais l’enseignement que j’en tire et que l’efficacité devient le maître mot du football féminin. Les situations où on peut avoir dix occasions et en rater cinq sont terminées, à oublier. Aujourd’hui, dans le football féminin du haut de tableau, les occasions seront de même facture que chez les garçons : trois, quatre, cinq. Et il faudra en mettre une ou deux … sans en prendre un seul.

C’est la formule gagnante. Elle demande de la rigueur et de l’exigence et pas spécialement une domination forte. La réussir est une performance collective. Un vrai plaisir. La renouveler tout au long d’un championnat, c’est un superbe challenge de sportives.

Le football féminin de l’élite va devenir aussi exigeant que le football masculin.

William Commegrain

Fiche technique : 

JUVISY – GUINGAMP : 1-2 (1-2). Spectateurs : 1600. Arbitre : Aurélie Efe. Assistantes : Stéphanie Pommelet & Marion Coutant

  • Buts. Fcf Juvisy-Essonne : Catala (22e) / Guingamp : Oparanozie (2e), Dafeur (43e).
  • Avertissements. Fcf Juvisy-Essonne : Dusang (44e) / EA Guingamp : Otaki (51e),Oparanozie (71e), Dafeur (85e).

Fcf Juvisy-Essonne (4-4-2) : Deville – Cayman, Guilbert, Tounkara (Brétigny, 68e), Soyer – Catala, A. Butel, Dusang (Machart, 82e), Coquet -Thiney (cap.), Diani. Entr. : Gouzènes.

EA Guingamp (4-5-1) : Mainguy – Quero, Gorce, M’Bock, Dafeur – Dali (cap.), Diallo, Le Bihan, Baldé (Robert, 63e), Douessin (Otaki, 46e) – Oparanozie (Hamon, 78e). Entr. : M’Barek.

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